Étymologie :
VERVEINE, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1. xiie s. bot. (Gloss. de Tours, éd. L. Delisle ds Bibl. Éc. Chartes, 6e série, t. 5, 1869, p. 331 : verbena vel vervena, ro. vervaenna) ; 1259 jus de le vervainne (Remèdes pop. [ms. Cambrai 351, fol. 312 b], éd. A. Salmon ds Ét. rom. dédiées à G. Paris, 1891, p. 256) ; 2. a) 1826 infusion de verveine (Balzac, Physiol. mariage, p. 94) ; b) 1842 désigne le parfum (Banville, Cariat., p. 46) ; c) [1874, Gobineau, Pléiades, p. 74 : l'absorption de certaines plantes infusées ou distillées, ainsi que la verveine] 1904 désigne la liqueur (Nouv. Lar. ill.). Du lat. verbēnnae, plur. « rameaux de laurier, d'olivier, de myrte, de verveine, réunis en faisceau, en bouquet » (soit pour frapper un traité, soit pour purifier, soit pour faire une infusion, une décoction [Celse], André Bot., p. 327) ; verbēnnae est devenu *vervēnnae p. assim.
Lire également la définition du nom verveine pour amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Verbena officinale - Brébouane - Columbaire - Fleur de madame - Guérit-tout - Herba sacra - Herbe à la croix - Herbe à pigeons - Herbe à tous les maux - Herbe au chat - Herbe aux sorciers - Herbe aux sorcières - Herbe de l'effort - Herbe de sang - Herbe d'Hercule - Herbe sacrée - Menthe de chat - Plante à tous maux - Porte-parole - Sang de chatte - Veine de Vénus - Verbenaire - Vermaine - Verveine commune - Verveine officinale - Verveine sauvage - Vratour - Yserne -
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Selon Jean-Louis Moret, auteur de l'article intitulé "Etymologie onomastique ou les noms de genres de la flore suisse dédiés à des personnes. Complément." (in : Bulletin du Cercle vaudois de botanique n°39 : pp. 103-108, 2010) :
D’autres noms de genres sont parfois réputés provenir de noms de personnes. Je ne les ai pas retenus comme tels : [...]
– Verbena. Selon Kanngiesser (1909), le nom pourrait être dérivé du lat. Herba Veneris, plante de Vénus. Rien pourtant dans la verveine ne me paraît avoir trait à Vénus. Le même auteur propose trois autres étymologies : 1.–le nom proviendrait du lat. herbena, l’herbe (or, ce mot n’existe pas !) ; 2.–il serait apparenté au lat. viriditas, la verdeur ; 3.– il serait issu du celte terfaen, croître ; et que Le Maout et Decaisne (1855) et Gentil (1923) précisent que ferfaën était le nom celte de cette plante (or, le celte n’est pas une langue, mais une famille à laquelle appartiennent le gaulois, l’irlandais, le gallois et le breton).
Toutes ces propositions sont à rejeter au profit de l’étymologie la plus simple : verbena signifie « plante sacrée (notamment la verveine officinale) utilisée dans les cérémonies sacrées […] » (TLFi)
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Botanique :
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Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Verveine :
Propriétés Physiques. — Cette plante est presque inodore ; sa saveur est très amère et astringente ; Mérat, Delens et Cazin ne lui trouvent qu'une amertume légère.
Usages médicaux. — La verveine a joui autrefois d'une grande célébrité ; elle était usitée dans les rites religieux et aussi dans la pratique médicale. On lui attribuait la propriété de rallumer un amour près de s'éteindre ; les druides, les magiciens et les sorciers y avaient fréquemment recours dans leurs opérations surnaturelles. Aujourd'hui encore la superstition veut que la racine pendue autour du cou avec un ruban blanc soit utile pour guérir les scrofules. On a vanté cette plante comme antispasmodique, diaphorétique, résolutive, astringente et vulnéraire ; on la donnait dans une foule d'affections diverses : fièvres intermittentes, hydropisie, ictère, calculs, chlorose, etc. La plante contuse et employée sous forme de cataplasme est usitée dans la médecine domestique en application locale pour soulager les douleurs nerveuses ou inflammatoires, pleurodynie, points pleurétiques, rhumatisme, névralgie, céphalalgie (Forestus, Dehaen, Itard, Dubois). L'eau distillée de verveine a été vantée dans les fluxions, les inflammations de l'œil. Toutes ces propriétés sont problématiques ; une expérimentation nouvelle devrait être tentée pour vérifier ce qu'il peut y avoir de vrai dans toutes ces vertus où le merveilleux a certainement joué un grand rôle.
Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :
Les cataplasmes de feuilles de Verveine, Verbena officinalis, m'ont été fort préconisées contre la tuberculose.
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Croyances populaires :
Paul Sébillot, auteur de Additions aux Coutumes, Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne (Éditeur Lafolye, janv. 1892) rapporte des croyances liées aux cycles de la vie et de la nature :
241. La verveine broyée avec du sel s'applique sur les coupures ou les foulures.
D'après Véronique Barrau, auteure de Plantes porte-bonheur (Éditions Plume de carotte, 2012), la maxime associée à la verveine (Verbena officinalis) pourrait être : "Chance : la science infuse"
Une utilisation simple : Il suffirait de toucher un brin de verveine pour ressentir aussitôt un bonheur et un bien-être indicibles. Croyant aux vertus égayantes de la plante, les Romains aspergeaient d'ailleurs les salles de banquet avec de l'eau où avait baigné des verveines. Ne dit-on pas également qu'une telle plante placée dans sa bouche induirait des sentiments amoureux chez autrui ou qu'une tige de verveine, introduite chez soi, est capable de refouler à elle seule les valeurs ? Plus fou encore, frotter le plante contre sa peau ferait apparaître instantanément l'objet de tous nos désirs ! Moralité, on a tout à gagner à avoir de la verveine chez soi !
Un cadeau empoisonné... Certes la verveine assure de nombreux bienfaits à son propriétaire, mais ce n'est pas toujours sans risques ni terribles conséquences, loin s'en faut ! Prenons par exemple les dames blanches, ces êtres surnaturels apparaissant au milieu de la nuit et qui, dans les Cornouailles anglaises, offrent parfois une tige de verveine aux humains croisés sur leur chemin. La quantité de feuilles présentes sur le rameau renseignera les bénéficiaires sur le nombre d'années de bonheur et de succès que leur apportera la plante offerte. Le seul hic, c'est qu'une fois ce temps révolu, celui qui aura accepté ce don verra son âme appartenir au diable !
En Allemagne, une verveine géante n'apparaissant qu'une fois dan l'an fait rêver et frémir tout à la fois. Jugez donc ! Dans la nuit du 30 avril au 1er mai, cette plante surgit de la montagne de Brocksberg où sorciers et démons se réunissent pour débattre de son attribution. Celui qui, juste avant l'aube, parvient à arracher et à porter la lourde plante sur son dos, régnera en maître sur le monde. Faut-il encore qu'il parvienne sain et sauf jusque chez lui ! Il paraît que cette région regorge de dépouilles de malheureux ayant été" assassinés sur le chemin du retour...
Dopant naturel : Les vachers du canton de Fribourg avaient coutume de placer un rameau de verveine dans leur jarretière afin d'escalader sans peine les montagnes suisses. Il faut croire que cette réputation est parvenue à l'oreille des diablotins de Charente-Maritime puisqu'ils faisaient de même pour cheminer et danser pendant des heures sans s'épuiser ! Voila qui pourra inspirer les marathoniens car un brin de verveine déposé dans sa chaussure permettrait de ne pas ressentir la fatigue. Aucun risque d'être contrôlé positif !
De l'eau dans le gaz : La verveine est connue pour faire office d'entremetteuse amoureuse, son parfum serait par exemple un atout de séduction imparable. Pourtant, à de rares occasions il est vrai, cette plante pourrait engendrer des disputes de couple. Réduite en poudre et placée entre les deux protagonistes, elle serait source de disputes pouvant mener à une séparation. Celui qui reçoit une verveine cueillie à l'Assomption pourrait devenir maladivement jaloux..."
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Symbolisme :
Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) nous livrent leur vision de cette plante magique :
Été - Juillet
VERVEINE - ENCHANTEMENT.
