Étymologie :
SAPIN, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1. Ca 1165 « le bois de l'arbre » (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 18478) ; 2. ca 1179 « arbre à feuillage persistant » (Renart, éd. M. Roques, 771) ; 3. a) 1694 sentir le sapin « n'avoir plus longtemps à vivre » (Ac.) ; b) 1695 surtout de sapin « cercueil » (Regnard, Le Bal ds Œuvres, t. 2, p. 256 [éd. de 1830]) ; 1867 id. (Delvau) ; 4. 1723 « petite voiture, fiacre » (d'apr. Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg., 1896). Du lat. sappinus « sorte de sapin », la forme anc. fr. sap (fin xie s., Raschi, Gl., éd. A. Darmesteter et D. S. Blondheim, t. 2, p. 128), est issue d'un mot pré-lat. *sappus, qui a donné p. compos. avec le lat. pinus « pin » la forme sappinus (v. FEW t. 11, p. 216 ; REW, 7592).
Lire aussi la définition pour amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Abies alba - Avet - Aveth - Ouargne - Sap - Sapin à feuilles d'if - Sapin argenté - Sapin blanc - Sapin commun - Sapin de l'Aigle - Sapin de croix - Sapin de Normandie - Sapin des Vosges - Sapin pectiné - Sapin noir - Vrai sapin - Vuargne - Warne -
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Botanique :
Eugène Rambert, auteur de Études d'histoire naturelle : Les Alpes suisses (Librairie F. Rouge, 1888) décrit avec lyrisme les sapins majestueux de la montagne :
Le chêne n'est pas commun à la montagne, il n'aime pas le sapin ; mais le hêtre et le sapin s'arrangent fort bien, au contraire, d'une vie en commun, et forment à eux deux les plus splendides ombrages que l'on rencontre sur les flancs des vallées alpines. Ils y croissent l'un et l'autre plus lentement qu'à la plaine ; mais si les circonstances leur sont favorables, ils finissent par y atteindre une hauteur prodigieuse, et il n'y a pas de forêts aux formes plus amples, plus riches, plus variées . Les sapins sont toujours les mêmes ; leur sombre verdure ne change pas, et du haut de leur éternelle gravité, ils regardent la feuille du hêtre muer à chaque saison. [...] La nature était en veine de romantisme, quand elle a marié à l'immobilité du sapin la joyeuse coquetterie du hêtre ; elle a voulu se donner la fête des contrastes, et elle en a soigneusement réservé le bouquet pour la fin : l'automne dans ces forêts a des magnificences incomparables.
[...]
C'est que le sapin est l'arbre de la montagne. Ils ont l'un avec l'autre cette convenance et cette harmonie qu'ils regardent en haut. On ne se figure sur les flancs élevés des Alpes ni chênes, ni tilleuls, ni aucun arbre qui pousse de très longues branches latérales. La croissance verticale est ici de rigueur. Ce n'est pas seulement une affaire de goût ; c'est une nécessité . Presque partout un arbre à rameaux étendus ne pourrait se développer que d'un côté. D'ailleurs, la croissance verticale est la seule qui permette aux troncs de se serrer les uns contre les autres, et de s'appuyer réciproquement pour opposer à l'avalanche ou à la tourmente une résistance plus efficace. Si le sapin est à la montagne l'arbre dominant, peut-être cela tient-il moins à la facilité avec laquelle il supporte le froid qu'à sa manière de croître, et aux avantages qui en résultent dans les luttes à soutenir.
Les sapins forment de grandes forêts, ou, comme l'on dit dans le Jura, des joux, qui revêtent d'un épais manteau les flancs des vallées et les croupes des avant- monts ; l'individu s'y perd dans la masse, comme un brin d'herbe dans une prairie ou un soldat dans un régiment. Quelquefois aussi ils couronnent les arêtes et les hérissent de pyramides et de clochetons découpés à jour ; souvent ils s'avancent en longues files sur les corniches des rochers, et s'appliquent si bien contre la paroi qui les abrite qu'à les voir d'en bas on les y croirait incrustés.
Les jeunes sapins n'ont pas une physionomie très marquée. Ils sont faits pour vivre en société et se prêter assistance. Aussi l'intérêt général l'a-t-il emporté sur les fantaisies de l'humeur individuelle. Tous prennent la forme qui convient le mieux à tous ; aucun ne dévie du type. Les nécessités d'une lutte en commun ont imprimé à la race entière un instinct d'ordre et de discipline.
Mais les forêts de vieux sapins ont une sorte de grandeur austère et solennelle, qui ne peut inspirer que de graves méditations. Ce sont les plus mystérieuses de toutes, celles dont l'ombre est la plus épaisse. Quand le vent souffle, on n'y voit ni feuilles qui tremblent, ni branches qui se tordent ; mais la masse entière ondule et se balance ; d'un bout à l'autre c'est le même mouvement et la même plainte, et ces milliers de grands arbres plient et se relèvent et gémissent ensemble, comme s'ils n'avaient qu'une voix et qu'une âme.
Les sapins les plus remarquables sont peut-être ceux que le peuple appelle gogants, antiques sapins isolés dont le bétail aime l'ombre, et qu'on laisse vieillir, depuis des siècles , près des chalets des Sous-Alpes et du Jura. Le temps les a dépouillés à demi ; il a fait de larges trouées dans leur feuillage ; les branches qui restent s'inclinent vers la terre, et celles qui croissent plus près du sol s'y appuient de tous côtés depuis tant d'années qu'elles portent le fardeau des neiges de chaque hiver, elles ont fini par céder sous le poids. Mais les branches seules ont fléchi, la cime n'a pas plié, et, malgré la fatigue de l'âge, ces vétérans, toujours debout, droits et fiers, continuent à donner l'exemple aux jeunes conscrits de la forêt. Que de gravité et de tranquillité recueillie dans cette vieillesse sévère ! mais aussi que de bonhomie ! Ils nourrissent tout un peuple de lichens parasites, dont les longues barbes grises se rejoignent de branche en branche, et il n'est pas de toit plus hospitalier que celui que forment tout autour du tronc leurs rameaux abaissés : pendant les nuits d'hiver, les chamois viennent y dormir ; en été, les chèvres, les vaches et souvent les bergers ou les voyageurs, s'y abritent pendant l'orage, ou y cherchent un refuge contre la chaleur du jour. Ils meurent rarement d'une mort vulgaire. Le bûcheron les respecte parce qu'ils sont utiles au pâtre et aussi, peut-être, parce que le bois n'en vaut pas celui des plantes plus jeunes. Ils sont réservés à la foudre. Chaque été, elle en détruit plusieurs. J'en ai vu un consumé sous mes yeux. Il s'alluma soudain de la base au faîte avec toutes ses feuilles aciculaires, ses lichens barbus et ses petites branches résineuses ; il brûla pendant quelques minutes comme un flambeau sur la montagne ; puis il s'éteignit presque aussi rapidement qu'il s'était allumé, et il ne resta qu'un tronc chauve et noirci, où le feu couva pendant quelques heures encore.
[...]
Avec leurs grandes mousses, les forêts de sapin sont pour les pentes qu'elles occupent une protection que rien ne peut remplacer. Les pluies les plus torrentielles s'y perdent comme dans une éponge capable d'absorber un déluge , et l'eau ne s'en échappe que goutte à goutte. Les masses de neige qui y tombent en hiver sont et demeurent fixées au sol, et y fondent tranquillement, sans jamais glisser; le sol lui-même en est affermi ; un immense réseau de racines le retient et le consolide, et il est bien difficile qu'il s'y détermine le moindre mouvement. Les joux sont des réservoirs qui alimentent, à leur lisière inférieure, des sources toujours limpides ; mais il ne s'y forme ni ruisseaux ni torrents ; il n'en descend aucun débris, et, à moins qu'elles ne soient attaquées du dehors, elles peuvent être considérées comme immuables ; aussi le sapin mérite-t-il, à double titre, d'être appelé l'arbre de la montagne non seulement il a tout ce qu'il faut pour y prospérer, mais encore il la protège. Aucune autre espèce ne pourrait rendre les mêmes services. [...]
Le sapin est un trésor sans prix . Oter le sapin aux Alpes, c'est à peu près comme si l'on ôtait le chameau au désert ou le Nil à l'Egypte. Sans lui, la plupart des vallées seraient inhabitables. Malheureusement, beaucoup de montagnards n'ont pas encore compris ce que leur vaut cet arbre tutélaire , et les coupes inconsidérées qu'ils pratiquent eux-mêmes ou qu'ils permettent à la spéculation, en donnent chaque jour la preuve trop évidente.
Koni Häne et Michèle Kaennel Dobbertin, dans un article intitulé "Mon beau sapin, roi des forêts" (in La Forêt, janvier 2006) brosse le portrait du Sapin :
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Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques du Sapin :
Propriétés Physiques et Usages médicaux — Les bourgeons des différentes espèces de pins sont usités en médecine ; les plus recherchés sont ceux du sapin argenté. Ils ont une odeur et une saveur résineuses légèrement aromatiques. Ces bourgeons sont excitants, antiscorbutiques, diurétiques et diaphorétiques. On les emploie en infusion ou en décoction dans l'eau, la bière, le vin, le lait, contre le scorbut, les rhumatismes chroniques, la goutte vague, les catarrhes des bronches et de la vessie, la gonorrhée, la leucorrhée, les scrofules, les affections cutanées chroniques, les syphilides, etc. A l'extérieur, on les emploie en injection dans les écoulements muqueux et en lotions sur les ulcères sordides, scrofuleux, atoniques ou gangréneux (Cazin). Depuis quelques années on a préconisé aussi dans le traitement des rhumatismes les bains de vapeur résineuse obtenue par la combustion des copeaux de sapin.
