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Le Bolet de Satan

Dernière mise à jour : 12 mai



Étymologie :


  • BOLET, subst. masc.

Étymol. et Hist. Début xive s. (Gloss. Lat.-G., B.N.L., 7692 dans Gdf. Compl. : Boletus, boulet) ; 1505 bolet (Platine de honneste volupté, f°90 v°, ibid.). Empr. du lat. impérial boletus, attesté dans la plupart des cas au plur., dep. Sénèque, Nat., 4, 13, 10 dans TLL s.v. 2066, 72 ; v. André, Bot. s.v.


  • SATAN, subst. masc.

Étymol. et Hist. 1. Fin xe s. Satanas « Satan, l'esprit du mal » (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 489 : lo Satanas) ; ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 1268 : l'anme de lui en portet Sathanas) ; ca 1125 Sathan (Grant mal fist Adam, éd. W. Suchier, 1 : le Sathan) ; mil. xiie s. (Jeu Adam, éd. W. Noomen, 1356 : a Satan) ; 2. ca 1130 Satenas fig. « personne méchante » (Gormont et Isembart, éd. A. Bayot, 507 : le Satenas) ; ca 1175 satan (Chronique Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 17267 : un satan). Empr. au lat. chrét. Satan (A.T.), Satanas (N.T.) « Satan, l'esprit du mal », gr. Σ α τ α ̃ ν (A.T.), Σ α τ α ν α ̃ ς (N.T.), empr. à l'hébr. biblique śāṭān « adversaire, accusateur ; Satan ».


Lire aussi les définitions de bolet et de satan pour amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : (Boletus satanas) - Rubroboletus satanas - Bolet Satan - Cèpe diabolique - Cèpe du Diable - Satan -

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Mycologie :


Dans son Atlas des champignons comestibles et vénéneux de la France et des pays circonvoisins. (Doin Éditeurs, 1888) Charles Richon nous propose une description du Bolet du Diable :


Chapeau convexe, glabre, à peine visqueux par l'humidité, d'un brun jaunâtre pâle ; stipe bulbiforme, renflé à la base et aminci au sommet, teint d'une couleur jaunâtre sur laquelle se détache un réseau purpurin plus ou moins accentué ; hyménium presque libre, composé de tubes jaunes à pores petits , ronds, d'un rouge pourpre ; spores jaunâtres, oblongues -allongées, apiculées.


Chair blanchâtre, rougissant ou se violaçant au moment de la coupe.

Odeur nulle, mais saveur douceâtre, non amère.

Été, automne.

Dans les bois ombragés, les forêts.

Espèce vénéneuse.


Cordier dit dit que ce Champignon est extrêmement vénéneux , el que Lenz a éprouvé sur lui-même ses qualités malfaisantes. M. Quélet le regarde aussi comme vénéneux, l'ingestion d'un fragment de la grosseur d'une noix ayant causé des maux de tête, des vomissements, des gastralgies. On ne saurait donc trop se mettre en garde de le récolter au lieu et place des Cèpes d'été et d'automne. Certains empoisonnements causés par des préparations de ces deux Champignons dont l'innocuité est certaine, doivent être attribués en partie à l'introduction inconsciente du Cèpe du Diable dans ces préparations.

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Selon Marcel Bournérias et Christan Bock, dans Le Génie végétal (1992), on trouve plusieurs espèces de bolets en symbiose avec le mélèze.