Je voudrais que nos botanistes attachassent une idée morale à toutes les plantes qu'ils décrivent. Ils formeraient ainsi une sorte de dictionnaire universel, entendu de tous les peuples, et durable comme le monde, puisque chaque printemps le fait renaitre, sans jamais en altérer les caractères. Les autels du grand Jupiter sont renversés ; les forêts témoins des mystères des druides n’existent plus, les pyramides de l'Égypte disparaîtront un jour, ensevelies comme le Sphinx sous les sables du désert ; mais toujours le lotus et l'acanthe fleuriront sur les bords du Nil ; toujours le gui croîtra sur le chêne, et la verveine sur les collines arides. La verveine servait chez les anciens à diverses sortes de divinations ; on lui attribuait mille propriétés, entre autres celle de réconcilier les ennemis ; et toutes les fois que les Romains envoyaient des hérauts d'armes porter chez les nations la paix ou la guerre, l'un d'eux était porteur de verveine. Les druides avaient pour cette plante la plus grande vénération ; avant de la cueillir, ils faisaient un sacrifice à la terre. C'est ainsi que les mages, en adorant le soleil, tenaient dans leurs mains des branches de verveine. Vénus victorieuse portait une couronne de myrte entrelacée de verveine, et les Allemands donnent encore aujourd'hui un chapeau de ver veine aux nouvelles mariées , comme pour les mettre sous la protection de cette déesse (Les Sérées de Bouchet, tome ler, page 180 bis). Dans le nord de nos provinces, les bergers recueillent cette plante sacrée, avec des cérémonies et des paroles connues d'eux seuls. Ils en expriment les sucs à certaines phases de la lune. On les voit, docteurs et sorciers du village, guérir tour à tour leurs maitres et s'en faire redouter ; car, s'ils savent calmer leurs maux, ils peuvent, par les mêmes moyens, jeter des sorts sur leurs troupeaux et sur le cœur des jeunes filles. On assure que la verveine leur donne cette dernière puissance, surtout quand ils sont jeunes et beaux. Ainsi l'on voit que la verveine est encore chez nous, comme elle le fut chez les anciens, l'herbe des enchantements.
Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :
Verveine - Enchantement.
Chez les Grecs, les Romains et les Gaulois cette plante était en grande vénération. Elle entrait dans toutes les opérations de magie.
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Dans son Traité du langage symbolique, emblématique et religieux des Fleurs (Paris, 1855), l'abbé Casimir Magnat propose une version catholique des équivalences symboliques entre plantes et sentiments :
VERVENE - ENCHANTEMENT.
Le seigneur rend inutiles les prestiges des devins, et insensés ceux qui prononcent des oracles. Il renverse la science des sages et change leur sagesse en folie. Isaïe aliv, 25.
Selon Pierre Zaccone, auteur de Nouveau langage des fleurs avec la nomenclature des sentiments dont chaque fleur est le symbole et leur emploi pour l'expression des pensées (Éditeur L. Hachette, 1856) :
VERVEINE - AFFECTION PURE.
Petite plante à fleurs bleues qui croît dans les buissons et dans les haies. Chez les Romains et les Gaulois, c'était une plante sacrée dans les cérémonies religieuses. « Dans quelques cantons de l'Allemagne, on couronne encore les jeunes mariées avec cette plante, sans doute en mémoire de Vénus, et pour les mettre sous la protection de cette déesse. »
Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :
Verveine - Inspiration - Poésie.
Les Grecs et les Romains la regardaient comme une herbe sacrée ; les hérauts de ces deux nations en couronnaient leur tête ou leur caducée, lorsqu'on les envoyait demander la paix ou déclarer la guerre. La table où mangeait Jupiter était placée sur un lit de verveine. Les pythonisses se couronnaient de rameaux de cette plante pour prédire l'avenir et entrer dans les accès de leur délire sacré. Dans la Gaule, les druides et les druidesses ne prononçaient leurs oracles qu'une branche de verveine à la main ; enfin les sorciers la faisaient entrer dans la préparation de leurs philtres. Autrefois connue sous le nom de « herbe à tous les maux, » les médecins en font aujourd'hui peu de cas.
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Jacques Brosse dans La Magie des plantes (Éditions Hachette, 1979) consacre dans sa "Flore magique" un article à la Verveine :
En buvant le soir une infusion de verveine, qui se doute aujourd'hui qu'elle fut jadis une plante sacrée aux pouvoirs miraculeux aussi bien en Gaule qu'en Perse, en Grèce et à Rome ? La verveine officinale n'est pourtant pas une plante rare, mais lorsqu'on la rencontre au bord du chemin, on ne prête guère attention à son aspect ingrat : tiges grêles et ramifiées, terminées par quelques fleurettes d'un mauve pâle. pourtant, Grecs et Latins l'appelaient Hiera botane, l'« Herbe sacrée » et l'affublaient de surnoms pompeux tels que « Larmes d'Isis » ou « de Junon », « Sang de Mercure », ou « Herbe d'Hercule ». A Rome, on récoltait dans un lieu sacré du Capitole les tiges fleuries de la verveine dont se couronnaient les prêtres appartenant au collège des fetiales, chargés d'examiner les causes des conflits entre Rome et les autres peuples. Si les Romains étaient dans leur droit, des féciaux allaient demander réparation à l'adversaire et, lorsqu'ils ne l'obtenaient pas, lui déclaraient solennellement la guerre. C'était encore par l'entremise des féciaux que se concluait la paix le doyen d'entre eux, le pater patratus, immolait alors un porc avec un couteau de silex. Il était couronné de verveine, comme tous les féciaux dans l'exercice de leur charge. Cette tradition remontait aux origines mêmes de la Ville éternelle, de même que celui de placer de la verveine dans les maisons afin d'en écarter les mauvais esprits, de nettoyer les autels avec ses rameaux, ou d'en offrir un bouquet à qui l'on voulait du bien. En latin, le nom de la plante verbenaca, désignait le « rameau sacré » et en vint à s'appliquer à tous les rameaux dont se couronnaient les prêtres durant les sacrifices, qu'ils fussent de laurier, d'olivier, de myrte, comme de verveine. Verbenaca, verbenae procèdent d'une très ancienne racine indo-européenne, qui a donné en grec rhabdos, la verge et plus particulièrement la baguette magique.
La verveine (en celte ferfaen) ne jouissait pas en Gaule d'un moindre prestige. Non seulement on l'utilisait aux mêmes usages, mais elle communiquait aux bardes, qui s"n couronnaient pour chanter, l'inspiration divine, et les ovates, avant de prédire l'avenir ou de jeter des sorts, buvaient une infusion de la plante divinatrice.
Surnaturelle par essence, la verveine était évidemment une panacée, elle guérissait l'épilepsie, les fièvres, l'angine, les écrouelles, les maladies de peau, la lèpre, les contusions... mais aussi elle protégeait de toute contagion, ce qui la rendait précieuse, lors des épidémies, si fréquentes durant le Moyen Âge. C’était véritablement l'erbo de la merbelo, ainsi qu'on l'appelait naguère en Provence, mais aussi l'« Herbe aux sorciers », car, autrefois consacrée à vénus - à Rome, la Venus Victrix était couronnée de verveine et de myrte - elle servait à la préparation des philtres d'amour ; on disait même que pour se rendre sans fatigue au sabbat les sorcières se confectionnaient une jarretière en tiges de verveine tressées. En sens contraire cette plante préservait des maléfices. Les habitants du pays de Galles l'appelaient « Poison du diable ». Après avoir coupé ses tiges dans l'obscurité, on s'en servait pour asperger d'eau bénite les lieux qu'il infestait.
Au siècle dernier, on s'est bien sûr moqué des multiples pouvoirs médicaux de la verveine. Des tests de laboratoire et des essais cliniques récents ont pourtant démontré qu'elle était astringente, vulnéraire, résolutive, et certainement fébrifuge, grâce à un glucoside, la verbrénaline. Il est vrai qu'on ne l'utilise guère, sauf dans les campagnes, où un cataplasme de plante fraiche, broyée, dissipe immédiatement les hématomes et, plus communément, en infusions à la fois apéritives et digestives, car, excitant les sécrétions stomacales, la verveine lutte avec succès contre les vertiges et les somnolences dus à une mauvaise digestion. Et sans doute serait-elle bien plus efficace si l'on croyait encore à ses vertus. Mais peut-être l’humble verveine n'a-t-elle pas fini de faire parler d'elle.