A. B., auteur discret de Les Vertus des plantes - 918 espèces (Tours, 1906) recense les propriétés thérapeutiques d'un grand nombre de plantes :
Sapin. Abies. Sapin rouge. La pesse. Tenuore folio.
Sapin ou pin. Laxi folio.
VERTUS : La graine de pin est très adoucissante, restaurante, aphrodisiaque, un peu diurétique, pectorale, très bonne dans la phtisie, bronchite, les catharres, pour déterger les ulcères internée et adoucir les humeurs qui les entretiennent. On en tire une huile par expression qui possède toutes les vertus de celle d'amande douce.
Les bourgeons de sapin ou de pin sont excellents en tisane pour les rhumes de poitrine, bronchites, comme pectoraux, balsamiques, adoucissants.
La résine ou colophane sert à faire les topiques mâles avec les huiles médicamenteuses. On en fait un onguent pour les plaies, ainsi composé : résine et suif de bœuf ou de mouton parties égales et l'on peut rendre cet onguent plus consistant ou moins, plus ou moins actif en y ajoutant des huiles médicamenteuses et en diminuant le suif, on peut aussi prendre d'autres résines balsamiques telles que baume de tolu, de Judée, du Canada, etc., selon ce que l'on veut en faire.
On tire encore du sapin et du pin lo goudron, dit goudron de Norvège ou goudron végétal qui sert à bien des médicaments, telle l'eau de goudron qui se fait ainsi : enduire un pot de terre par toutes les parois intérieures, puis verser de l'eau, à boire 24 heures après, remplir au fur et à mesure que l'on boit, cette eau est très souveraine pour les affections des bronches, les catharres, et l'on peut s'en servir pour faire des tisanes pectorales ; répandu sur le feu et aspirer la fumée, soulage tous les rhumes de cerveau.
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Usages traditionnels :
Alfred Chabert dans De l'emploi populaire des plantes sauvages en Savoie (in Bulletin de l'Herbier Boissier, Vol. III, nʻ5-6-7, sous la direction de Eugène Autran, Genève, 1895) évoque le sapin :
Il reste donc à parler d'un instrument tout à fait primitif, spécial à nos Alpes, servant à annoncer la pluie et le beau temps et connu sous le nom impropre de baromètre, et d'un emblème pour écarter les maléfices.
Ce baromètre, auquel M. Doumet (Bulletin de la Société botanique de France, 1866, tome 13, p. 44) a donné le nom d'hygroscope à branche de sapin, est en usage dans toute la Savoie et surtout dans le département de la Haute-Savoie. Il est formé par la flèche d'un jeune sapin dont tous les bourgeons du verticille supérieur ont été atrophiés, sauf un seul qui a donné naissance à une branche. La flèche est coupée au-dessous d'elle, au printemps au moment où la sève monte ; puis la flèche et la branche adhérente à sa base sont séchées lentement à l'ombre et dépouillées de leur écorce ; la branche est taillée à la longueur de 12 à 15 centimètres ; la flèche conserve toute sa longueur, qui varie entre 25 et 40 centimètres. Par une extrémité, la branche est clouée sur une planchette verticale, par l'autre, elle est retenue par un morceau de fil de fer. La flèche reste libre, comme l'aiguille d'une montre ; elle en diffère en ce qu'elle ne peut pas se mouvoir toute entière, en tournant autour d'un pivot ; elle ne peut que s'infléchir par sa pointe, vers le haut et vers le bas de la planchette, selon un arc équivalent à un cinquième ou un sixième de la circonférence d'un cercle. Parfois l'arc parcouru par l'aiguille est divisé en une série de degrés, dont la moyenne correspond à variable, la plus haute à beau fixe, la plus basse à la pluie ; mais en général ces graduations n'existent pas ; le point du variable est seul indiqué et l'on juge des variations atmosphériques par l'amplitude des inflexions de l'aiguille autour de lui.
J'ai constaté en diverses circonstances l'exactitude de cet hygroscope, mais il doit être renouvelé tous les deux ou trois ans, le bois de sapin perdant assez rapidement ses facultés hygroscopiques. Comme il est très rare de trouver en forêt un sapin dont tous les bourgeons du verticille supérieur se soient atrophiés, sauf un qui se sera développé, les montagnards qui fabriquent le soi-disant baromètre détruisent eux-mêmes les bourgeons sur de jeunes arbres.
Le sapin ne se borne pas à annoncer la pluie : il possède encore la propriété d'écarter les maléfices, d'arrêter les effets du mauvais œil, de détourner les sorts, et ce qui serait plus pratique, d'empêcher la chute de la foudre ! Pour cela, il faut un sapin dont le bourgeon terminal ait été atrophié ainsi qu'un des six bourgeons du verticille supérieur (le verticille supérieur a normalement quatre ou six branches) ; les cinq bourgeons restants doivent avoir fourni cinq branches croissant non pas horizontalement et en divergeant, mais verticalement et d'une manière plus ou moins parallèle comme les doigts de la main. On coupe cette extrémité de sapin, on l'écorce et on taille ses branches à diverses hauteurs, pour lui donner l'aspect d'une main ouverte. Elle est alors placée, les extrémités en haut, au-dessus de la porte, sur le toit des chalets ou des cabanes bâties par les bergers, les charbonniers ou les bûcherons. Cet emblème me paraît être en Savoie d'importation étrangère, car il est rare sur les toits de nos chalets et plus fréquent dans les montagnes d'Italie et du Tyrol. Il domine toujours les cabanes des bûcherons tyroliens qui viennent abattre nos forêts.
Par une coïncidence curieuse, cet emblème se trouve être la reproduction de la main ouverte et dressée que l'on voit dessinée grossièrement sur les murs des chaumières arabes, ou représentée de manière tout à fait primitive sur des tableaux, dans les maisons des Arabes riches et des Mauresques élégantes d'Alger. Dans l'Afrique du Nord et, paraît-il, dans une grande partie du monde musulman, la main ouverte et dressée, dont j'ai oublié le nom arabe, sert aussi à protéger contre les maléfices.
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Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :
Les purgatifs les plus employés sont, dans les plaines et les basses montagnes, les baies et l'écorce de racine de nerprun, Rhamnus cathartica, et, dans les régions plus élevées, la résine de sapin ou vargne, Abies picca, à la dose de 20 à 20 grammes dans du bouillon ou du petit lait ; mais on emploi devient de moins en moins fréquent à cause des douleurs rénales qu'il suscite parfois aujourd'hui, et sur lesquelles la tradition des temps anciens est muette. Il n'est pas impossible que cette irritation du rein observée à l'époque actuelle soit due à l'alcoolisme devenu plus fréquent qu'au siècle dernier.
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Croyances populaires :
Adolphe de Chesnel, auteur d'un Dictionnaire des superstitions, erreurs, préjugés, et traditions populaires... (J.-P. Migne Éditeur, 1856) propose la notice suivante :
SAPIN. Sur les monts Sudètes, les jeunes filles promènent, le dimanche de la passion, et lorsque le temps est doux, une branche de sapin à laquelle sont suspendus des rubans et des coquilles d'œuf. Cela s'appelle les annonces de l'été, et l'on croit que l'accomplissement de cette cérémonie rend favorables les récoltes et les entreprises.
Symbolisme :
Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme du sapin :
SAPIN - ÉLÉVATION.
Le Sapin se plait dans les régions froides ; il s'y élève à des hauteurs prodigieuses.
Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :
Sapin - Élévation.
Cet arbre toujours vert se trouve dans toute l'Europe et jusqu'aux confins de la Laponie. Il élève sa cime jusqu'à soixante mètres de hauteur et son tronc atteint quelque fois six mètres de circonférence. Il croît sur les montagnes dont il décore les croupes de son feuillage sombre. Lors qu'il est isolé on dirait un gigantesque obélisque se détachant sur la blancheur de la neige.
Que j'erre avec plaisir sous le pesant ombrage,
De ces sapins pressés qui, d'étage en étage,
Allongent dans les airs leurs gigantesques fronts. CHÉNÉDOLLÉ.
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Édouard Grimard, auteur de L'esprit des plantes, silhouettes végétales. (Éditions Mame, 1875) propose sa propre visions des plantes :
Les Sapins, comme les Pins, sont de grands arbres résineux, mais là s'arrête la ressemblance. Élégance et majesté, grâce et puissance, tels sont les caractères de ce végétal magnifique. C'est au sein de ses forêts qu'il faut le voir étaler ses longues branches et dresser sa fière pyramide jusqu'à plus de quarante mètres de hauteur. Dans les Pyrénées, dans les Alpes, sur les Vosges, dans la forêt Noire, et enfin tout le long de la Suède et de la Norvège, s'étendent d'admirables agglomérations de grands Sapins dont la majesté est indescriptible. Un vieux Sapin couvert de neige, comme ceux qu'excellait à peindre le paysagiste Calame, est certainement une des plus remarquables figures du monde végétal, et lorsque, par un de ces artifices qui abondent dans la nature, on trouve quelques-uns de ces beaux arbres accrochés aux flancs d'une roche et surplombant quelque fougueuse cascade, le paysage alors revêt une telle expression pittoresque que le voyageur, frappé d'admiration, s'arrête et demeure rêveur.