Même s'ils ne précisent pas lesquels, cette association a des implications symboliques évidentes quand on connaît le rôle joué par le mélèze dans les populations sibériennes. Les auteurs expliquent le fonctionnement de cette symbiose : "Les terminaisons des racines de ces arbres, comme de la plupart des essences forestières, ont un aspect très particulier : leurs fines ramifications, au lieu d'êtres munies de leur habituel manchon de poils absorbants, apparaissent déformées, prenant par exemple l'aspect de grappes ou de branches de corail. L'étude au microscope de ces racines déformées montre qu'elles sont entourées d'un épais feutrage de mycélium de Champignon, qui envoie des filaments au sein même de la racine : cette association est qualifiée de mycorhize. [...] Leur étude scientifique, notamment à l'aide de substances marquées, montre que le mycélium des Champignons mycorhiziens est capable de drainer à partir d'un volume considérable de sol, et à grande distance, l'eau et les ions minéraux : nitrates, phosphates, potassium... et de les transporter sélectivement jusqu'aux racines des arbres. Il intervient de manière particulièrement efficace dans la nutrition de la plante en phosphore, élément très peu mobile dans le sol et souvent en facteur limitant de la croissance végétale. Les mycorhizes se comportent ainsi comme des "rabatteurs" ou des "intermédiaires précieux" (Boullard) entre le sol et l'arbre, particulièrement utiles dans les milieux secs.

En revanche, les Champignons, naturellement hétérotrophes, doivent obtenir de l'arbre, végétal chlorophyllien, les substances organiques (notamment les sucres) qu'ils sont incapables de synthétiser."

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Fiche extraite de la thèse de Nicolas FELGEIROLLES soutenue le 2 Juillet 2018 à Montpellier et intitulée La Mycologie dans le bassin alésien ; enquête auprès des pharmaciens d'officine et solutions apportées pour consolider leurs compétences sur les champignons :


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Lyra Ceoltoir autrice d'un magnifique Grimoire de Magie forestière (Alliance magique Éditions, 2021) décrit le Bolet de Satan de la manière suivante :


Voilà un champignon bien étrange, atypique en tous points. Un gros chapeau d'un blanc grisâtre, un énorme pied amplement sillonné de rouge flamboyant tel un panneau « stop », des spores tout aussi écarlates... Tout en lui fleure l'étrange et le danger. La rareté, aussi, car il ne se rencontre pas facilement, comme s'il souhaitait se faire désirer. Et la sournoiserie, car il est l'un des rares toxiques violents au sein d'une famille généralement inoffensive qui compte parmi ses membres certains des plus délectables et recherchés comestibles qui soient. Après tout, le diable se cache dans les détails, n'est-ce pas ?


Vie de champignon : On se doute aisément qu'avec un nom comme celui-là le Bolet Satan peut difficilement être un sympathique ajout à une omelette forestière. Il est le plus grand bolet d'Europe, arborant un chapeau blanc (virant au gris verdâtre avec l'âge) qui atteint allègrement une trentaine de centimètres de diamètre, et l'un des plus gros pieds dans le monde des champignons (de 4 à 10 centimètres de diamètre pour 5 à 8 centimètres de haut), tellement dodu qu'il en paraît parfois sphérique. Ce dernier est de couleur crème ou jaune soufré, parsemé de veines d'un rouge intense qui le recouvrent parfois presque totalement. Étonnamment, sa chair est blanche et bleuit légèrement quand on la coupe, en dégageant une odeur écœurante désagréable, qui n'encourage pas à le consommer. Heureusement, car il est assez toxique (1), et de toute façon plutôt mauvais en bouche !

Les chanceux le découvriront dans les zones méridionales chaudes et ensoleillées dès le mois de juin, et ce, jusqu'au début de l'automne, de préférence sous les hêtres, les charmes ou encore les chênes, mais pas trop à l'ombre : il préfère pousser dans l'herbe en lisière des forêts ou au bord des chemins plutôt que sous les frondaisons épaisses. Monsieur le Diable aime la chaleur, après tout.

Il commence son existence blanc comme neige, sous la forme d'une petite boule dodue qui s'étale peu à peu en déployant son ample chapeau. Dans sa famille, il est d'ailleurs le seul à présenter un chapeau blanchâtre qui ne comporte aucune nuance rosée, malgré le rouge de ses spores et de son pied. Il n'y a donc pratiquement aucun risque de le confonde avec un autre, le Bolet Satan est unique en son genre ! Pour cette raison, il jouit depuis 2014 d'un genre rien qu'à lui, qui le distingue des autres Bolets.