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Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), la Botryche lunaire (Botrychium lunaria) a les caractéristiques suivantes :
Genre : Féminin
Planète : Vénus
Élément : Terre
Divinités : Zeus-Jupiter ; Thor ; Aphrodite-Vénus ; Héra-Junon ; Isis ; la nymphe Egérie ; Arès-Mars.
Pouvoirs : Tonifiant ; Puissance ; Bonheur ; Prospérité matérielle ; Clairvoyance ; Exorcisme ; Chasteté.
Utilisation rituelle : Les Romains avaient élevé la Verveine au rang de leurs plantes sacrées. On en frappait les textes de lois, ainsi que les contrats pour bien montrer qu’ils n'émanaient pas seulement de la puissance temporelle, mais que les dieux veillaient aussi à leur bonne application. On nommait verbénaire le chef des féciaux, ces prêtres dont la fonction était de demander satisfaction au nom du peuple romain, de faire les déclarations de guerre, de conclure les traités de paix, etc. Formalistes en tout, les Romains tenaient essentiellement à ne faire de guerres et à ne signer de traités que par des voies irréprochables au point de vue du droit et de la religion. Le collège des féciaux était précisément consacré à cet emploi. Quand un conflit survenait entre Rome et quelque autre peuple, les féciaux examinaient d'où venait la provocation. Si le tort était du côté des Romains, le coupable était livré au gouvernement étranger. Dans le cas contraire, quatre féciaux, sous la présidence d'un verbénaire, allaient demander réparation. Ils portaient avec eux la Verveine cueillie sur le Capitole, fleur pure par excellence. Si satisfaction leur était accordée, ils ramenaient avec eux l'agresseur. Sinon ils donnaient à l'étranger trente jours de réflexion ; après quoi ils revenaient et, si la guerre était décidée, lançaient par-dessus la frontière ennemie un javelot ensanglanté.
Plus tard, à partir, semble-t-il, du gouvernement d'Auguste, les prêtres employaient du jus de Verveine pour nettoyer et purifier les autels de Jupiter. C'était de Verveines fleuries qu'étaient tressées les couronnes des ambassadeurs.
Les Celtes et les Germains ont, eux aussi, beaucoup utilisé cette plante dans leurs rituels de magie et de sorcellerie. On couronnait de Verveines fleuries les filles vierges qui avaient été initiées aux mystères druidiques. Il semble en effet que, bien avant les Romains, les Bretons et les Carnutes avaient une institution rappelant, dans ses grandes lignes, le collège des vestales fondé par Numa Pompilius. On ne peut s'empêcher de faire certains rapprochements troublants. Rappelons que Numa Pompilius, second roi de Rome (714-671 av. J.-C.) est le père fondateur à qui l'on attribue traditionnellement l'organisation religieuse de Rome. Or il prétendait recevoir des inspirations de la nymphe Egérie dans le bois d'Aricie. La Verveine en fleurs était le signe distinctif du haut rang dans la hiérarchie sacrée qu'avaient atteint ces prêtresses gauloises, lointaines inspiratrices, peut-on penser, de cette nymphe Egérie qui souffla à Numa les premiers rudiments de ce qui allait devenir le panthéon romain. Plus on se penche sur l'histoire des mythologies et des religions, plus on s'aperçoit que rien ne se perd, rien ne se crée.
Utilisation magique : Pour escalader facilement les montagnes, les armaillis, les garçons de chalet mettaient à leur jarretière un rameau de Verveine qu'ils appelaient Vervéna à corre : Verveine à courir (Gruyère, Suisse).
Au sabbat, les diablotins se font des jarretières de Verveine pour marcher et danser sans fatigue (Charente-Maritime).
Si l'on frotte les poules avec de la Verveine sauvage, on est assuré de les vendre un bon prix au marché (Dinan, Côtes-du-Nord).
Les paysans belges disaient que dans les cendres de la Verveine brûlée le soir du 30 avril se trouve le gekkensteen : la pierre des fous.
Les Allemands ont reporté sur la Verveine certains passages des légendes anglaises concernant les fougères. Alors que dans les campagnes anglaises c'était durant la nuit fantastique de Midsummer (solstice d'été : la Saint-Jean) que les légions infernales et. les bataillons de fées se livraient un combat titanesque pour la précieuse graine de fougère à l'aigle, les villageois d'outre-Rhin affirmaient que tout au long de la terrible nuit de Walpurgis (nuit du 30 avril au 1 er mai), les sorcières et les démons se donnaient rendez-vous sur la montagne du Brocksberg pour palabrer âprement, et finalement en venir aux mains avant le lever du jour, pour la possession d'une Verveine gigantesque qui sortait de terre uniquement cette nuit-là et rendait Prince de ce Monde celui qui réussissait à s'enfuir en la portant sur son dos, car elle pesait aussi lourd qu'un chêne de cinq ans. Il fallait l'arracher du sol une fraction de seconde avant l'apparition de l'aurore, sinon les sorcières se précipitaient sur l'insensé et le mettaient en pièces ; mais dès que filtrait la toute première lueur de l'aube, toutes ces fantasmagories dantesques s'évanouissaient d'un seul coup. Toutefois, le chercheur audacieux devait encore rester sur ses gardes: la région est en effet pleine de cadavres d'imprudents que l'on a assassinés au petit matin pour leur voler la Verveine géante du Brocksberg.
Les femmes blanches, apparitions nocturnes, présentent aux personnes qu'elles rencontrent une branche de chêne ou d'herbe de la croix (Verveine). Si l'on accepte ce talisman, on sera doté d'autant d'années de puissance et de joie que la branche a de feuilles ; mais au bout de ce temps, l'âme de celui qui aura conclu le marché appartiendra au diable (Cornouailles anglaise).
En France, on cueille traditionnellement cette plante à la Saint-Jean, lorsque Sirius apparaît dans le ciel ; mais il faut que le soleil soit complètement couché, et la lune invisible.
L'infusion des herbes ainsi récoltées selon les règles est employée dans les rituels d'exorcisme appliqués à des lieux, des bâtiments, mais ne concernant pas directement une personne ou un animal ; on asperge abondamment le site maudit en criant les incantations appropriées.
Pendant la Renaissance, la Verveine entrait dans de nombreux parfums à brûler ; elle avait ses « catalyseurs » et ses « répulsifs », et chaque recette de parfum pour encenser était destinée à un usage rigoureusement codifié. Puis la mode passa et les magiciens se détournèrent de la Verveine à brûler. En revanche, pulvérisée ou en morceaux, la plante resta un composant privilégié des mélanges d'amour et des charmes protecteurs. Aujourd'hui elle est employée à ces fins.
Pour demeurer chaste pendant une longue - une fort longue ! - période, voici ce qu'il faut faire : le premier jour de la nouvelle lune, courez à travers la campagne dès qu'il commence à faire clair, mais avant le lever du soleil. Une fois arrivé à l'endroit où vous avez repéré beaucoup de Verveines sauvages, coupez-en trois, choisies parmi les plus hautes. Exprimez-en le jus et buvez-le, pieds nus dans un fossé rempli d'eau croupie. Selon les anciennes prescriptions des magiciens italiens, cette méthode à la portée de tous devrait vous faire perdre tout désir sexuel pendant sept ans !
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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :
Surnommée "herbe de Vénus", "herbe aux sorciers", "herbe sacrée", "herbe à tous les maux", ou "guérit-tout", la verveine est, avec la mandragore, une des plantes les plus puissantes en magie. Les Anciens la vénéraient particulièrement : ils s'en servaient pour balayer les autels de Jupiter, et pour frapper "les textes de lois, ainsi que les contrats pour bien montrer qu'il n'émanaient pas seulement de la puissance temporelle, mais que les dieux veillaient aussi à leur bonne application". C'est en outre avec une infusion de cette plante que les druides, après l'avoir récoltée selon un rituel mystérieux, lavaient leurs autels avant les sacrifices. Chez les Germains, les prêtresses s'en couronnaient ainsi que les prêtres gaulois chargés de prédire l'avenir, et recouraient à la divination par la verveine ou botanomancie.