Connaissez-vous les Pyrénées, ami lecteur, et, dans les Pyrénées, le col d’Aspin ? Si vous avez suivi cette admirable route qui, de Bagnères de Bigorre, va, par la montagne, jusqu'à Bagnères de Luchon, vous pouvez avoir une idée de l'effet saisissant que produit une belle forêt de Sapins. Cette forêt, c'est celle de Paillole, qui traverse la route qui monte, monte et tourne avec lenteur, jusqu'à ce qu'enfin l'on arrive au sommet du col, où le panorama devient alors d'une magnificence incomparable. Derrière s'étend la forêt sombre, hérissée, profonde ; à vos pieds s'ouvre la large et pittoresque vallée d'Aran ; puis à l'horizon s'arrondit l'amphithéâtre grandiose, dont les gradins se colorent suivant cette admirable gamme des teintes montagneuses qui, des premiers plans d'un vert foncé, passent au vert clair, puis au vert bleuâtre, puis enfin au blanc pur, à cette belle ligne des neiges qui étincelle au soleil et que dentelle, sur le ciel pâle, une rangée circulaire de pics géants dominés, tout au fond, par les puissants sommets du groupe de la Maladetta. Qui a vu ce spectacle ne l'oubliera de sa vie, et réunira toujours dans son souvenir les noires teintes de la forêt de Paillole avec les lumineuses splendeurs du panorama du col d'Aspin.
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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :
Associé comme le pin à l'immortalité - d'où l'usage russe de recouvrir un cercueil de branches de l'arbre - , le sapin est le roi de la forêt en Europe du Nord, où il joue un rôle équivalent à celui du bouleau et du chêne. En Suisse et dans le Tyrol, le « génie de la forêt », souvent représenté avec cet arbre déraciné dans la main, vit dans les sapins, de préférence ceux qui ont atteint en âge vénérable. Ceux-ci inspirent le plus grand respect et on les coupe qu'avec répugnance d'autant plus que le génie « supplie de se laisser vivre ».
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Diana Cooper, auteure du Guide des archanges dans le monde animal (édition originale 2007 ; traduction française : Éditions Contre-dires, 2018) nous délivre un :
Message des arbres :
Nous venons du cœur de Dieu. Nous n'avons rien
à apprendre et beaucoup à offrir. Nous avons été ensemencés
sur la Terre pour le bien du règne humain et animal, incluant
les oiseaux et les insectes, et pour nourrir la planète elle-même,
physiquement, émotionnellement et spirituellement. Nous
diffusons l'amour et la guérison pour vous.
Les conifères - pins, épicéas et sapins : Les sapins et les pins élèvent votre fréquence vibratoire et vous permettent de guérir et de vous régénérer. Il n'y a rien de mieux qu'une promenade dans une forêt de sapins ou de pins pour vous remonter le moral et vous aider à vous sentir bien. Ils guérissent littéralement le corps et l'esprit. ces arbres aident les gens à atteindre la cinquième dimension.
Ce n'est pas par hasard que de nombreux centres de ressourcement et complexes de balnéothérapie sont construits dans des forêts de sapins et de pins, car ces arbres vous aident à retrouver l'équilibre et la santé.
Dans les grandes forêts, ces arbres conservent une grande sagesse ancienne ainsi que la technologie spirituelle du futur apportée par les êtres d'autres systèmes stellaires. Ils les gardent jusqu'à ce que nous soyons prêts à y accéder.
VISUALISATION POUR AIDER LES ARBRES
Aménagez un espace où vous pourrez vous détendre sans être dérangé.
Faites appel à l'archange Purlimiek, l'ange de la nature, et sentez sa belle énergie vert-bleu.
Permettez à n'importe quel arbre d'apparaître dans votre esprit.
Bénissez-le et remerciez-le d'être venu vers vous.
Demandez au rayon doré du Christ de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.
Demandez au feu lilas de la Source de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.
Demandez à l'énergie protectrice bleu foncé de l'archange Michaël de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.
Demandez à la lumière aigue-marine de la sagesse féminine divine de l'ange Marie de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.
Demandez à la lumière argentée de l'archange Sandalphon de l'équilibre et de l'harmonie de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.
Prenez un moment pour invoquer toutes les énergies qui vous attirent et voyez-les se déverser dans l'arbre.
Imaginez les couleurs qui s'écoulent d'une racine à l'autre en connectant le réseau d'arbres et en dynamisant les lignes ley.
Ouvrez les yeux ensachant que vous avez aidé les arbres.
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Liz Marvin, autrice de Grand Sage comme un Arbre (Michael O’Mara Books Ltd, 2019 ; First Éditions, 2021 pour la traduction française) transmet les messages qu’elle a pu capter en se reconnectant aux arbres :
Repose-toi tout ton saoul : le Sapin blanc
On dit qu’il faut récolter le foin quand le soleil brille. Et quand le temps est couvert ? Pose ta fourche et prends le temps de souffler. Les conifères comme le Sapin blanc sont des experts pour savoir quand se la coule douce. Ils gardent leurs aiguilles toute l’année, contrairement à leurs collègues feuillus, ce qui leur permet de faire un peu de photosynthèse quand le soleil brille en hiver. Malgré tout, ils baissent le régime à cette période, pour ne pas perdre trop d’eau par leurs feuilles.
Sois ouvert au changement : le Sapin baumier
Un arbre ne peut guère se protéger d’un coup de vent ou d’une chute de température. Il ne peut pas prendre des vacances au soleil ! Les arbres doivent accepter ce que l’univers leur réserve, et s’adapter aux imprévus ? Ils ont donc évolué pour devenir adaptables. Le Sapin baumier, par exemple, a trouvé la solution pour survivre au climat du Grand Nord sans pour autant perdre ses aiguilles, afin de faire de la photosynthèse toute l’année, et sa sève épaisse ne gèle pas. Les changements peuvent donner un sentiment d’inconfort, mais être bousculé dans ses habitudes oblige souvent à évoluer.
Profite de ta communauté : le Sapin Douglas
Comme les hommes, les arbres se portent mieux s’ils sont bien entourés. Les scientifiques se demandent pourquoi les Sapins poussent de manière aussi rapprochée, au risque d’être en concurrence pour la lumière. Mais il se trouve que leurs racines sont reliées, grâce aux champignons mycorhizes du sol, ce qui leur permet de partager les nutriments. Le Sapin Douglas utilise ce réseau pour alimenter les arbrisseaux, ou pour maintenir en vie une souche si elle est importante pour le bien commun. Et cette communauté n’est pas réservée aux Sapins : ils aident aussi leurs voisins d’autres essences.
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Arnaud Riou dans L’Oracle du peuple végétal (Guy Trédaniel Editeur, 2020) classe les végétaux en huit familles : les Maîtres, les Guérisseurs, les Révélateurs, les Enseignants, les Nourricières, les Artistes, les Bâtisseurs et les Chamans.
Les Bâtisseurs : le Hêtre, le Peuplier, le Sapin, le Baobab, le Séquoia, l’Acacia, le Platane. Ils peuplent, ils construisent, inspirent l’édification d’une société. Ils en sont le ciment.
[...]
Auprès de mon arbre,
Je vivais heureux,
J’aurais jamais dû m’éloigner de mon arbre
Auprès de mon arbre,
Je vivais heureux,
J’aurais jamais dû le quitter des yeux.
Les Bâtisseurs : Ils font partie du paysage. Ils donnent du relief, créent de la présence. Ils tiennent compagnie et nous ramènent à l’essence même du vivant. Ils abritent les oiseaux, les écureuils, les insectes. Sans eux, il n’y aurait pas de forêts, pas de bois. Les Platanes qui bordent les routes, le grand Chêne qu’on va enlacer, le Hêtre en haut duquel le merle fait son nid, les Sapins, les Baobabs, les Séquoias. Les arbres ont démontré leur intelligence. La science sait désormais ce qu’enseignent les chamans depuis des siècles : les arbres sont capables d’empathie, d’intelligence relationnelle, de solidarité et de mémoire émotionnelle. Ils ont une conscience du tout. Ils interviennent auprès de leurs congénères, ils protègent, alertent, sécurisent, harmonisent, bâtissent. Ils équilibrent et peuplent nos forêts. Ils font partie de notre paysage et méritent de gagner notre respect.
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Dans la souplesse, relie la terre au ciel,
Le corps à l'esprit.
Dans la souplesse, danse ta vie.
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C'est le roi des montagnes, le prince des forêts. Il est le symbole de l'hiver, de la neige et de Noël. Le Sapin met notre cœur en joie. Il est aussi populaire qu'il apporte de chaleur et d'enthousiasme, surtout dans les mois froids de l'année. On le reconnaît entre mille par son tronc bien droit et cylindrique,, sa forme régulière et pyramidale et ses branches chargées d'aiguilles d'un vert profond et brillant poussant à l'horizontale. Cet arbre, qui est l'un des plus hauts de la forêt, nous inspire la verticalité, la droiture par son tronc stable dense et puissant, et le rayonnement et la communication par ses branches larges et généreuses. Cet arbre résineux aux aiguilles persistantes se plaît dans les massifs montagneux. Il préfère l'ombre et craint la sécheresse, c'est pourquoi il s'expose davantage sur les faces nord des montagnes. Le Sapin se reproduit par le biais de ses petites fleurs mâles d'un jaune vif à la base du tronc et les femelles à l'extrémité des rameaux courts qui seront dispersés par le vent. Le Sapin est un arbre à croissance lente. Il faut attendre les dix premières années de son adolescence avant qu'il prenne totalement l'envergure de sa vie d'adulte pour atteindre jusqu'à trente mètres de haut dans les deux à trois siècles de sa vie. Ses cousins, les Épicéas, ressemblent beaucoup aux Sapins et s'invitent dans les foyers à la période de Noël. La tradition du Sapin de Noël est liée au solstice d'hiver le 21 décembre. C'est une tradition celte âgée de plus de quatre mille ans. Elle s'est démocratisée et s'invite dans les maisons depuis six siècles. Aujourd'hui, le Nordman est considéré comme le roi des Sapins à Noël. Parce qu'il ne perd pas ses aiguilles, on retrouve ce Sapin issu du Caucase dans plus d'un foyer sur cinq la semaine de Noël.