C'est sans doute ce caractère inhabituel et sa toxicité parmi une famille globalement comestible qui ont contribué à ce qu'on l'affuble de ce sinistre surnom. S'il ne met pas vraiment en danger la vie de celui qui le consomme, il reste un traître, un sournois, un démon parmi les champignons, un diable des sous-bois. « Satan », en hébreu, en arabe et en araméen, signifie « ennemi » ou « adversaire ». Nous voilà donc face à la menace qui plane, au mal à combattre, à l'obstacle qui se dresse sur le chemin, à celui qui se rebelle, s'oppose, complote et se fait la voix discordante au sein d'une belle harmonie.


Note : 1) Sans que ce la ne soit mortel, consommer du Bolet Satan, même cuit, entraînera suffisamment de désagréments digestifs violents pour dissuader l'intrépide goûteur de recommencer ! Heureusement, l'empoisonnement est généralement court, survenant un quart d'heure à deux heures en moyenne après l'ingestion, et dure de vingt-quatre à quarante-huit heures. Il nécessite uniquement un traitement symptomatique pour soulager les vomissements, la diarrhée et éviter la déshydratation qui peut être sévère), mais ne doit pas pour autant être sous-estimé.

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Usages traditionnels :


Selon Suzanne Amiguès, autrice d'un article intitulé "Quelques légumes de disette chez Aristophane et Plutarque." (In : Journal des savants, 1988, n° pp. 157-17) :


Il existe en effet de nombreuses plantes à toxicité réellement variable ou neutralisée par l'accoutumance due aux habitudes alimentaires de certains consommateurs.


Note : Plusieurs espèces de champignons vénéneux ont donné lieu à des constatations analogues. Cf. H. Romagnesi, Petit atlas des champignons, Paris (Bordas), 1962, p. 280, pour le Bolet satan (Boletus satanas Bull.) : « C'est le seul Bolet vraiment vénéneux, mais il ne cause que des gastroentérites, et encore certaines personnes habituées à manger beaucoup de champignons le mangent-elles sans inconvénient »

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Symbolisme :


Carole Chauvin-Payan, dans son article intitulé "Le champignon : désignations dialectales et traditions populaires sur le territoire français" (Sémantica, 2004) précise le sens du mot bolet :


Le terme latin BOLETUS est dérivé du terme grec bôlos désignant une motte ou une boule. Cette désignation se rapporterait à la forme arrondie du chapeau des champignons de la famille des Bolétacées. Dans l'AFL, les formes dialectales correspondant au terme français bolet apparaissent de façon sporadique à l'est du domaine d'oïl. Utilisée comme générique, la forme dialectale [bola] est attestée dans les Vosges. En domaine franco-provençal, la forme [bulw'a:e] est utilisée dans l'Ain. La désignation [bola] est attestée en Savoie. Lorsqu'on parle de champignon en général, on utilise le terme bolâ à Albertville, Beaufort et Gruffy, boliè dans la vallée de Boëge, bolê dans les vallées de Biot, Lullin, Thônes et Crest-Voland. [...] Si l'on consulte l'atlas linguistique de Provence, on peut lire sur la carte Bolet le commentaire suivant : « Dans de nombreux cas, le terme bolet [bule], [bure] est le terme générique désignant tous les champignons. » [...]


La dangerosité du champignon peut être évoquée par une désignation liée à la maladie. Ainsi en Languedoc, le bolet de Satan est désignée par les formes dialectales suivantes : "cèpe fou" et "bolet fou". Les termes cèpe et bolet se comportant comme des génériques, il faut comprendre les désignations "cèpe fou" et "bolet fou" comme "champignon fou". Dans la même région, le bolet de Satan est nommé par une désignation faisant intervenir la mort. Ainsi les formes "masso-poren" et "masso-porés" (masso pouvant venir du latin mactare, tuer et de poren/pore, paroi (latin populaire) paretem ou "parents" parentes) peuvent signifier qui "tue-(les)-parents" ou qui "tue-(les)-parois".