Les Romains s'en offraient des bouquets au nouvel an pour porter bonheur, arrosaient les salles de banquet d'eau dans laquelle trempait de la verveine pour égayer l'assemblée. Au Moyen Âge, Albert le Grand conseillait toujours, pour « donner de la joie et du divertissement à une compagnie dans un repas », d'arroser le lieu des réjouissances avec du vin dans lequel avaient infusé quatre feuilles de verveine. De plus, rien qu'en la touchant, elle devait procurer bien-être et bonne humeur.
La verveine est surtout une « plante d'amour », connue dans le monde gallo-romain pour ranimer la flamme et, à ce titre, dédiée à Vénus. Les recettes pour se faire aimer sont très nombreuses. Certaines exigent une mise en scène, comme celle-ci du XVIIe siècle :
Le premier vendredi de la nouvelle lune, il faut avoir un couteau neuf et aller cueillir une verveine. Il faut se mettre à genoux, la face tournée vers le soleil levant et, coupant la dite herbe avec le couteau, dire : « Sana isquina safos : je te cueille, herbe puissante, afin que tu me serves à ce que je voudray. » Puis vous vous lèverez sans regarder derrière vous. Etant dans votre chambre, vous la ferez sécher et pulvérisez et vous ferez avaler cette poudre à la personne.
Pour faire naître chez autrui de tendres sentiments, on peut également se contenter de se frotter les mains du jus de la plante et de toucher celui ou celle dont on veut se faire aimer. « Ce secret a été souvent éprouvé », soutient Albert le Grand, qui voit l'explication dans le fait que « son sac fait beaucoup de sperme ». En outre, la plante qui rend amoureux « procure le savoir-faire aux jeux d'Eros » : il suffit, paraît-il, de se pendre au cou un sachet contenant trois graines de verveine pour briller par ses prouesses. Il est vrai que son seul parfum est déjà en lui-même considéré comme un philtre d'amour très puissant, bien que l'on soutienne en Bretagne qu'en avoir constamment sur soi rend chaste. D'ailleurs, on croyait au XVIIe siècle que placer de la verveine en poudre entre deux amoureux provoquait une dispute et les séparait. Celle qui a été cueillie le jour de l'Assomption ou la veille de la Saint-Jean, à midi pile, rend jalouse la personne à qui on la donne.
Sa racine, attachée autour du cou, soigne les écrouelles, les ulcères et l'incontinence. Se rouler dans un champ de verveine était un remède du XVIe et XVIIe siècle contre la lèpre. Récoltée lorsque le soleil est dans le signe du Bélier, et mélangée à de la graine de pivoine, la verveine prévient les crises épileptiques. En emplâtre, elle est très efficace contre les hémorroïdes ; en poudre, elle guérit, par application, une morsure de serpent, la prudence recommandant d'ailleurs pour se protéger des reptiles d'en porter un peu sur soi. Contre une hernie, il suffit d'en cueillir et de la brûler le jour de la Saint-Jean ; contre les maladies de peau, de la récolte humide de rosée (Roussillon), et contre les maux de reins, de l'arracher une nuit de mai et de pleine lune en marchant à reculons (Morvan).
On dit dans la Vienne qu'uriner sur de la verveine porte bonheur ; les Landais, de leur côté, urinaient sur la plante neuf jours de suite, après y avoir déposé du pain et de l'ail, pour faire passer la fièvre. La verveine fait venir le lait aux chèvres, ainsi qu'aux femmes qui en porteront trois branches récoltées en récitant le Pater noster et l'Ave Maria.
De plus, la verveine, qui donne de la puissance aux bergers, rend les lutteurs vigoureux et évite la fatigue, met à l'abri des mauvaises rencontres lorsqu'elle est placée dans les chaussures. En Suisse, placée dans une jarretière, elle permettait d'« escalader facilement les montagnes ». Les enfants qui en porteront seront bien élevés, éveillés, fais et aimeront les sciences. Pour ceux qui veulent dormir profondément et sans cauchemar, il leur faut placer près de leur lit quelques feuilles fraîches de la plante.
Un pied de verveine sauvage que l'on aura cueilli à midi pile en récitant cinq Pater et cinq Ave puis mis aussitôt en pot porte bonheur aux habitants d'une maison ou d'un appartement (en Espagne, a verveine porte-bonheur se récolte le jour de la Saint-Jean). En cas de querelle avec une personne, s'agenouiller devant cette plante et formuler une prière, suffit à se réconcilier, à moins qu'on ne préfère partager une tisane de verveine, procédé convenant parfaitement aux amoureux fâchés. La verveine était déjà emblème de la paix chez les Latins, où les ambassadeurs appelés verbenarii (de Verbena officinalis, le nom savant de cette plante) en portaient une branche à la main ; elle symbolisait également la propriété agricole, d'où la croyance que « celui qui possédait un brin de gazon avec de la verveine devenait invulnérable ». Plantée dans une terre ou une vigne, elle assure d'excellents récoltes, même si Albert le Grand soutenait qu'elle engendrait des vers dont le seul contact faisait mourir les hommes. En haute Bretagne, on mettait un brin de verveine dans les branches des pommiers pour qu'ils donnent beaucoup de fruits et on en frottait la volaille pour la vendre à bon prix. Dans un colombier, elle attire tous les pigeons des environs. Elle préserve même une maison des voleurs (à Bayeux) et, cueillie à la Saint-Jean, détourne le tonnerre (Normandie).
En aspergeant les maisons infectées par une maladie avec de la verveine trempée dans de l'eau lustrale, ou en en accrochant une branche à la porte, de préférence en forme de croix, on chasse les mauvais esprits. Les chasseurs qui attribuaient à un mauvais sort leur déveine frottaient de cette plante leur fusil.
On affirme en Cornouailles (Angleterre) que les dames blanches (sortes de fées) tendent aux personnes rencontrées un brin de l'« herbe sacrée » : « Si l'on accepte ce talisman, on sera dote d'autant d'années de puissance et de joie que la branche a de feuilles ; mais au bout de ce temps, l'âme de celui qui aura conclu le marché appartiendra au diable. » En Allemagne, pendant la nuit du 30 avril au 1er mai (nuit de Walpurgis), sorciers et démons, réunis sur la montagne du Brocksberg (massif du Harz), se disputaient la possession d' « une verveine gigantesque qui sortait de terre uniquement cette nuit-là et rendait Prince de ce monde celui qui réussissait à s'enfuit en la portant sur son dos, car elle pesait aussi lourd qu'un chêne de cinq ans ».
Pour savoir si une personne a quelque chance de survivre à une maladie, il faut se rendre à son chevet, de la verveine dans la main, et questionner le malade sur son état. S'il paraît confiant, sa guérison est assurée mais s'il gémit sur son sort, le pire est à redouter. Le sorcier guérisseur, de son côté, pour identifier le mal d'un patient, laissait macérer dans du vinaigre trois branches de verveine cueillie à la lune descendante. Au bout de trois jours, « au lever du jour, il reconnaît, à la manière dont les feuilles sont entrelacés, de quelle maladie son client est atteint ».
La récolte de cette plante magique, effectuée de préférence un mardi, un jeudi ou un vendredi du mois de mai à l'« heure de Vénus », s'accompagne de certaines prescriptions, Pline, en son temps, conseillait une nuit sans lune, car nul ne devait assister à ce qui était considéré comme un péché. On disait aussi de ne pas regarder la racine de la verveine en raison de ses émanations dangereuses et si, comme nous l'avons vu plus haut, certains s'en approchaient à reculons, c'était pour surprendre les démons désireux de faire échouer l'opération. Pour écarter les mauvaises influences, un certain nombre d'invocations étaient en usage, ainsi que des conjurations ordonnant à la plante de conserver ses vertus, comme la suivante : « Je t'ordonne, au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit, par les soixante-douze noms mystiques de Dieu et par les quatre évangélistes, les quatre anges, de n'envoyer aucune de tes vertus dans la terre. Sois toujours mienne et en mon pouvoir, avec les vertus avec lesquelles Dieu l'a créée. » Certains manuscrits conseillent en outre de déposer la plante sur un autel et de faire dire pour elle une ou neuf messes selon la version.
