Étymologie :
GLYCINE, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1744 (Linné Syst. Nat.). Dér. savant du grec γ λ υ κ υ ́ ς « doux » ; suff. -ine*.
Lire également la définition du nom "glycine" afin d'amorcer la réflexion symbolique.
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Botanique :
Dans Les Langages secrets de la nature (Éditions Fayard, 1996), Jean-Marie Pelt s'intéresse à la communication chez les animaux et chez les plantes, et en particulier à la toxicité des poisons qu'ils produisent :
Cette splendide glycine sauvage d'Afrique aux grandes grappes de couleur blanche (Mucuna) est particulièrement cruelle pour l'infortuné qui s'en approcherait sans de multiples précautions Le calice des fleurs est en effet revêtu d'une multitude de minuscules poils roux, extraordinairement urticants et auprès desquels nos modestes orties ne sont qu'un aimable divertissement. Pour en avoir cueilli imprudemment un bouquet, je me trouvai trois jours durant victime de violentes brûlures, l'épiderme porté au rouge coquelicot. Dans la mesure où ces poils minuscules se fixent sur la peau et dans les vêtements, poursuivant ainsi fort longtemps leur action délétère, il est difficile de se débarrasser de l'action pernicieuse de ces fleurs, même lorsqu'elles ont été détachées de la plante-mère. Quand on rappellera que les graines de mucuna, sans doute hallucinogènes, contiennent aussi une substance utilisée aujourd'hui dans le traitement de la maladie de Parkinson, on conviendra que cette plante a une manière bien à elle de conjuguer le bien et le mal.
Symbolisme :
Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :
Glycine - Votre amitié est douce et agréable.
C'est une des plus jolies plantes grimpantes, qui sont toutes un emblème des liens de l’amitié.
Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :
Glycine - Votre amitié est douce et précieuse.
Comme presque toutes les plantes grimpantes, la glycine est un emblème de l'amitié réciproque : elle a besoin d'appui et se plaît à entourer de son vert et beau feuillage les arbres et les murs de son voisinage et à les couvrir de ses magnifiques grappes bleu lilacé. En Chine et au Japon, cette plante a été l'inspiratrice du poète. Elle prépare les réconciliations, et celui qui trouve attachée à sa porte une branche de glycine, court chez son ennemi, le remercie de son initiative, lui tend les bras, et les griefs réciproques sont oubliés.
Selon Des Mots et des fleurs, Secrets du langage des fleurs de Zeineb Bauer (Éditions Flammarion, 2000) :
"Mots-clefs : La tendresse ; L'amitié.
Savez-vous ? : La glycine est apparue en France vers la moitié du XIXe siècle et devint un thème favori de l'Art Nouveau. C'est seulement vers les années 1900 qu'elle sera la fleur préférée de toutes les maisons de villégiature d'Europe. Il arrive que la glycine mette parfois plusieurs années à produire ses belles fleurs mauves en grappes. Elle n'embellit pas moins le seuil de la maison ou les portails.
Légende : Les Romains et les Grecs tenaient beaucoup à cette fleur. Ils en portaient en permanence sur eux quelques rameaux pour attirer et préserver l'amour conjugal.
Message : Vous êtes une douce amie."
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Doreen Virtue et Robert Reeves proposent dans leur ouvrage intitulé Thérapie par les fleurs (Hay / House / Inc., 2013 ; Éditions Exergue, 2014) une approche résolument spirituelle de la Glycine :
Nom botanique : Wisteria spp.
Propriétés énergétiques : Soigne à distance, protège, améliore la concentration et l'énergie, augmente le niveau de spiritualité, aide à prendre des décisions et combat la procrastination.
Archanges correspondants : Jérémiel et Michael.
Chakras correspondants : chakra du troisième œil ; chakra coronal.
Propriétés curatives : Servez-vous de la glycine pour faire un travail à distance, notamment pour soigner. Cette plante vous aide à progresser sur le chemin de votre évolution spirituelle. Elle vous permet de garder les idées claires en vous incitant à éviter l'absorption de substances artificielles et de tout ce qui nuit à votre énergie. La glycine contribue également aux prises de décision. Si vous êtes dans un état de confusion, vous risquez de remettre à plus tard et de ne prendre aucune décision. mais la glycine est là pour vous guider et vous aider à choisir le bon chemin dans toutes les circonstances.
Message de la Glycine : « Je vous guide à chacun des pas qui vous font gravie l'échelle de la spiritualité et du développement personnel. J 'éliminerai tous les doutes et toutes les peurs. Chacune de vos décisions vous permettra de vous épanouir en une version encore plus belle de vous-même. Vous posséderez une meilleure énergie et une vitalité pure. Je vous aiderai à prendre contact avec ceux dont vous êtes séparé. Je transmettrai vos souhaits et vos pensées positives en leur faisant traverser les barrières du temps e de l'espace. Sachez que vous êtes aussi proche de ces personnes que vous ne l'avez jamais été. »
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Littérature :
L’Églantine, l’Aubépine et la Glycine
Églantine, aubépine,
Rouge, rouge, rouge et blanc.
Glycine,
L’oiseau vole en chantant.
Églantine, aubépine,
Bouge, bouge, bouge et vlan !
Glycine,
L’oiseau vole en chantant.
Et vlan, vlan, vlan !