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Dans son Grimoire de Magie forestière (Alliance magique Éditions, 2021) Lyra Ceoltoir rend compte de son expérience magique avec les champignons :


Dans le chaudron : On se doute qu'avec une telle aura, le Bolet Satan est un champignon chtonien, qui trouve aisément sa place dans les pratiques de magie dite « noire » ; autrement dit, dans ce qui appartient aux pratiques de l'ombre, des Voies de la Main Gauche, de la magie offensive (attaques psychiques, bannissements irrévocables, voults (1), envoûtement, etc.) De là à dire qu'il est maléfique, il y a un fossé que nous ne franchirons pas. Nous nous contenterons de rappeler que nulle magie n'est jamais « toute bonne » ou « toute mauvaise » ; elle est uniquement une force que l'on influence par notre volonté.

Si vous souhaitez explorer votre part d'ombre, votre moi caché, refoulé, qui ne se plie pas facilement aux convenances et rêve de briser des chaînes pour se révolter avec perte et fracas, voilà un champignon qui pourra vous aider. Si l'on lie Satan à Lucifer, littéralement le « porteur de Lumière » en latin, le Bolet Satan peut également aider à discerner la vérité en plein cœur des mensonges, des tromperies et des ténèbres, même la plus douloureuse.

En raison de la crainte qu'inspire naturellement le personnage de Satan, ce champignon permet également de travailler sur les peurs. Son association avec les mondes infernaux lui donne de même la capacité d'aider à entrer en communication avec les entités des mondes dits « du dessous » ; une entreprise qui ne devrait être motivée que par la plus absolue nécessité, quand toutes les autres solutions auront échoué ou se seront avérées inutiles Passer un pacte avec le Satan des champignons n'a en effet rien d'anodin, et s'y jeter tête baissée est souvent un acte que l'on peut regretter après coup, quand on atteint le point de non-retour. Prudence, donc. Sa rareté a peut-être pour objectif de nous dissuader de l'utiliser à outrance...


Le Message de l'Autre Monde : « Je suis l'ombre. L'autre. L'adversaire. Le côté pile de la pièce dont tu contemples le côté face. L'obscurité qui s'abat quand tu éteins la lumière. L'envers du décor. Cependant, ne mélangeons pas tout. Je ne suis pas le Mal. Je suis plutôt ce qui, mal utilisé, peut permettre au Mal d'exister. En réalité,, comme bien d'autres choses, comme ma compagne la Mort, ma sœur la Peur, mon voisin le Chagrin, je ne suis ni bon ni mauvais. Je suis, c'est tout. Me nier ne me fera pas disparaître. Au contraire, jouer avec ceux qui cherchent à me remiser dans un recoin m'amuse beaucoup. Car j'ai le sens de l'humour, même si, généralement, il ne fait rire que moi. N'essaie pas de te frotter à moi sans raison : si j'aide volontiers ceux qui m'abordent avec le respect et la révérence que je mérite, je suis implacable et impitoyable avec les ignorants et les orgueilleux. A tes risques et périls. »


Sortilège : Hommage à l'ombre : Un travail sur l'humilité

Vous ne trouverez sans doute pas de Bolet Satan dans vos forêts, à moins de vivre dans le Sud. Et encore, notre ami se raréfie, hélas !, de plus en plus d'années en années ! Vous pouvez donc entreprendre ce petit rituel à l'aide d'un image de ce champignon (ou de la carte de L'Oracle de la Magie Forestière si vous le possédez !) en lieu et place du champignon.