Les Épicéas qui eux offrent un vrai parfum (mais perdent leurs aiguilles) sont très appréciés aussi. Le Sapin joue un rôle important en montagne par sa grande capacité à transformer l'oxygène à partir du Co2. Grand acteur de l'écologie, il contribue largement à purifier l'air en agissant comme un filtre qui capte le dioxyde de carbone responsable de l'effet de serre. Par ailleurs, son système racinaire permet de stabiliser le sol et de réduire les risques d'inondation. Enfin, les résineux abritent une grande variété d'animaux sous ses branches. Par son caractère facile et social, le Sapin est utilisé dans le reboisement des forêts. Son bois tendre et souple aux veines blanches est apprécié dans la construction. On l'utiliser pour les planchers, les charpentes et dans toute la menuiserie. C'est un arbre médecin dont la sève sert au traitement des affections respiratoires. Le Sapin est un arbre souple, léger et fluide. Il libère la transpiration, traite l'asthme, la bronchite et la toux. Il fluidifie la circulation du sang et l'énergie vitale. Il est tonique, accélère la cicatrisation. Pont agile entre terre et ciel, le Sapin incarne la fluidité du lien qui peut relier la matière à l'esprit, le temporel à l'éternité. C'est pour les Celtes un symbole des forces de lumière sur les ténèbres. Au milieu de l'hiver, le Sapin inspire l'abondance et la générosité. Par sa constance à rester vert toute l'année et à supporter le poids de la neige, il nous encourage à considérer les épreuves comme autant d'opportunités de développer notre souplesse d'esprit et notre résilience.
Mots-clés : La souplesse - La droiture - L'engagement - L'écologie - La chaleur - Le solstice - L'équilibre - La joie - La célébration - La résilience - La simplicité - La facilité - Le lâcher-prise.
Lorsque le Sapin vous apparaît dans le tirage : C'est généralement pour vous parler de simplicité, de facilité. Le Sapin est un Bâtisseur expérimenté. C'est un arbre souple qui ploie facilement et s'adapte sans difficulté. Il reste généreux en toutes circonstances. Ses branches reçoivent une grande quantité de neige et de glace durant l'hiver, ce qui lui permet de renforcer sa souplesse. Pour autant, son tronc est droit et totalement vertical. Se poser le dos congre un Sapin, c'est faire l'expérience de l'ascension. Car le tronc du Sapin est pareil à notre colonne vertébrale. Lorsque nous sommes voûtés, l'énergie vitale, le Khi ou la Kundalini ne peuvent circuler librement le long de notre colonne centrale. Lorsque nous sommes trop tendus ou trop détendus, l'énergie ne circule pas davantage. Le Sapin vient nous rappeler que la clé de notre réussite repose sur l'alignement de notre verticalité. Ce n'est que sur un axe vertical solide que nous pouvons déployer nos actions, nos valeurs, nos idées, nos projets. Enfin, le Sapin facilite la communication entre la terre et le ciel. Il nous rappelle que cette communication est naturelle. Ainsi, il facilite les liens entre la méditation et l'action, les rituels et les valeurs et donne à notre existence une dimension aussi terrienne que reliée aux étoles les plus élevées.
Signification renversée : Dans sa position renversée, le Sapin nous invite à être vigilants quant à la perte de notre énergie vitale. Nous manquons de connexion à la terre et risquons d'être déracinés et de perdre nos épines. Le Sapin renversé peut nous interroger sur une possible dispersion. Nous avons de grandes idées, de grands projets et souhaitons les partager, mais son équilibre entre l'axe vertical (le lien à nous) et l'axe horizontal (le lien à l'autre) mériterait d'être réajusté. Le Sapin renversé peut nous indiquer que nous avons tendance à en prendre trop sur nous. Nous supportons une surcharge. Nous avons du mal à poser nos limites. Cela peut créer un étouffement, une surcharge au niveau des bronches et des poumons. Le Sapin renversé nous invite à revenir à nous et ce qui nous tient à cœur. Il nous encourage aussi à conserver le plaisir comme moteur. Prendre du plaisir est encore la plus belle façon de rester comme le Sapin, rayonnant et lumineux à toute période de l'année.
Le Message du Sapin : Je suis le Sapin. Les enfants me reconnaissent parmi tous les arbres, car j'incarne Noël, les montagnes enneigées, les lumières féeriques. on me décore, on me pare de guirlandes, de boules et d'éclairages multicolores. J'incarne et je symbolise la célébration de la renaissance, le passage du solstice, la lumière au milieu de l'hiver, la paix au milieu du chaos, la certitude au milieu du doute. J'ai réussi à établir les ponts entre la terre et le ciel. Je reçois de mes racines les messages des gardiens d'en bas. Les guides et les anges me transmettent leurs messages et leur belle énergie depuis l'étoile de mon sommet. Je t'apparais et t'apparaîtrai toujours lorsque tu auras besoin de mon réconfort, de ma confiance et de ma foi. L'heure est venue de briser les chaînes de l'ignorance et de la peur. Je suis le messager, j'apporte la certitude des jours meilleurs, la lumière au milieu de la nuit, la parole de réconfort de celui qui parfois se remet trop en question. Regarde ma lumière, je pointe de tout mon corps vers le ciel étoilé. Ressens le parfum fort de ma sève et de ma résine sur tes bronches. Respire-moi de tous tes sens, car j'apporte la vie.
Le Rituel du Sapin : Concentrez-vous sur la présence du Sapin. Visualisez-le, connectez-vous à son parfum sucré. Sentez-vous enraciné et sentez sous la voûte plantaire vos racines ancrées. Visualisez au sommet de votre crâne un fil d'argent qui s'élève vers le ciel. Sentez-vous ainsi ancré dans votre verticalité. Ouvrez vos bras en croix. A chaque inspiration, ouvrez les bras le plus largement possible les paumes offertes. A chaque expiration, rapprochez vos deux paumes de votre cœur. Répétez ce mouvement simple vingt et une fois. Sentez à chaque mouvement que tout l'univers contribue à votre éveil et à votre épanouissement. Sentez votre poitrine et vos poumons inspirer tout le parfum du sapin. A chaque expiration, visualisez que vous purifiez vos poumons. Vous ressentez au fil de cette respiration simple de la joie, de la tendresse er de l'amour.
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Symbolisme celte :
Selon le site http://www.notretemps.com/ :
"Le sapin, symbole de renouveau : La tradition du sapin s’est répandue progressivement au XVe siècle chez les protestants d’Allemagne et de Scandinavie. Les catholiques, eux, représentaient déjà la Nativité par une crèche. Avec son feuillage toujours vert, le conifère marque le triomphe du soleil sur l’hiver. Ses rameaux protégeaient la maison de la foudre et le bétail, des maladies. Les premières traces de vente de sapins à Noël ont été retrouvées en 1521, à Sélestat en Alsace.
Il faudra attendre 1738 pour qu’il trône à Versailles, sous l’impulsion de la Polonaise Marie Leszczynska. À partir de 1870, les émigrés d’Alsace-Lorraine transmettent leur tradition aux Français et, après 1945, il est offert en gage de paix entre États. Dès 1960, il fait son entrée dans la plupart des foyers. En 2014, 5,7 millions de sapins naturels ont été achetés par les ménages.
D'après Didier Colin, auteur du Dictionnaire se symboles, des mythes et des légendes (Larousse Livre, 2000) :
"Dans l'esprit de nos ancêtres les Celtes et les Gaulois, cet arbre tenait un rôle quasi aussi important que le hêtre dont ils mettaient une bûche dans l'âtre, la nuit du solstice d'hiver, acte symbolique pour se protéger des foudres du ciel. Toutefois ils nommaient cette même nuit du 21 décembre "la nuit du sapin argenté". C'est la raison pour laquelle ils faisaient aussi souvent brûler une énorme bûche de sapin, voire même un sapin entier. Or ceux d'entre vous qui ont déjà vu un sapin brûler savent que les épines et la résine de cet arbre rendent sa combustion difficile et assez impressionnante.
Ainsi, en plus d'être associés aux notions d'immortalité et d'éternité, ces deux arbres furent récupérés pour fêter Noël : l'un étant présent dans nos assiettes, symboliquement s'entend, sous forme de bûche, l'autre jouant le rôle de l'arbre de Noël."
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Selon Terres Unsoeld, auteure de Chamanisme de la Lumière (Guy Trédaniel Éditeur, 2017), le Sapin est associé à :
Rite de passage : Naissance
Date de force : Solstice d'hiver
Étoile maîtresse : Véga.
Rite de passage : Naissance
Dans le Zodiaque des Arbres, si notre soleil, la lune ou notre date de Force est conjointe à 7° de Véga, alors nous avons choisi l'expérience de l'Initiation de la Naissance. C'est au moment où notre âme pénètre dans le corps que nous décidons ou refusons de naître. Cela se passe entre le moment de l'incarnation (au 5e mois de la grossesse) et la Naissance.
L'Arbre Maître associé à la Naissance est le Sapin. Il offre la douceur, la souplesse et de l'amour pour notre voyage. Il nous rappelle que la création est un acte divin. Du néant jaillit la Lumière et de la Lumière, vient la vie.
L’Étoile maîtresse est Véga qui brille comme notre boussole, elle nous maintient dans l'axe direct et vrai de notre chemin. La date de Force est le Solstice d'Hiver, quand le soleil se tient immobile dans le ciel, avant de recommencer sa course vers l'été.
Posez-vous la question : "Ai-je choisi de naître ?"