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Eric Pier Sperandio, auteur du Grimoire des herbes et potions magiques, Rituels, incantations et invocations (Éditions Québec-Livres, 2013), présente ainsi la Verveine (Verbena) : "Il s'agit d'une plante vivace que l'on retrouve en Amérique du Nord et en Europe à l'état sauvage.
Propriétés médicinales : La propriété la plus répandue de cette plante st son effet de tranquillisant naturel lorsque prise en infusion. Ceci dit, c'est aussi un excellent remède dans les cas de fièvre et de congestion de la gorge. Prise froide, cette infusion est un tonique.
Genre : Féminin.
Déités : Vénus ; Isis ; Osiris ; Junon.
Propriétés magiques : Protection ; Purification ; Guérison ; Paix.
Application : L'encens de cette plante a toujours servi pour les rituels de purification et de protection.
RITUEL POUR TROUVER LA PAIX AVEC UN ENNEMI :
Ce dont vous avez besoin :
une chandelle blanche
de l'encens d'oliban
une pincée de verveine séchée
une enveloppe blanche
une photographie de la personne (ou son nom inscrit sur une feuille de papier)
Rituel : Vous pouvez pratiquez cette invocation au moment de la pleine lune, quel que soit le jour.
Allumez votre chandelle et votre encens, puis passez la photo (ou le papier) au-dessus de la fumée d'encens en répétant trois fois les mots suivants :
Ennemi, ennemi, transforme-toi en ami
Que toute discorde disparaisse entre nous
Ennemi, ennemi, transforme-toi en ami
Que le vent de l'amitié passe entre nous.
Placez la photo (ou la feuille) dans l'enveloppe, ajoutez-y la verveine, cachetez l'enveloppe et oubliez-la au fond d'un tiroir."
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Maïa Toll, auteure de L'Herbier du chaman, 36 cartes divinatoires, A la rencontre de la magie des plantes (Édition originale 2020 ; Édition française : Larousse, 2021) nous révèle les pouvoirs du Basilic sacré (Verbena officinalis) :
Mot-clef : Laissez entrer la magie
La Verveine vous parle à demi-mots d'enchantement et de mondes à peine entrevus. Elle va vous apprendre à voir au-delà de l'ordinaire et vous aider à explorer les contrées liminales de votre psyché. Grâce à son accès facile à l'entre -deux, elle peut faire appel aux bienfaits de plantes qui ne sont pas présentes, ce qui la rend incontournable dans n'importe quel jardin médicinal. Demandez à la Verveine de canaliser ses sœurs et de réserver leur place dans un mélange ou un parfum. Mais rappelez-vous que la Verveine, légère et vaporeuse, n'en est pas moins puissante : une gorgée de son infusion est magique, une tasse entière donne la nausée. Pourquoi ? Parce que trop de mystère nous déséquilibre ; c'est l’équivalent du mal des transports de l'âme. Alors laissez la Verveine danser, aérienne, au bord de votre conscience et vous rappeler les possibilités infinies qui se déploient quand vous laissez entrer la magie.
Rituel : Étudiez l'entre-deux
Selon les traditions celtes, les druides récoltaient la Verveine lorsque ni le Soleil ni la Lune n'étaient visibles dans le ciel. Ces moments magiques se produisent presque quotidiennement : nous les appelons aube et crépuscule. La verveine est un remède des entre-deux, à la fois temporels et spatiaux (embrasures de portes, carrefours, lieu où l'écume des vagues s'enroule sur la plage). Si vous voulez vraiment la comprendre, peaufinez votre connaissance de l'entre-deux.
Quand avez-vous capté, pour la dernière fois, ces instants magiques où la nuit se glisse dans le jour et le jour dans la nuit ?
Pendant trois jours, observez le lever ou le coucher du Soleil (ou les deux). réservez-vous dix minutes pour rester debout sous la voute céleste, faire une place spéciale à la Verveine dans votre cœur et absorber la magie de l'entre-deux. Si quelque chose vous pèse psychologiquement, soyez ouverte à la possibilité de réponses inattendues.
Réflexion : Au carrefour de deux mondes
Les anciens mystiques vénéraient l'entre-deux spatio-temporel, cet endroit où les possibilités se chevauchent, créant un milieu parfaitement propice aux synchronicités et à la magie. Ces lieux sont souvent appelés carrefours, parce que c'est là que vous pouvez choisir de faire un virage à 180 degrés pour aller explorer l'inconnu au lieu de continuer tout droit sur votre route actuelle.
Dans les mythologies, les carrefours ont leurs gardiens ou leurs gardiennes parce que les grands changements de vie réclament souvent la mort d'une ancienne façon d'être et que les humains ont le soin d'un guide (ou d'une épreuve !) pour les aider à accomplir ce rite de passage. Si vous étiez à un carrefour aujourd’hui, qu'aimeriez-vous quitter pour prendre une nouvelle voie ?
Gardiens et gardiennes des carrefours
De nombreuses cultures ont un guide ou un gardien des carrefours :
Hécate est la déesse grecque de la nuit, de la lune et des carrefours.
Janus, le dieu romain des commencements et des fins, a deux visages, l'un tourné vers l'avenir, l'autre vers le passé.
Legba est l'esprit des carrefours en Afrique de l'Ouest, un messager entre les hommes et les dieux.
Cailleach, la vieille femme de la mythologie celte, est une gardienne du monde spirituel.
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Arnaud Riou dans L’Oracle du peuple végétal (Guy Trédaniel Editeur, 2020) classe les végétaux en huit familles : les Maîtres, les Guérisseurs, les Révélateurs, les Enseignants, les Nourricières, les Artistes, les Bâtisseurs et les Chamans.
La famille des Révélateurs comprend la Menthe poivrée, l’Absinthe, la Verveine, le Basilic, le Persil, le Gingembre et le Poivre. Les révélateurs mettent en lumière, en exergue, pimentent, sucrent ou permettent à leur environnement de se transformer.
Ce n'est pas l'événement qui crée le drame,
mais la charge émotionnelle que nous y associons
et le regard que nous portons sur lui.
Ils donnent du goût, parfument un plat, l'épicent ou le transforment. Les Révélateurs ont un rôle clé dans notre apprentissage du goût comme dans notre apprentissage de l'existence. Ils nous apprennent à transformer une viande, une poêlée de légumes ou un poisson sans saveur en délice pour les papilles. Notre existence peut être fade, morne ou épicée, pimentée, salée, sucrée. Ce sont les Révélateurs qui vont vous permettre de transformer votre regard sur une situation, un événement, un potentiel. Le Thym, le Romarin, Le Laurier, la Menthe, Le Poivre, la Cannelle, le Piment de Cayenne ou la Vanille, les Révélateurs qu'on appelle en cuisine les plantes aromatiques, les aromates ou les épices accompagnent l'histoire de la cuisine et ainsi l'histoire de l'humanité depuis des millénaires. Les Révélateurs ont pour vocation de réveiller la beauté, de mettre en avant une sensibilité, de rendre unique ce qui serait passé inaperçu. Apprendre à les reconnaître, à vivre avec eux, c'est apprendre à transformer votre regard sur le monde, le rendre plus beau, plus généreux, plus inspirant.
……………………………………………………………….................................................... Ta plus grande force
Se mesure à ta douceur et à ta tendresse.