Commencez par noter sur votre journal ou une feuille de papier tout ce qui représente l'ombre pour vous : est-ce juste l'obscurité ? Les secrets ? Les choses cachées ? La menace ? Le mensonge ? Ou, au contraire, un espace de néant créatif où vous sentez un potentiel pulser ? Que vous inspire-t-elle ? Peur ? Incompréhension ? Répulsion ? Fascination ? Sérénité ? L'avez-vous déjà explorée ? Si oui, comment ? Dans quel but ? Si non, cela vous tente-t-il ? Pourquoi ?

Quelles que soient vos réponses, rendez hommage à l'existence de l'ombre en lui montrant votre respect. Il n'existe ni de bonnes ni de mauvaises réponses, et personne n'a raison ni tort à ce sujet, c'est ce qui le rend aussi complexe et difficile à aborder. Après avoir rassemblé une bougie de la couleur que vous associez à votre personnalité profonde (et de quoi l'allumer), votre image du Bolet Satan et un morceau de ficelle naturelle, asseyez-vous en tailleur au centre d'une pièce plongée dans l'obscurité. Même si vous n'aimez pas cela, prenez un instant pour vous imprégner de l'absence de lumière, en vous autorisant à ressentir tout ce que cela vous inspire, y compris de sentiments dits « négatifs » comme la peur ou l'appréhension. Quand vous vous sentez prêt (ou que l'obscurité vous pèse trop), allumez votre bougie et contemplez le Bolet Satan à sa lumière. Appréciez ses couleurs, sa forme, imaginez sa texture. Voyez comme il est beau, étrange, songez au paradoxe de son amour pour la chaleur et le soleil malgré ses sombres attributions. Car l'ombre n'est rien sans la lumière, et la lumière n'est rien sans l'ombre. Toutes deux ont besoin l'une de l'autre pour exister, telle est la clef de l'équilibre et de l'unité. Adressez vos respects :

« Ombre et lumière, noir et blanc,

Pile et face, Bolet Satan.

Chapeau pâle, pied cramoisi,

Cycle éternel, de mort et vie.

Sois honorée, obscurité.

Lumière, sois remerciée.

Jumelles liées par le temps et l'espace,

Qui maintenez caque chose à sa place. »


Prenez un instant pour songer aux concepts jumeaux que vous venez d'évoquer, remerciez les forces en présence et songez avec humilité à vos perceptions personnelles. Il ne s'agit pas de vous juger, mais d'accepter de remettre en question ce qui doit l'être. Quand vous êtes prêt, mouchez la bougie, rallumez la lumière et ancrez-vous.

Chaque soir (ou chaque matin, selon vos préférences), et ce, pendant un mois, notez sur votre journal ou une feuille de papier une chose agréable et une chose désagréable qui vous sont arrivées dans la journée, (une source de gratitude, une déception, une joie, un chagrin...) sans vous juger ni vous imposer de filtre. Relisez votre liste à la fin du mois et voyez comme l'équilibre n'est permis que par la présence de ces deux éléments quotidiens.


Note : 1) Charme magique, en général destiné à nuire, souvent sous la forme d'un objet chargé que l'on dépose chez la cible du sortilège.

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Antoinette Charbonnel et Lyra Ceoltoir, autrices de L'Oracle de la Magie forestière (Éditions Arcana sacra, 2021) nous en apprennent davantage sur la dimension magique du Bolet Satan (Boletus satanas) :


Mots-clés : Obstacle - Épreuve - Adversité - Retard - Contrariété - Frustration - Imprévu - Angoisse - Doutes - Manque de confiance en soi - Ennemi intérieur.


Promenons-nous dans les bois : Ce sinistre nom cache le plus grand Bolet d'Europe, aussi rare qu'étrange. Son chapeau est blanc (virant au gris verdâtre avec l'âge)avec des tubes rouge orangé sur un gros pied dodu d'un rouge sang profond. Sa chair blanchâtre, qui bleuit légèrement lorsqu'on la coupe, dégage une odeur désagréable, écœurante qui nous aiguille : pas question de le consommer, il est toxique !