La Naissance est une initiation puissante. Il faut un grand acte de volonté pour venir au monde. Ce processus est un miracle. Le bébé est âgé de cinq mois dans le ventre de notre mère, quand son âme commence le processus d'incarnation. Guidée par le feu divin, elle entre dans le champ d'énergie de la mère. Notre présence éthérique active tous ses corps subtils. Nous scannons tous ses niveaux de conscience : causal (l'âme), mental, astral (émotionnel), énergétique (éthérique) et physique. Nous connaissons son histoire. Nous sentons ce que nous avons choisi. C'est l'Initiation du Sapin. On nous offre l'occasion de voir le présent de notre Naissance.
Nous réalisons que nous ne sommes pas seuls. Nous avons des aides de tous les côtés. Un cercle d'anges et de fées veille sur nous. Un cercle de Lumière bleu ciel nous protège. L'énergie-Lumière du Sapin nous renforce. Elle aide la mère et l'enfant à s'harmoniser pour travailler ensemble dans l'acte sacré de la Naissance.
Nous réalisons que nous sommes aimés et que nous avons été choisis. Nous avons été choisis par le Feu Divin de notre âme avant de naître. Notre âme choisit d'atterrir dans le ventre de notre mère. Nous choisissons d'être nés dans le jardin sacré de la Mère Terre. Nous avons choisi de naître, bien, que la plupart d'entre nous ne s'en souviennent pas.
"Je me souviens ne pas vouloir naître. J'ai tenu aussi longtemps que possible. Ils ont dû faire une césarienne, car ils pensaient que le processus était trop lent. Toute ma vie, j'ai pensé que je ne voulais pas vivre.
Quand je suis arrivée à Tama-Do, je me suis aperçue que ce n'était pas le problème. Je voulais naître naturellement, quand c'était le moment ! Ce fut la césarienne qui me dérangea, pas la vie. J'ai toujours voulu vivre. Mais je voulais le faire à mes conditions.
Revisiter ma naissance avec le Sapin m'a aidée à lâcher prise.
J'ai compris que ma mère 'avait tout simplement pas un canal assez large pour permettre mon passage. Je peux voir maintenant que chacun a fait la meilleure chose possible. La césarienne m'a sauvé la vie."
Betsy Jane.
"Je suis née prématurée. J'ai été dans un incubateur pendant deux mois et demi.
Il n'y avait pas de contact physique avec ma mère ou quelqu'un d'autre.
C'était juste moi, la Lumière dorée et un amour inconditionnel indescriptible qui m'enveloppait tout autour.
A travers le voyage Chamanique de la Lumière, on m'a rappelé que j'étais censée passer plus de temps avec le monde Invisible, avant d'être née.
Cela m'a aidée des années plus tard à voir qu'il n'y avait vraiment pas de séparation, ce qui souvent m'a mise au défi sur le plan physique.
Je vis dans les deux mondes." Larissa.
La Date de Force : Le Solstice d'Hiver
Le Solstice d'Hiver marque la nuit la plus longue de l'année. C'est le moment le plus calme, où le temps se fige et le soleil reste à la même place pendant trois jours. Nous prenons ce moment pour "voir à travers le voile"... saisir notre vérité. C'est le temps de raviver notre feu spirituel. Comme l'acte de création - du néant - vient la Lumière.
De toutes les célébrations, le Solstice d'hiver avec l'entrée du soleil en Capricorne, est le moment de croire et de célébrer la lumière. Les peuples du Nord appellent ce moment Alban Arthan, la Lumière d'Arthur. C'est le moment où nous voyageons au plus profond de nos racines - vers la terre des ancêtres - pour retrouver le Saint-Graal dans notre âme. Si le Solstice d'hiver est notre date de Force , dans son silence, nos cœurs se remplissent de poésie, d'harmonie et de musique).
L’Étoile Maîtresse : Véga
Dans l'Académie Tama-Do, nous relions le Solstice d'hiver à Véga, l'étoile du Nord. Véga nous guide - en devenant plus lumineuse que le soleil lui-même. Nous continuons notre chemin vers la Lumière. Et même à travers le royaume de la nuit au milieu de l'hiver, notre feu spirituel se lève - pour éclairer le chemin. Notre âme renaît - incarnée dans l'espace ciel et terre. Nous nous ouvrons à la pulsation de la nouvelle vie qui commence un jour après la plus longue nuit de l'année. Nos rêves suivent le soleil qui commence son voyage de retour vers l'horizon au nord de l'été.
Purification d'Hiver
Rassemblez des branches de sapin qui ont été offertes après une tempête trois jours avant la pleine lune précédant le Solstice d'hiver. (Merci de ne pas les couper, ramassez ce que vous trouvez sur le sol.)
Placez-les partout dans votre maison.
Décorez-les avec des symboles de Lumière.
Durant la pleine lune suivant le Solstice d'hiver,
Faites brûler quelques petites branches séchées.
Le filet de fumée qui monte de la flamme est l'âme du Sapin, offrant de purifier votre chemin vers la nouvelle année. Rendez grâce à son esprit généreux.
Sentez comme l'obscurité de l'hiver se transforme en Lumière.
[Correspondances] : Naissance - Corps physique - Solstice d'hiver - Véga - Nord.
[...]
Par sa douceur, le sapin favorise la respiration et la circulation. Marchez près d'un sapin et sentez ses branches vous tendre la main. Sa légèreté d'être, nous élève vers le ciel. Le sapin aime les gens. C'est un Arbre de Lumière. Nous l'utilisons comme bûche de Noël. on le laissait brûler pendant les jours les plus sombres de l'année. Il purifie l'ancien et apporte le nouveau. Son bois tendre est utilisé pour les planchers des salles de danse, donnant des ressorts aux jambes des danseurs.
Le sapin a la force intérieure d'atteindre la Lumière. Sa verticalité nous soulève. Tenez-vous dans le Cercle sacré d'un bosquet de sapins et sentez la Lumière dorée émanant des étoiles. Sentez l'amour du Divin envers ses enfants.
Les elfes et les fées aiment le sapin. Son énergie est fluide et flexible, douce et affectueuse. Son aura donne le souffle aux nouvelles pensées et stimule la créativité. Nous nous sentons en vie ! Nous pouvons respirer ! Nous spiralons vers la Lumière.
Interprétation : La carte du Sapin nous rappelle de croire au miracle de notre naissance. Il est temps de renouer avec le cercle des anges et des fées qui ont veillé sur nous depuis que nous sommes nés. Il est temps de recommencer. Nous nous ouvrons à l'amour du Sapin, sachant que nous avons été choisis et aimés dans la Lumière du Divin.
Mythologie et Magie : A travers l'Europe du Nord, le sapin a toujours été l'arbre de la naissance. Les arbres à feuilles persistantes représentaient l'immortalité de l'âme. Le sapin protégeait le début de la vie. A la naissance, la mère et l'enfant étaient bénis avec une bougie de sapin, portée trois fois autour du lit - invoquant les anges et les fées de "veiller sur eux, 3 x 3 x 3". Pour Artémis, déesse de la lune et patronne de l'enfance, le sapin était sacré. C’était la déesse de la nature et de l'accouchement, et elle protégeait les filles jusqu'à leur mariage.
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Symbolisme onirique :
Selon Georges Romey, auteur du Dictionnaire de la Symbolique, le vocabulaire fondamental des rêves, Tome 1 : couleurs, minéraux, métaux, végétaux, animaux (Albin Michel, 1995),
Au terme de l'exploration des rêves dans lesquels apparaît le sapin, le chercheur se sent d'abord perplexe. Il est rare qu'au fil des investigations, les principaux axes de l'interprétation ne se dégagent pas progressivement aux yeux de l'observateur. En ce qui concerne le sapin nous avons dû augmenter de moitié le nombre de rêves constituant le champ d'analyse habituel sans que soit dissipée une sorte de sombre mystère entourant le symbole. Sombre est d'ailleurs, avec le mot noir, l'un des termes qui reviennent le plus fréquemment dans l'environnement onirique du sapin.
Pourquoi cette image, qui prend la seconde place parmi les arbres cités dans le rêve éveillé, qui surgit si spontanément dans les dessins d'enfants, tellement disponible aussi sous le regard des patients européens, pourquoi cette image s'entoure-t-elle d'un brouillard qui tend à la dérober aux efforts d'élucidation ? Pourquoi les auteurs qui font référence dans le domaine symbolique gardent-ils - exception faite de Gaston Bachelard - un silence presque total à propos du sapin ?
Les corrélations relevées autour du symbole ne manquent ni de force ni d'originalité. Elles sont, en outre, assez nombreuses mais déconcertantes et ce n'est qu'au terme d'une réflexion soutenue que l'on peut espérer atteindre une interprétation de synthèse. Si le palmier, arbre du sud, étend la touffe indolente de ses palmes sous le soleil de la plage ou celui du désert, le sapin, qui le suit à courte distance dans le classement par fréquence d'apparition, dresse sa verticalité offensive, triangulaire, dans les régions du nord. Le sapin du rêve est lié à la neige mais aussi, nous le montrerons, la terre labourée.Un sapin imaginaire vit avant tut par la cime. Si l'arbre est un symbole du psychisme ascensionnel, une image vivante de la verticalité ascendante, le sapin est le plus vertical de tous les arbres. Le patient bien installé dans la dynamique de son rêve accueille aisément l'image d'un sapin infini, d'un sapin dont la cime est en éternelle croissance.
Une vision de palmier incite à creuser le sable, à descendre dans les eaux maternelles. L'image du sapin paraît inviter à la conquête du ciel. En première analyse, le sapin semble l'illustration parfaite de la pensée de Gaston Bachelard sur les vertus du mouvement ascendant.
Le sapin appelle des associations maussades. Le froid, le loup, la boue, la saleté, le noir, le sombre environnent le sapin imaginaire. Certains scénarios se développent en totalité autour d'un sapin solitaire. Le rêve, alors, déploie toutes ses images par rapport à l'arbre sans que, pour autant, le sens en soit clairement accessible. d'autres séances évoquent une forêt de sapins, généralement sombre et dense. Les corrélations les plus spécifiques - voire les plus étranges - se retrouvent dans un cas comme dans l'autre.