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La Verveine est une herbacée vivace originaire d’Amérique du Nord et du Sud, facile à cultiver. Elle pousse sur les chemins, contre les haies et dans les potagers. Sa tige est anguleuse. Ses toutes petites fleurs en épis, de couleur mauve pâle, colorent dès le mois de juin les massifs et leur offrent du relief, notamment dans les variétés tombantes. Très populaire sous forme d’une tisane qui procure le calme, facilite la digestion et prépare au sommeil, la Verveine est avant tout une plante sacrée vénérée par les druides et envoyée par les Dieux. Les Grecs et les Latins vouaient un respect particulier à cette plante magique. Les druides la cueillaient pieds nus en faisant systématiquement une offrande à la terre à chaque récolte. Les prêtres d’Isis, qui l’avaient choisie comme symbole de paix, brandissaient une tige de Verveine pour demander l’arrêt des combats. Son origine remonte à la mythologie comme le jus de Verveine était utilisé pour purifier les autels dédiés à Jupiter. Son esprit lent, pacifié et profondément doux a conquis le cœur des Dieux. Elle est symbole de paix, de douceur et de tendresse. C’est pourquoi elle rentrait dans la composition des philtres d’amour avec la Rose. La Verveine associe l’amour à la douceur, la passion à la tendresse. Elle apaise le désir, adoucit le feu, assagit les ardeurs pour les faire durer dans le temps. La Verveine a reçu l’approbation des Dieux. Elle peut lutter contre les pouvoirs maléfiques des addictions, des passions destructrices et des pulsions négatives. On appelle encore la Verveine l’Herbe de sang, l’Herbe aux sorciers ou, en Provence, l’Herbe de la merveille. Dédiée à la déesse Vénus chez les Romains, la Verveine officinale (moins parfumée mais plus efficace que la Verveine odorante) a été utilisée pour guérir les fièvres mais aussi les blessures du corps, les bleus, foulures, plaies et ecchymoses. LA Verveine, vénérée en Provence comme une herbe sacrée, poussait sur le mont Golgotha. Elle aurait permis de soigner les plaies du Christ pendant la Crucifixion. Au Moyen Âge, on s’en servait pour enrichir l’eau bénite. Cette plante aurait longtemps été employée pour ranimer la flamme des amoureux. Il suffirait pour cela de s’enduire les mains du suc frais des plants de Verveine récoltés le premier vendredi du printemps, pour caresser l’être aimé. Pour autant, cette médecine ne peut être utilisée qu’une fois par an ! De nos jours, si la Verveine s’est imposée comme la tisane qui facilite la digestion et favorise le sommeil, si elle est associée - qui la vulgarisent - à la routine, à l’habitude et à l’endormissement, elle n’en reste pas moins la plante de l’équilibre, de la constance, de la pérennité des sentiments et de l’amour.
Mots-clés : L’amour – La douceur – La sensualité – La constance – Le sommeil – Les rêves – L’habitude – La sécurité – La pérennité – La digestion – La fidélité – Le calme – La plénitude
Lorsque la Verveine vous apparaît dans le tirage : C’est un appel au calme, au réconfort, à la sécurité intérieure, au ralentissement. La Verveine vous révèle par l’ouverture du cœur. Elle vous invite à vous poser, vous faire confiance et à vous détendre. Il n’est pas toujours nécessaire de chercher à faire mieux, plus vite, plus intensément. Il y a une grande réalisation dans la constance et le calme, dans l’être et non le faire ou le posséder. La Verveine vous aide à y voir clair, à prendre de la hauteur, à plonger dans vos profondeurs, dans ce qui vous sécurise. Même si les vagues à la surface créent des tempêtes, dans les tréfonds de l’océan, tout est calme, harmonieux, la vie est paisible et abondante. La Verveine vous invite à plonger dans vos profondeurs pour y trouver la paix. La Verveine vous interroge aussi sur votre sommeil. Comment dormez-vous ? D’un sommeil léger ? Agité ? Dormez-vous longtemps ? Rêvez-vous beaucoup ? Vos rêves sont-ils doux, initiatiques ? Réussissez-vous à les décrypter, à vous en souvenir ? Appréhendez-vous de vous coucher ? Le passage à la nuit est une invitation à lâcher le contrôle, le mental, pour pénétrer un autre monde, celui où l’inconscient communique avec vous. Cela fait partie de votre équilibre. La nuit est au jour ce que le yin est au yang. C’est l’espace complémentaire de la création, de la sédimentation. Peut-être pouvez-vous vous intéresser davantage à la façon dont vous dormez, dont vous rêvez, pour mieux incarner ce qui vous fait agir, décider, vous éveiller ! La Verveine est une plante très yin, féminine, liée à l’introspection. Si vous avez tendance à en faire toujours plus, toujours mieux, la Verveine saura vous aider à détendre et à accueillir l’espace non créé, le vide immense à partir duquel vous pourrez développer la plénitude de vos actions.
Signification renversée : Lorsque la Verveine vous apparaît dans sa position renversée, c’est pour vous interroger sur votre paresse, votre propension à répéter des mouvements, des habitudes sans vous interroger sur le bien-fondé de ces actions. Il existe différentes formes de paresse, la fatigue intellectuelle, la procrastination, la nonchalance, la fainéantise. On peut être très actif et être paresseux. Peut-être avez-vous tendance actuellement à vous laisser aller, à vous contenter de peu là où votre âme a besoin de vous voir sortir de votre zone de confort. Dans sa posture renversée, la Verveine vous interroge sur votre couple. Qu’en est-il de votre couple intérieur ? Êtes-vous en paix avec votre représentation de l’homme, de la femme et de leur équilibre. Avez-vous tendance à opposer ? A vous opposer ? La Verveine vous interroge dans cette position sur votre regard à l’habitude, à la routine, à la constance ? Comment vivez-vous ces sentiments ?
Le Message de la Verveine : Lorsque vient la nuit, je me répands. Il y a des informations qu’il m’est plus facile de te communiquer lorsque tu dors. Lorsque tu dors, ton esprit est au repos. Tous les filtres disparaissent. Tu ne cherches plus à contrôler, à tout comprendre. Ton mental s’apaise et tu sors de la comparaison, de la compétition pour revenir à ce que tu es profondément et dans ton essence. Je peux plus facilement communiquer avec toi la nuit, car tu es moins rationnel. Je peux alors transmettre des messages à ton âme en utilisant des images symboliques, des histoires, des mythes. Je croise ces histoires et ces représentations comme un peintre joue de ses couleurs et de ses reliefs. Es-tu assez attentif à tes yeux à ton sommeil ? A ce que te dit ton inconscient ? Sais-tu entendre ce que tu ne comprends pas, ce que tu ne contrôles pas et ce que tu ne maîtrises pas ? C’est un bel apprentissage qui t’attend, celui de t’aventurer sur un terrain où tu n’as pas le contrôle. Cela va te demander de ralentir, de faire confiance, de te rappeler la douceur du quotidien, là où tout n’est que découverte, paix et amour.
Le Rituel de la Verveine : Connectez-vous à votre colonne vertébrale. Accordez-vous quelques minutes le dos droit et posez votre attention sur votre respiration. Respirez profondément. Adoptez une respiration lente et abdominale. Inspirez profondément sur 5 secondes, laissez naturellement l’air au repos 2 secondes et expirez profondément 5 secondes. Laissez à nouveau l’air au repos 2 secondes et inspirez à nouveau 5 secondes. Maintenez ce cycle 5/2/5/2 quelques minutes. A chaque nouvelle inspiration, prenez conscience que vous renouvelez tout l’oxygène de vos cellules et ainsi toutes les nouvelles informations dont votre corps a besoin s’emmagasinent dans les organes. A chaque respiration, expirez avec le gaz carbonique toutes les toxines, toutes les informations obsolètes. Sentez toute la douceur, la tendresse et l’amour de vous que vous procure cette respiration.
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Symbolique celte :
Adolphe de Chesnel, auteur d'un Dictionnaire des superstitions, erreurs, préjugés, et traditions populaires... (J.-P. Migne Éditeur, 1856) propose la notice suivante :
VERVEINE. Cette plante, célèbre dans le culte des anciens, l'était aussi chez les druides qui en accompagnaient la récolte de diverses pratiques mystérieuses ; elle conserva sa renommée au moyen âge, et se trouve encore l'objet, à notre époque, de croyances exagérées relativement à ses propriétés. Autrefois, on lui attribuait celle de guérir toutes les maladies ; puis il suffisait de s'en frotter pour se procurer immédiatement ce qu'on désirait ; enfin, elle avait le pouvoir de réconcilier les cœurs aliénés, et tous ceux que cette plante touchait, éprouvaient aussitôt le bien-être et la joie.
En Espagne, on allait jadis aussi, la veille de la Saint-Jean et durant la nuit , cueillir aux champs de la verveine et du trèfle, ainsi que nous l'avons déjà dit plus haut, et l'on conservait l'un et l'autre comme une amulette dans toutes les habitations. Les Normands préconisent la verveine contre la foudre et un grand nombre de maladies.