Cette situation au sein d'une famille réputée pour ses bons comestibles l'a très tôt fait regarder d'un mauvais œil, à tel point qu'il est devenu le traître, le diable des champignons. Le nom de Satan signifie effectivement « ennemi » et « adversaire », en hébreu, en grec, en arabe et en araméen. Lourd programme pour un champignon...

Chtonien, il est utilisé en Magie dite « noire », c'est-à-dire pour tout ce qui touche à la sorcellerie de l'Ombre, les voies de la Main Gauche, les bannissements irrévocables, les attaques psychiques, la magie offensive, l'exploration de sa part d'Ombre, la découverte de la vérité au sein des ténèbres, les peurs et la communication avec les entités des mondes dits « du dessous ». Qui s'y frotte s'y pique, travailler avec le Bolet Satan est une voie risquée et difficile, qui ne devrait être empruntée qu'en cas d'absolue nécessité, quand toute s les autres options ont été essayées sans succès. Ce qu'un Bolet Satan fait ne peut être défait, il est donc le point de non-retour que l'on regrette parfois après coup.


L'Oracle du champignon : Dans un tirage, il indique que quelque chose se dresse en travers de votre chemin et vous empêche d'avancer. Ce peut être une cause extérieure (un opposant, un obstacle, un imprévu...) ou intérieure (des doutes, des peurs, des complexes...) : étudiez bien les cartes environnantes pour déterminer ce qu'il en est.

Vous allez devoir vous battre et faire preuve d'astuce et d'adaptabilité pour surmonter cet obstacle. peut-être devriez-vous chercher une stratégie plus appropriée pour avancer en abattant l'opposition, en changeant votre vision des choses. Car vous ne pourrez pas parvenir à vos fins en continuant sur votre lancée : il vous faut changer votre fusil d'épaule si vous voulez atteindre vos objectifs.

Prenez ce retard et cette épreuve comme une leçon d'adaptabilité qui vous permettra d'observer les choses sous un autre angle et d'explorer des facettes encore inconnues de votre personnalité en puisant dans des ressources insoupçonnées. Certes, vos projets seront retardés, et cette lutte risque d'être fatigante et éprouvante, amis vous en sortirez grandi !

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Littérature :


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Dans L'Armée furieuse (Éditions Viviane Hamy, 2011) de Fred Vargas, le commissaire Adamsberg est confronté à une légende ancestrale qui terrifie les habitants d'un village de Normandie :

"- Ça dépend comme on la voit. A Ordebec, il y en a qui pensent que le Seigneur Hellequin est au service du démon. Moi je ne crois pas trop, mais si des gens peuvent survivre parce qu'ils sont saints, comme saint Antoine, pourquoi d'autres ne survivraient pas parce qu'il sont mauvais ? Parce que dans la Mesnie, c'est tous des mauvais. Vous le savez, cela ?

- Oui.

- Et c'est pour cela qu'ils sont saisis. D'autres pensent que la pauvre Lina a des visions, que sa tête est malade. Elle a vu des médecins, mais ils ne lui ont rien trouvé. D'autres disent que son frère met des bolets Satan dans l'omelette aux champignons et que le bolet lui donne des hallucinations. Vous connaissez le bolet Satan, je suppose. Le pied rouge.

- Oui.

- Ah bien, dit Léone, un peu déçue.

- Ça ne donne qu'un sérieux mal de ventre.

Léone emporta les assiettes dans la petite cuisine sombre et fit la vaisselle en silence, concentrée sur sa tâche. Adamsberg essuyait au fur et à mesure."

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Arts visuels :


Dans Le Chariot de foin, (panneau central d'un triptyque) Jérôme Bosch place un Bolet de Satan comme gardien de la grotte du Diable (à droite du tableau en haut du deuxième tiers.


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