Deux patientes vont fournir des séquences qui éclairent l'un des aspects les plus inattendus du symbole. marie-Thérèse, après un long silence, commence son rêve par ces mots : "C'est un sapin... très symétrique, très droit... il est sombre... il est vraiment comme un dessin d'enfant, pointu, les traits bien droits..." Le rêve se déroule ensuite pendant plus de vingt-cinq minutes sur des thèmes variés que rien ne paraît rattacher à l'image du sapin. Pourtant c'est sur cet arbre que le scénario va revenir, avec insistance, et s'achever. Le lecteur doit ici se rappeler que lorsqu'un scénario s'achève sur des symboles présentant des équivalences de sens avec les images par lesquelles il a commencé, cela signifie une action majeure de la dynamique d'évolution.
Marie-Thérèse vient de garder le silence de façon prolongée et reprend soudain la parole : "... Là, ça pourrait être une forêt de sapins, mais sous la neige quoi ! Et vue de loin. C'est bizarre... avec des branches couvertes de neige, ça prend la forme d'un troupeau de moutons... comme des dos de moutons... un troupeau de moutons en mouvement hein !... Et là, j'ai l'impression de les voir d'un peu plus près et c'est curieux : alors que d'habitude les moutons vont tous dans le même sens, là chacun cherche sa direction... et, maintenant, je vois un croisement, un point central avec quatre routes... non ! Pas de routes mais quatre directions... c'est pas une croix droite, mais le signe de la multiplication, de biais quoi, un X... et ça s'inscrit maintenant dans un cercle en mouvement, un chapelet de petits cailloux qui tournent autour, à toute vitesse..."
Avant d'aborder l'explication de pareilles images, il est préférable d'en rapprocher celles que propose la cinquième séance de Lise : "... J'ai vu quelque chose qui ressemblait à une pousse d'aubépine, mais, après, c'est devenu un sapin... j'ai l'impression qu'il y a seulement quatre branches, disposées comme une croix, ou plutôt un X... en fait ça se présente comme les ailes d'un moulin... et, maintenant, ce tronc s'allonge, s'allonge et les branches sont poussées vers le haut. Et vers le bas, aux deux tiers du tronc, il y a une sorte de couronne, très large, qui ceinture le tronc... comme une couronne de lierre avec plein de petites baies... y a du jaune, du rouge sur cette couronne-là... avec un gros bourrelet de mousse... le tronc s'est encore allongé... [...] Le sommet de l'arbre, où est la croix, s'étire encore... s'étire vers le haut... y a maintenant une étoile argentée qui se met au sommet... impression que ça s'étire... que ça s'étire indéfiniment... en fait ça devient une coupole de mosquée avec, au-dessus encore, une flèche... ah ! Je ne trouve pas le mot... cette flèche qui sert à indiquer la direction des vents... Ah ! Oui, la girouette... le mot girouette m'angoisse, enfin, m'inquiète... je crois que je m'arrête là..."
La ressemblance de ces extraits est d'autant plus troublante que Marie-Thérèse et Lise ne sont pas les seules à rassembler des images similaires. Quelle signification accorder à cet X associé au sapin ? Certes, le sapin type est probablement la variété communément appelée « sapin de croix », qui fournit la quasi-totalité des arbres de Noël et dont les branches, opposées deux à deux, se répartissent dans quatre directions horizontales de l'espace. On serait enclin, à partir de cette observation, à se laisser renvoyer à l'arbre-croix de la symbolique mystique. Un arbre qui s'étire indéfiniment vers le ciel et dont le sommet se pare d'une étoile peut-il se soustraire intégralement à cette interprétation ? Cependant, dans les exemples produits, comme dans plusieurs autres, il ne s'agit pas de la croix mais bien d'un X, Marie-Thérèse le désigne comme le signe de la multiplication, ce qui est un moyen de se faire comprendre, mais cette croix biaisée est en fait un signe de contradiction, de négation, de barrage, d'interdit. Il est symptomatique que parmi les termes associés au sapin, on observe les mots barrage, barrière, mur.
C'est le moment de se souvenir que l'arbre – nous le développons dans l’article consacré au palmier – symbolise la puissance de vie féminine et plus particulièrement dans sa forme maternelle. Dans les deux rêves d'où sont extraites les séquences qui précèdent, nombre de symboles représentant la mère viennent confirmer cette proposition. Toutes les patientes, en particulier, qui produisent ce type d'images, sont au début d'un cheminement qui aboutira à la réhabilitation de l'image maternelle. Dès lors, le côté sombre du sapin, son port rigide, le froid qui l'entoure, la boue dans laquelle patauge fréquemment le patient engagé dans la sapinière du rêve apparaissent comme autant d'indices d'une situation névrotique reliée à l'altération de la relation à l'image de la mère. Un sapin qui s'étire vers le ciel éloigne la pensée de son enracinement. De telles images, loin de témoigner d'un aspiration à la spiritualité, pourraient bien dénoncer le refus de reconnaître le sentiment de souffrance engendré par une relation conflictuelle à la racine maternelle.
Si ce sont les patientes qui déploient autour du sapin les structures oniriques les plus complexes, bien des inspirations masculines témoignent aussi, par des images simples et précises, de l'association du sapin et de la mère. Hervé commence ainsi son cinquième scénario : « Je vois un sapin qui se découpe sur un disque de lune... en superposition, il y a un masque, un visage superposé à l'image du sapin... ça me rappelle une photo que j'avais faite de ma mère, comme ça, en double impression... » Médecin, très attaché à la rationalité, Hervé, en ce début de cure, est aussi peu instruit que possible du sens des symboles. Cette expression spontanée n'en est que plus probante.
Une analyse qui s'orienterait à priori sur la verticalité n'aurait pas trop de peine à découvrir quelques images de sapins croissant en des altitudes rocheuses. Mais, en s'arrêtant sur de tels clichés, elle trahirait l'objectivité d'une recherche appuyée sur les faits. Ceux-ci proposent une abondance de sapins associés, non au sol pierreux de la montagne, mais bien au contraire à la terre riche, labourée, féconde. Le sillon fraîchement creusé, l'herbe grasse, sont bien plus fréquents dans ces rêves que l'aridité rocailleuse. Nous sommes tentés de traduire ces associations comme l'un des signes de la disposition du patient à vivre une relation nouvelle, positive, à l'image maternelle.
Un très beau rêve de Martine, trop long pour être rapporté, commence sur des visions de sapin très semblables à celles de Marie-Thérèse et de Lise. Près du sapin, Marine rencontre un vieux sage, un ermite, qui lui propose son aide. Au pied de l'arbre, la terre a été labourée et les sillons dessinent une étoile. Le vieux sage se place au centre de l'étoile, prend dans ses mains les pieds de Marine et la fait tourner autour de lui, très vite « comme si j'étais l'aiguille d'une boussole, cela doit me permettre de trouver la bonne direction ». Lorsque le vieux sage est apparu, Marine était enfermée dans une cage « comme une bête, sale, vêtue d'une vieille toile ». La bonne direction est indiquée par des hiéroglyphes tracés sur le sol et qui représentent une étoile protégée par deux croissants de lune, horizontaux, l'un s'offrant comme un berceau et l'autre comme le toit de ce berceau. Alors Marine se retrouve propre et purifiée. Lorsqu'on sait l'intensité du rôle d'un symbole tel que la lune en croissant dans la dynamique de rétablissement d'une relation positive à l'image maternelle, lorsqu'on voit des images équivalentes se multiplier dans les rêves où s'élève le sapin, on ne peut plus douter de l'intérêt de porter sur cet axe l'effort d'élucidation. D'autres visions de sapins dont la cime se balance, sur fond de lune et d'étoiles, avec régularité « comme un métronome » viennent renforcer, par la notion du rythmique, la résonance maternelle du symbole.
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Lorsque le sapin paraît dans le rêve, il y a donc lieu de soupçonner un état de profonde insatisfaction du rêveur dans son rapport à l'image maternelle. Les justifications intellectuelles déployées pour nier la souffrance ne font qu'alimenter le sentiment de culpabilité qui découle de cette situation. Les signes d'élévation spirituelle – même s'ils traduisent une recherche sincère – ne sont le plus souvent que des masques posés sur une erreur d'attitude. Une cime trop haute trahit la crainte de regarder l'état des racines, de reconnaître le besoin de vivre en contact avec la terre mère. L'étoile du devenir n'est pas toujours dan le ciel. C'est pourquoi Marine la trouve tracée par les sillons.
Lise s'inquiète avec raison, à la fin de son rêve, devant l'image de la girouette, « cette flèche qui indique la direction ». Un sapin a vocation d'indicateur. Comme la girouette au sommet du clocher de l'église il place le rêveur devant une énigme directionnelle. Il montre le chemin du ciel, la route de l'imprévisible devenir, mais, dans le même temps, il manifeste des signes d'interdiction. L'analyste sagace aidera le patient à comprendre qu'il n'y a pas d'authentique avancée spirituelle tant que ne sont pas effacées les altérations du rapport à l’image maternelle par la dissipation de la situation œdipienne. C'est le message du sapin.
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Croyances populaires :
D'après Véronique Barrau, auteure de Plantes porte-bonheur (Éditions Plume de carotte, 2012),
"Les Roumains plaçaient dans la cour des fiancées un sapin de la taille du futur marié puis chantaient et dansaient gaiement autour de l'arbre pour éloigner tout malheur sur le couple. [... On peut en effet considérer] le sapin pectiné (Abies alba) comme l'arbre à bonheur.