Selon Philip et Stephanie Carr-Gomm dans L'Oracle druidique des plantes, Travailler avec la flore magique de la Tradition (édition originale 1994 ; traduction française, 2006), les mots clefs associés à cette plante sont :
en "position droite : Réconciliation - Awen - Magie
en position inversée : Conflit - Obstacles - Quête d'amour.
La verveine vit dans la plupart des régions de l'Europe, de l'Afrique du Nord et de l'Asie. Plante pérenne atteignant 80 cm de hauteur, on la voit généralement sur le bord des chemins et dans les collines. Ses petites fleurs inodores vont du rosâtre au lilas pâle, portées par des tiges feuillues au mois de mai. Les feuilles ont in goût amer, astringent.
La carte montre une plante en fleur, un rayon de miel posé en offrande à côté d'elle. Des baies magiques de sorbier pendent de l'arbre qui la surplombe, et on voit au loin n lièvre qui a laissé ses traces près de la verveine.
Sens en position droite. Si vous pouvez imprégner votre vie d'un sentiment de magie, vous avez de la chance : la tristesse et les obstacles apparents semblent s'éloigner de vous comme s'ils n'étaient pas les bienvenus. Un cycle bénéfique est mis en mouvement, si bien que nos bonnes intentions et actes suscitent des actions positives de la part d'autres personnes, ce qui, à son tour, améliore notre vie. Les druides font des offrandes de miel ou de lait aux plantes qu'ils ramassent. Cet acte rituel véhicule la gratitude et le désir de ne pas prendre de la Terre sans lui donner quelque chose en retour. Si vous avez tiré cette carte, vous entamez un tel cycle de par vos propres actes de bonté. Jadis, on croyait que la verveine favorisait le règlement des disputes - cette carte annonce qu'on fait appel à vous pour résoudre un conflit ou réconcilier deux positions opposées. De plus, elle peut suggérer que vous serez inspiré dans votre vie créative (l'inspiration est appelée awen par le druidisme). La créativité, comme tout ce qui existe dans la nature, est cyclique, et il se peut que vous entamiez un nouveau cycle d'épanouissement créatif.
Sens en position inversée. La verveine, sacrée pour Vénus, est associée depuis l'Antiquité à l'amour magique. Tirer cette carte dit que vous êtes en quête d'amour. Une manière d'approcher cette quête universelle est de chercher cette qualité en vous plutôt qu'à l'extérieur. Si vous arrivez à vous ouvrir à la magie inhérente de la vie et à recevoir l'inspiration satisfaisant votre potentiel créatif, vous êtes plus susceptible d'attirer l'amour dans votre vie - que ce soit sous la forme d'un partenaire ou des amis positifs qui apprécient votre créativité et pensent comme vous.
Le nom de la verveine vient du celte ferfaenawen, "éloigner une pierre", référence à la croyance ancienne qu'elle aide à expulser les calculs rénaux. Sur un plan symbolique, il se peut que cette carte signale votre besoin de dépasser le conflit ou les obstacles qui entravent le bon fonctionnement de votre vie. En encourageant l'awen la force magique de l'inspiration qui, pour les druides, est omniprésente, les circonstances de votre vie commenceront à changer et à favoriser l'expression de votre amour et de votre créativité, au lieu de l'entraver. Ce faisant, vous constaterez également que des situations tendues ou conflictuelles commencent à s'apaiser, permettent la médiation ou même la réconciliation.
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La plante du sorcier
Jadis, la verveine était tenue pour si sacrée et portait une foule de noms reflétant la considération qui lui était accordée : plante de l'enchanteur, herbe sacrée, plante du sorcier. Sur l'île de Man, on l'appelait tout simplement Yn Lus, l'herbe ou Yn Ard Lus, l'herbe du chef. Ceux qui la cueillaient dans le Lancashire, devaient réciter un charme : "Sanctifié par toi, verveine, si tu pousses dans la terre."
L'Histoire naturelle de Pline l'Ancien mentionne la verveine parmi les quatre simples utilisés par les druides anciens. les trois autres étant le gui, le selago (probablement le lycopode sélagine) et une plante qu'il appelle samolus, qui pourrait être un samole aquatique, une pimprenelle aquatique, une fleur de Pâques ou un mouron d'eau. Selon Pline, les druides cueillaient la verveine juste avant la floraison, à la Lune noire, au lever de Sirius. Elle devait être coupée avec une faucille et tenue seulement de la main gauche, après avoir fait une offrande de miel à la terre. On la considérait comme une panacée. En Gaule, la verveine était utilisée pour la divination et la prophétie.
Les druides modernes pensent que la verveine stimule la circulation de l'inspiration (awen) puisque, selon le poème La Chair de Taliesin, c'était l'un des ingrédients du chaudron de Ceridwen. Le poème, découvert dans un manuscrit du XIIIè siècle, a été indiscutablement inspiré par un texte plus ancien. Les autres ingrédients énumérés sont l'écume de mer, les baies de sorbier, la ficaire et probablement le sisymbre sagesse.
Une infusion de feuilles peut être versée dans le bain ou bue pour favoriser l'inspiration créative. les bottes de verveine peuvent décorer l'autel ou balayer rituellement votre espace sacré."
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Marc-Louis Questin, dans La Tradition Magique des Celtes (1993, réed. 2016), nous apprend que :
"Les Gaulois considéraient la verbena comme une herbe sainte. Selon Pline, ils l'employaient pour tirer les sorts et prédire l'avenir". Marcellus ne lui connaît d'autre emploi que les maux d'yeux. Apulée la recommandait mâchée à jeun, pour calmer la douleur dentaire. Dans le Nord de la France, on la nommait encore récemment "l'herbe à la double vue" et on la considérait comme favorisant l'exaltation, l'extase et le sommeil. En Bretagne, où on l'appelait "louzaouenn ar groaz", l'herbe de la Croix, elle passait pour défendre celui qui la portait contre tout maléfice. Les Druides lui accordaient la propriété de guérir toutes les maladies, de détruire les maléfices, d'inspirer la gaieté... Elle était en grande vénération chez les Anciens qui se couronnaient de Verveine et en ornaient leurs temples.
D'elle devaient aussi se munir ceux qui s'en allaient chercher des trésors sous les menhirs de Plouhinec quand ils allaient boire à la rivière d'Etel.
Selon un propos recueilli par Jules Gros en Tregor, la verveine servait à faire un onguent "da denna ar gwad blanset" pour extraire le sang meurtri. On en fait également des emplâtres pour les rhumatismes, les lumbagos, les sciatiques, les maux de tête, en prenant soin auparavant de la mettre à bouillir dans du vinaigre.
L'infusion de verveine est un remède excellent pour les maux d'yeux. Faites bouillir ses feuilles dans du vinaigre, deux poignées de verveine pour un litre de vinaigre : mettez- un linge à tremper et appliquez-le comme une compresse sur les côtés, les reins ou le front quand vous avez des maux de tête. La Verveine broyée avec du sel et appliquée sur les coupures arrête le sang. Pour guérir les fistules et les ulcérations, écrasez bien finement des feuilles de verveine ; mélangez-les avec une cuillerée de farine de seigle et deux blancs d’œufs. Mettez ce mélange sur la blessure ; renouvelez souvent cette application et vous guérirez. Les ovates, pour chasser les mauvais esprits, aspergeaient les habitations d'eau lustrale où trempait une branche de Verveine. De l'Île de Sein, on venait autrefois sur le continent cueillir la Verveine à la pointe de Lervily en Esquibien. Plante sacrée de la Gaule, son nom vient du celte ferfaen. Les guérisseurs et les sorciers gaulois la faisaient entrer dans diverses compositions et dans les philtres d'amour. On lui reconnaissait d'innombrables vertus : guérir l'épilepsie, les fièvres et les angines, soigner les contusions, les maladies de peau. Les Grecs et les Latins tenaient cette Verveine, consacrée à Vénus, en très haute estime pour son pouvoir bénéfique.
A la fois apéritive et digestive, elle excite l'estomac à sécréter et lutte ainsi contre les vertiges, les migraines, les somnolences provenant d'une mauvaise digestion. Elle est tonique, antispasmodique (utile contre la nervosité, la toux, l'insomnie, les angoisses). Elle nettoie l'organisme et fait tomber la fièvre, resserre les tissus et prépare la guérison des plaies ou des infections.