Un ange sur le toit : Sa verdeur persistante au milieu de l'hiver symbolise la vie éternelle. S'appuyant sur cette image bénéfique, les Chinois couchaient leurs enfants dans des berceaux en bois de sapin pour leur accorder une bonne santé. En Savoie, l'arbre passait pour protéger de la foudre et des sorciers. Les bergers et les bûcherons taillaient une partie d'un sapin à cinq rameaux en forme de main et l’accrochaient au-dessus de la porte de leur logis. Une coutume allemande vise encore aujourd'hui à fixer sur le toit des maisons nouvellement construites une couronne de verdure ou un sapin pour porter chance aux habitants. Jadis, le maître charpentier opérait ce rituel en attachant à la charpente un sapin décoré de rubans. Il disséminait quelques pièces et fruits secs sur le faite afin de favoriser l'abondance et la prospérité sur la maison puis souhaitait tout le bonheur du monde aux propriétaires en buvant à leur santé. Il jetait enfin son verre sur le sol ou dans le tas de fumier aussi délicatement que possible. Car si le récipient restait intact, les vœux exprimés en faveur des nouveaux propriétaires avaient toutes les chances de se réaliser.
C'est Noël et comme chaque année... Initialement décoré de pommes rouges et de bougies, le sapin symbolisait le renouveau, l'abondance et la lumière. Véritable porte-bonheur pour les Allemands, l'arbre placé dans la maison écartait la foudre tandis que les vêtements battus avec ses branches étaient immunisés contre les maladies. Avant de vous gaver de galette des rois, pensez à enlever votre sapin avant l’Épiphanie, sans quoi, un décès pourrait advenir au sein de votre famille.
Température augurale : Les Russes et Ukrainiens croyaient en l'existence du bannik, un lutin hargneux demeurant dans l'espace consacré au bain. Pour calmer son caractère lunatique et éviter qu'il ne sème des maladies dans ces lieux en créant des courants d'air froid, on lui offrait des branches de sapin, une savonnette et de l'eau. La veille de Noël, la gent féminine slave, munie de rameaux de l'arbre, se rendait dans ces cabines de bain. Si un souffle chaud caressait leur visage, l'année suivante leur serait favorable, mais si l'effleurement était froid, l'infortune serait leur pain quotidien...
Comme un parfum d'amour : Est-ce l'odeur agréablement parfumée ou la douceur de ses aiguilles qui inspirèrent certains peuples de l'Est à associer le sapin à l'amour ? Toujours est-il qu'en Allemagne, les nouveaux époux à la tête du cortège nuptial tenaient une branche de sapin ornée de bougies et qu'en certains endroits du pays, le jeune arbre était planté devant la demeure où se déroulait le mariage en signe de fécondité. On retrouve une tradition analogue en France où des arcs de triomphe façonnés avec des sapins étaient placés devant la porte des nouveaux époux."
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Mythes et légendes :
D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),
SAPIN. — Le sapin, dans les traditions populaires des peuples du Nord, joue à peu près le même rôle anthropogonique que le pin (cf.) dans les traditions populaires des peuples du Sud, et un rôle analogue à celui du bouleau (cf.) et à celui du chêne (cf.). C’est sur le sommet d’un sapin que, dans un conte populaire anglais, « la Bataille des oiseaux » (Voir Brueyre, Contes populaires de la Grande-Bretagne), le jeune prince va, par ordre du géant, chercher les œufs de la pie ; sa fiancée, « qui sent la respiration de son père lui brûler le dos » (l’aurore suivie par le soleil), avec ses doigts a marqué les degrés de l’échelle sur le tronc du sapin, et, grâce à cette échelle, le jeune prince peut atteindre à la fois les œufs de la pie et sa fiancée ; il reconnaît celle-ci au doigt qui lui manque : c’est ainsi que l’aurore est sans pied, que la reine Berthe a un pied défectueux, et d’autres héroïnes légendaires la main coupée ou une main d’or.
Dans l’Allemagne du Nord, les jeunes mariés portent souvent à la main des branches de sapin avec des bougies allumées, qui nous font ressouvenir des faces romaines. A Weimar et en Courlande, on plante des sapins devant la maison où la noce a lieu. En Silésie, on en suspend derrière la porte des étables, pour que les vaches prospèrent. Dans la Silésie autrichienne, c’est sur le sapin que l’on coupe le bâton symbolique du premier mai. Dans le Harz, la veille de la Saint-Jean, on orne de fleurs et d’œufs colorés des sapins ou plutôt des branches de sapin qu’on fiche en terre, et on danse autour de ces arbres en chantant, pour faire allusion au soleil qui tourne dans le solstice d’été : « Die Jungfer hat sich umgedreht. » En Suède, en Danemark, en Russie, en maints endroits de l’Allemagne, on emploie le sapin pour l’arbre de Noël. De même que dans plusieurs pays de l’Allemagne, la nuit de Noël, on frappe les arbres pour qu’ils portent des fruits, de même à Hildesheim, en Hanovre, dans la Fastnacht, on demande des cadeaux aux femmes en les frappant avec des branches de sapin ou de romarin : un moyen, sans doute, de leur souhaiter des enfants. Tilemann, Commentatio hist. moralis, fait allusion à cet usage superstitieux et barbare : « Nec minus poena aliqua arbitraria severiori animadverti posse videtur in eos, qui uti in locis aliquibus praesertim inferioris Germaniae vulgo ac plebeiis mos est, tempore quadragesimali im, Fastnacht, mulieres sibi obviam factas inhonesto joco, interdum denudatis posterioribus, virgis vel etiam herba aliqua pungente feriunt, cum non solum foeminis, quae saepius hunc jocum male ferunt, haud levem iniuriam infligant, sed scandalum etiam praebeant vel ipsa turpi hac detectione, vel quod sanctissimas Christi plagas, eo tempore, ob peccata nostra toleratas, deludere ac in jocum convertere ab aliis videri possint. » On traite par là évidemment comme sorcière la saison froide et sombre, la nuit, de laquelle, en la frappant, on fait jaillir la lumière et la vie ; on blesse la nature, pour qu’elle devienne féconde.
Dans l’Allemagne du Nord, lorsqu’on mène pour la première fois les vaches au pâturage, souvent la dernière vache « die bunte Kuh » est ornée de petites branches de sapin ; c’est sans doute une manière de leur souhaiter un pâturage propice à leur fécondité. Le sapin, dans le Nord, est le roi de la forêt ; c’est pourquoi, en Suisse et dans le Tyrol, on représente le génie de la forêt, avec un sapin déraciné dans la main. Ce génie habite de préférence les sapins et surtout les vieux sapins ; lorsqu’on coupe un de ces arbres, il en souffre, et il supplie de le laisser vivre. On respecte tout particulièrement les vieux sapins, ainsi que les vieux chênes et les vieux bouleaux, lorsqu’ils sont isolés. Voici ce que Mlle Tatiana Lwoff m’écrivait, il y a quelques années, de Tarszok, dans le gouvernement de Twer, en Russie : « Un sapin immense, isolé, qui a essuyé plusieurs coups de foudre, qui doit avoir vécu plusieurs centaines d’années, à en juger par le tronc dépouillé d’écorce et les branches privées de feuillage, vient de tomber à la suite d’un coup de vent. Les paysans du voisinage ont vendu cet immense tronc et n’ont pas voulu profiter de cet argent ; ils l’ont donné à une église. » (Pour de plus amples informations sur les croyances nordiques qui se rapportent au sapin, cf. Mannhardt, Baumkultus der Germanen.)
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Selon Véronique Barrau et Richard Ely, auteurs de Les Plantes des fées (Éditions Plume de carotte, 2014), le sapin pectiné (abies alba) promet un "Noël féerique".
Comment couper un sapin ? Jadis, quand approchait Noël, chaque montagnard parcourait les forêts afin de trouver un beau sapin sous lequel déposer les cadeaux de fin d'année. Soucieuses de la survie de l'arbre, certaines personnes préféraient le déraciner plutôt que de le scier. Ainsi pouvaient-elle lui donner une seconde chance en le replantant dans le jardin après les fêtes. Mais les Russes et les Allemands coupaient prudemment le tronc des sapins à leur base. Car selon une tradition commune à ces deux pays, la souche d'un tel arbre pouvait être habitée par un elfe. Extirper de terre les racines revenait à blesser l'être féerique et à partager sa souffrance et une grande faiblesse. On raconte qu'une paysanne, ignorant ce principe, commit l'irréparable. Après plusieurs jours de tourments, elle périt au même instant que l'elfe.
Le thème de l'arbre arraché à la terre est commun aux superstitions de plusieurs pays. Les folklores suisse et tyrolien représentent par exemple le Génie de la forêt avec un sapin déraciné dans sa main. Cette créature passe pour vivre dans les arbres de cette espèce, de préférence les plus âgés. Lorsqu'un bûcheron attaque un tronc "habité", elle gémit et supplie l'homme de laisser sa demeure debout.
Des aiguilles pour défense : Il est des êtres de féerie qui, par leurs taquineries et agaceries perpétuelles, peuvent briser la quiétude d'une maisonnée. Pour chasser ces importuns, les Russes leur demandaient de comptabiliser le nombre exact d'aiguilles de sapin accumulées en un grand tas pour l'occasion. cette tâche longue et fastidieuse décourageait les êtres qui se promettaient de ne jamais remettre les pieds dans cette demeure où l'on manquait cruellement de sens de l'humour... Les Slaves doivent aussi essayer de composer avec le Bannik, un lutin passant tout son temps dans les maisons de bains. Manquer de respect à cet être revient, entre autres calamités, à s'exposer à des maladies provoquées par des courants d'air. Pour amadouer cet esprit, les humains lui offrent du savon accompagné de branches de sapin.