[Ajout de La Médecine druidique (1990 nouvelle édition identique 1997) du même auteur] : Elle est indiquée contre les maladies du foie (jaunisse), de la rate (congestion) et des reins (diurétique), les affections fébriles, la faiblesse générale, les règles douloureuses et irrégulières.
En décoction légère : 50 g de plante séchée pour un litre d'eau ; tremper à froid pendant dix à quinze minutes ; chauffer et faire bouillir seulement quelques secondes ; laisser infuser dix minutes, 3 ou 4 tasses par jour.
La même décoction, en un peu plus corsée, peut s'appliquer en compresses pour nettoyer et cicatriser les plaies et les ulcères ; elle est indiquée en gargarismes contre les maux de gorge ; badigeonnée sur le front et les tempes, elle calme les maux de tête.
Cataplasmes de verveine : prendre deux grosses poignées de plante fraîche écrasée que l'on fera bouillir seulement quelques secondes dans le minimum de vinaigre de vin. Appliqués le plus chaud possible, ces cataplasmes sont couramment utilisés à la campagne en cas de lumbago et de points de côté douloureux."
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Mythologie :
D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),
VERVEINE. — Herbe propice et sacrée pour les Romains, presque autant que le Kûça et la Tulasî pour les Indiens ; on l’appelait herbe sacrée ou hiérobotane, mais elle était, sans doute, autre que la verveine de nos jardins. Les anciens l’appelaient encore larmes d’Isis, larmes de Junon, sang de Mercure, Persephonion, Demetria, Cerealis. Celui qui possédait un brin de gazon avec de la verveine devenait invulnérable. Elle était le symbole de la propriété agricole et de la paix : les ambassadeurs de paix s’appelaient verbenarii, parce qu’ils se présentaient devant l’adversaire avec une branche de verveine à la main. On attribuait surtout des propriétés merveilleuses à la Verbena Herculea (cf. Dioseoride, IV, 33). Macer Floridus, De Viribus Herbarum, est le premier à douter de la réalité d’un grand nombre de propriétés attribuées à la verveine :
Verbenam lerobotanum peristereonque
Appellant Graeci . . . . . . . . . . . . . . . .
Occurrit cunctis cum vino sumpta venenis.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Illius in vino si sit decoctio facta,
Convivas hilares inter convivia sparsa
Reddere narratur, ut jam præscripta buglossa.
Hanc herbam gestando manu si quaeris ab aegro :
Dic, frater, quid agis ? bene, si responderit aeger,
Vivet : si vero male, spes est nulla salutis.
Ex hac compositam quidam jussere coronam
Apponi capiti causa quacumque dolenti.
Sic dicunt illam celerem conferre medelam.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Non modicum laudate Mogos hanc asseirit herbam
Plinius, hanc cunctis dicunt obsistere morbis,
Et quod quisque pulet hac impetrare perunctum ;
Sic et amicitias capteri posse polentum
Et pelli febres, et plurima talia fingunt
Quae, quamvis natura potens concedere posset,
Vana tamen nobis et anilia jure videntur.
Piperno (De Magicis Affectibus, Napoli, 1635), citant l’autorité de Savonarole, dit que « verbena manducata non permittit per septem dies coitum ». On la considérait donc comme une herbe pure et purificatrice, qui exigeait la chasteté. En Sicile, contre le polype, on adresse à sainte Lucie la prière suivante :
Zittu, Lticiki, non lacrimari,
Scinni ni lu me ortu (descends dans mon jardin)
Scippa pampini di brivina e finocchiu
(Cueille des feuilles de verveine et fenouil)
Ccu li to mano la chiantasti (tu l’as plantée),
Ceu li to pedi la scarpisast (tu l’as foulée) ;
La testa di lu purpu (polype) cci scacciasti,
S’iddu è sangu sfissira (se fondra)
S’iddu è purpu à mori va.
L’exorciseur fait alors trois signes de croix sur le polype, avec un quartier d’ail. On l’emploie aussi en Sicile contre l’opthalmie, en récitant la formule que voici :
Santa Lucia,
Supra un murmuru chi ciancia (qui pleurait)
Vinni a passari nostru Signuri Gesù Cristu.
— Chi hai, Lucia, chi chianci ?
— Chi vogghiu aviri, patri maistusu ?
M’ha calatu ’na resca all’ occhi ?
Nun pozzu vidiri nè guardari.
— Va a lu me’ giardinu,
Pigghia birbina e finocchi ;
Cu li me manu li chiantà,
Cu li me bucca li imbivirà,
Cu li me pedi li scarpiccià ;
Si è frasca, va a lu boscu,
Si à petra, vaci a mari,
Si è sangu, squagghirà.
Dans certaines parties du Piémont, le peuple croit qu’en se frottant la paume de la main, au coucher du soleil, avec de la verveine, on était sûr d’être aimé par la personne dont on touchait ensuite la main.
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Dans Le Folk-Lore de la France, tome troisième, la Faune et la Flore (E. Guilmoto Éditeur, 1906) Paul Sébillot recense nombre de légendes populaires :
Les plantes qui constituent une protection contre l'orage sont assez nombreuses : tantôt elles sont efficaces par elles-mêmes, tantôt on croit que leur vertu est augmentée par une cérémonie religieuse. Il semble toutefois qu'elle est intervenue, surtout au début, pour christianiser une antique observance païenne. [...] En n Wallonie, des fleurs de camomille. [...] La présence seule de quelques herbes, cueillies lors de cette fête (la Saint-Jean), préserve du tonnerre telles sont en Normandie la verveine, dans le pays de Caux le bouquet de marguerites de la Saint-Jean.
[...] Quelques croyances bordelaises sont en relation avec le milieu même du jour Saint-Jean. [...] Un pied de verveine sauvage, que l'on a cueilli soi-même, et planté dans un pot, constitue pour l'appartement porte-bonheur ; si on désire ardemment se réconcilier, avec une personne avec laquelle on est fâché, il faut s'agenouiller devant cette plante, lui adresser une fervente prière et ce vœu sera exaucé. Mais il est nécessaire que ce pied ait été cueilli à midi sonnant, qu'on ait récité cinq Pater et cinq Ave en le déracinant, qu'il ait été transplanté immédiatement.
[...] Dans la Suisse romande pour être à l'abri de toute mauvaise rencontre en voyage, on met de la verveine dans ses souliers, et pour éviter la fatigue ou en place dans ses jarretières.
[...] Dans le Morvan les vieilles femmes observent exactement pendant la journée les lieux où croit la verveine, et vont la cueillir au clair de la pleine lune de mai, en marchant à reculons. Les feuilles de cette plante, appelée herbe d'efforts étaient appliquées en cataplasmes sur les reins.
Tony Goupil, dans un article intitulé "Croyances phytoreligieuses et phytomythologiques : plantes des dieux et herbes mythologiques" (Revue électronique annuelle de la Société botanique du Centre-Ouest - Evaxiana n°3 - 2016), cherche à déterminer les plantes associées par leur dénomination aux divinités antiques :
La verveine (Verbana officinalis), herbe sacrée qui était censée chasser le démon, possède de nombreux noms gréco-latins et se trouve associée à plusieurs divinités. On l’a nommée tour à tour Herculanea (la verveine fait partie des « herbes d’Héraclès » au même titre que l’achillée millefeuille ou la scrofulaire), Persephonion. On la nomme encore « sang de Mercure » ou « larmes de Junon ». John Gérard, célèbre botaniste anglais de la Renaissance, mentionne ces noms dans son Histoire des plantes (je cite ses propos « Juno’s teares », « Mercuries moist Bloud »). L’allusion au sang de Mercure est probablement due à ses propriétés vulnéraires et emménagogues.
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Littérature :
La Marjolaine et le Verveine
La marjolaine et la verveine
La marjoveine et la verlaine
La verjolaine et la marveine
Chez Catherine ma marraine
On fait son lit de marjolaine
Et de verveine.
Robert Desnos, "La marjolaine et la Verveine" in Chantefables et chantefleurs, 1951.
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