En France, le folkloriste Paul Sébillot révèle une méthode utilisée jadis en Savoie pour repousser les êtres malfaisants. La première étape est la plus difficile : trouver une branche de sapin dont la forme terminale évoque une main aux doigts écartés. Il faut alors enlever son écorce puis la tailler de manière à peaufiner la ressemblance. L'oeuvre peut alors être fixée au toit de la maison ou au-dessus de la porte, les "doigts" tendus vers le ciel pour arrêter les mauvais esprits. Force est de reconnaître que l'on se donnait bien moins de mal pour protéger le bétail. une simple branche de sapin était accrochée à la porte des granges mais les paysans garantissaient son efficacité.
En Alsace, le lac de Bölchen regorge d'étranges créatures telles qu'une gigantesque truite portant sur son dos un sapin. dans l'Ain et le Jura, les Sauvageons sont des esprits des bois qui se jettent d'une branche à l'autre pour perturber les bûcherons sciant les sapins.
Esprit perspicace : Il y a bien longtemps, un alchimiste taoïste légendaire du nom de Lu Tong-pin se rendit près d'un temple sans que nul homme rencontré sur son chemin le reconnaisse. Alors qu'il en éprouvait quelque chagrin, il vit un petit vieillard descendre de la cime d'un sapin voisin pour s'approcher de lui. La créature se présenta comme le génie de l'arbre et exprima son honneur à accueillir un personnage si important. Rasséréné, l'homme composa un quatrain pour lui témoigner sa reconnaissance.
Toujours accepter les cadeaux des fées : Dans une forêt de la Haute-Saône située au sommet du massif de la Planche-des-Belles-Filles, vivent douze fées fort aimables qui avaient jadis l'habitude d'assister aux veillées des villageois. quand les douze coups de minuit sonnaient au clocher de l'église, ces dames prenaient congé de leurs hôtes et rejoignaient les bois, refusant d'être accompagnées.
Or, une nuit, un jeune homme rongé par la curiosité suivit ces mystérieuses femmes pour découvrir leur demeure. ce qu'il vit le laissa pantois. Après s'être mutuellement souhaité une bonne nuit, chacune se glissant dans un tronc de sapin pour y dormir. Mais il n'est jamais prudent d'outrepasser la volonté des fées. Trois jours plus tard, lorsque le fureteur grimpa sur la cime d'un autre sapin pour y récolter de la poix, il fit une chute fatale...
A l'opposé et comme en témoigne l'histoire suivante, toute personne ayant un cœur pur et simple n'a rien à craindre de ces enchanteresses. Avisant un jour le cortège d'une noce, les douze fées firent don de rameaux de sapin à la mariée ainsi qu'à ses demoiselles d'honneur. Ces dernières regardèrent avec dédain les branchages avant de les jeter à terre. Seule l'épousée, touchée par la présence de ces créatures à son mariage, garda son cadeau. Le lendemain matin, quelle ne fut pas sa surprise de constater que celui-ci était devenu d'or. Apprenant cette transformation, ces compagnes revinrent sur leurs pas de la veille mais aucune ne put retrouver les fameuses branches abandonnées....
Observez bien la ramure des sapins durant les quatre semaines précédant le 25 décembre, vous aurez peut-être la chance de voir des branches en or ! Ces anomalies bienvenues apparaissent lorsque les fées de Noël, spécialisées dans la distribution des cadeaux, frôlent en plein vol la ramure des arbres. Une maladresse qui fait bien des heureux !
Illusion et confusion : C'est en Scandinavie, au cœur de la nature sauvage, que vivent les trolls, une race de géants primitifs. L'illustrateur norvégien Theodor Kittelsen a souvent représenté ces personnages de légende auxquels il était attaché. Celui qui nous intéresse plus particulièrement ici est le troll des montagnes dont le corps est recouvert d'une forêt d'épicéas, donnant l'illusion d'une colline boisée. On associe communément l'épicéa au sapin alors qu'il s'agit d'une espèce différente.
Des invités de fin d'année : A chaque Noël, les Suédois placent des représentations de lutins au pied de leur sapin ou les accrochent aux branches pour le décorer. ces petits bonhommes représentent les Tomtes, des êtres bénéfiques qui vivent sous la maison. Ils sont chargés de veiller sur les hommes et le bétail, et apportent les cadeaux de Noël.
Les sapins isolés passent pour être habités par des êtres féeriques. Voilà pourquoi ils sont particulièrement respectés. Les récoltes généreuses de morilles sont peut-être un de leurs cadeaux."
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Dans Arbres filles et garçons fleurs, Métamorphoses érotiques dans les mythes grecs (Éditions du Seuil, février 2017) de Françoise Frontisi-Ducroux, on peut lire que :
"Platanos et Elaté, qu'un deuil infini pour leurs frères, les Aloades, enracine en sapin et platane, à l'instar des sœurs-peupliers de Phaéton" font partie des héroïnes de la mythologie grecques qui se transforment en arbres.
Paul Berret, dans Sous le signe des Dauphins, Contes et légendes du Dauphiné (Éditions des Régionalismes, 2008/2010) fait part de son admiration pour cet arbre montagnard :
"Je ne me suis jamais assis à l'ombre des hautes futaies de nos altitudes alpestres sans éprouver un sentiment de quiétude et de religiosité. Dans l'air paisible des cimes, ces sapins majestueux, forts de la puissante sève qui les gonfle, de cet or résineux qui conserve et guérit, communiquent à l'âme quelque chose de leur certitude et de leur sérénité.
L'on comprend que jadis des hommes qu'avaient meurtris les aventures d'une vie tumultueuse soient venus chercher dans ces forêts l'oubli du passé et l'apaisement de leurs souffrances morales. Que de Chartreuses se sont bâties dans ces lointains au cœur des sapinières et des hêtraies géantes de la montagne ! Que de fois ces arbres millénaires ont vu passer à leur pied les robes de bure blanche des Chartreux ou des Chartreuses priant Dieu dans le silence.
Et dans un autre conte, il en montre un autre aspect : "Il y a là [région qui s'étend dans la Drôme de Puy-Saint-Martin à Montségur] un plateau tragique, insoupçonné de ceux qui, le long du Rhône, cheminent sur les routes claires des rives ensoleillées, invisible pour ceux qui à l'ouest, s'attardent aux délices de fraîcheur du Saou ou du Diois ; plateau désolé où le chemin se prolonge à travers des bois de sapins épineux et rêches, des sapins rétractés, tordus en tous sens par le mistral, arbres minuscules aux formes étranges et fantastiques, pareils à autant de nains sournois et laids postés sur le bord de la route pour jeter maléfice au passant. Ça et là, dans cette forêt de gnomes, apparaissent des villages abandonnés, clochers sans cloches aux abat-sons démantelés où s'engouffre en sifflant la bise, maisons écroulées ou pans de murs encore debout laissant voir le vide des fenêtres excavées comme des orbites de spectre."
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Littérature :
Dans Claudine à l'école (1900), Colette évoque les bois de sapins :
Et les sapinières ! Peu profondes, elles, et peu mystérieuses, je les aime pour leur odeur, pour les bruyères roses et violettes qui poussent dessous, et pour leur chant sous le vent. Avant d’y arriver, on traverse des futaies serrées, et tout d’un coup, on a la surprise délicieuse de déboucher au bord d’un étang, un étang lisse et profond, enclos de tous côtés par les bois, si loin de toutes choses ! Les sapins poussent dans une espèce d’île, au milieu ; il faut passer bravement à cheval sur un tronc déraciné qui rejoint les deux rives. Sous les sapins, on allume du feu, même en en été, parce que c’est défendu ; on y cuit n’importe quoi, une pomme, une poire, une pomme de terre volée dans un champ, du pain bis faute d’autre chose ; ça sent la fumée amère et la résine, c’est abominable, c’est exquis.
J’ai vécu dans ces bois dix années de vagabondages éperdus, de conquêtes et de découvertes ; le jour où il me faudra les quitter j’aurai un gros chagrin.
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Les sapins
Les sapins en bonnets pointus De longues robes revêtus Comme des astrologues Saluent leurs frères abattus Les bateaux qui sur le Rhin voguent
Dans les sept arts endoctrinés Par les vieux sapins leurs aînés Qui sont de grands poètes Ils se savent prédestinés
A briller plus que des planètes A briller doucement changés En étoiles et enneigés Aux Noëls bienheureuses Fêtes des sapins ensongés Aux longues branches langoureuses
Les sapins beaux musiciens Chantent des noëls anciens Au vent des soirs d' automne Ou bien graves magiciens Incantent le ciel quand il tonne
Des rangées de blancs chérubins Remplacent l'hiver les sapins Et balancent leurs ailes L' été ce sont de grands rabbins Ou bien de vieilles demoiselles
Sapins médecins divagants Ils vont offrant leurs bons onguents Quand la montagne accouche De temps en temps sous l'ouragan Un vieux sapin geint et se couche
Apollinaire, "Les Sapins" in Alcools, 1913.
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Christian Bobin évoque ainsi les sapins dans son ouvrage intitulé La Grande Vie (Éditions Gallimard, 2014) :
Les portes du temps le lendemain se rouvrent à nouveau. Cette fois, c'est dans la forêt, quand les sapins s'avancent à ma rencontre : ils sont noirs, sévères et insomniaques. Ils jettent une cape verte sur les épaules de Dieu.
Ce que j'appelle réfléchir : je dévisse ma tête, je la mets sur une étagère et je sors faire une promenade. A mon retour, la tête s'est allumée. La promenade dure une heure ou un an.
Les sapins, les grands sapins, est-ce qu'ils lisent le journal ?
Leur saisie intuitive du sens de la vie m'impressionne comme ces gens qui retiennent en eux une énorme lumière qu'ils ne connaissent pas et que parfois – le temps pour une porte de bâiller – ils donnent.
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