Robert Desnos, "L’Églantine, l’Aubépine et la Glycine" in Chantefables et Chantefleurs, 1952.
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Régine Detambel consacre un ouvrage à Colette. Comme une flore, comme un zoo (Éditions Stock, 1997) dans lequel elle s'intéresse aux métaphores botaniques et zoologiques :
L'esprit reptilien des Glycines
« Mon voisin fut, il y a deux mois, jaloux de mon faux-ébénier jaune, puis de ma glycine, puissante déjà en son jeune âge et qui jette, du mur du tilleul, du tilleul aux rosiers grimpants, son serpent tors dégouttant de grappes mauves et lourd d'odeurs. » Le Voyage égoïste
La glycine est à la fois ophidienne et herculéenne. Pour ces caractères redoutables, elle est probablement la plante préférée de Colette. La violence lente, la puissance formidable, l'appel constant aux comparaisons reptiliennes font des citations recueillies une espèce de livre de mythes, énumérant les méfaits d'une plante tout droit sortie d'un manuel de botanique imaginaire. On pourrait même lire les commentaires de Colette sur cette « glycine énorme [tordant] ses spires vivantes » comme des légendes rappelant des forfaits de Tarasque ou de Graoully.
La musculature de la glycine, au revers de la maison, et son épaisse carapace, en font un ciel pour les humains, un écran sûr et fourni contre les averses, « l'épais plafond de glycines ne laisse pas même passer les pluies d'orage », un lit pour les bêtes, puisque « trois chattes ont dormi dans la glycine creusée en hamac. »
La glycine tue ce qui vit et détruit ce qui est construit : « [Elle rencontra] le chèvrefeuille voisin, le charmant chèvrefeuille mielleux à fleurs rouges. Elle eut l'air d'abord de ne pas le remarquer, puis le suffoqua lentement comme un serpent étouffe un oiseau. »
Elle s'attaque aux constructions comme une plante tâchant, contre les matériaux d'habitation, de reconquérir le domaine vierge de la nature. En révoltée, elle casse les carreaux : « Le bris soudain d'une vitre, m'obligeant à tressaillir, en décida : un bras végétal, coudé, tors, en qui je n'eus pas de peine à reconnaître l'application, le cheminement subreptice, l'esprit reptilien des glycines, venait de frapper, et d'entrer par effraction. » En évadée, elle tord les grilles et arrache les barreaux : « ... la glycine commençait à arracher la grille. Comme il ne pouvait pas être question, dans l'empire de Sido, de tuer une glycine, celle-ci exerça, exerce encore sa force réfléchie. Je l'ai vue soulever, brandir en l'air, hors des mœllons et du mortier, un important métrage de grilles, tordre les barreaux à l'imitation de ses propres flexions végétales, et marquer une préférence pour l'enlacement ophidien d'un tronc et d'un barreau, qu'elle finit par incruster l'un à l'autre. »
Parfois, elle a tout d'une sorcière hors d'âge, aux doigts déformés, et qui marquerait les pierres d’on ne sait quels signes : « Une glycine tordue, très vieille, s'élança au flanc poreux et usé d'une tourelle. »
Colette apprécie une autre Gorgone, la viorne, arbuste à fleurs velues et blanches, à peine moins vorace que sa sœur : « Sur un fond d'or implacable, grimpent avec activité de longues gousses noires entrouvertes, dont les tiges sont filles de la viorne nuisible et du serpent. »
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Dans son roman policier Le Parme convient à Laviolette (Éditions Denoël, 2000), Pierre Magnan nous propose une description personnelle de la glycine, attachée à la nostalgie de son personnage principal en mal d'amour :
"Une amertume nouvelle plissa les commissures des lèvres chez Laviolette. Mais alors il leva les yeux. Il avait parcouru toute la hauteur de l'androne qui le jetait sur cette vision du passé : la glycine de Rogeraine. Elle venait de se dévoiler tout d'un coup au coin de la ruelle dans toute sa longueur, dans toute sa largeur.
Laviolette se trouva nez à nez avec cette cataracte bleue qui l'attendait depuis toujours. La saison déjà tirait à sa fin des floraisons estivales mais la glycine était si énorme, elle était si profondément enfoncée sous la fontaine qui la nourrissait qu'elle fleurissait jusqu'en septembre.
La glycine magnifique n'avait pas pris une ride. Elle était plus opulente encore que vingt-cinq ans auparavant. Elle s'était approprié, elle avait gargotté tout ce qui dépassait de la maison, depuis la toiture florentine jusqu'à cette terrasse où le docteur Gagnon et Rogeraine étaient morts d'amour et de haine, face à face, se contemplant jusqu'au bout, avec entre eux cette bouteille de Château-Latour qu'ils avaient bu jusqu'à la lie.
Laviolette ébloui contemplait cette inflorescence gigantesque, les enchevêtrements des branches retournant sur elles-mêmes, solidement s'étranglant, tentant de s'étouffer l'une l'autre dans leurs enlacements. Quelques abeilles qui s'étaient attardées autour des grappes bleues achevaient de périr sous l'effet du sereine qui leur plombait les ailes.
Laviolette mesura la hauteur de la maison, la hauteur de la glycine. Jadis, il n'avait pas hésité à s'agripper au tronc, puis aux branches, à escalader les douze mètres qui séparaient le pied de la glycine de la terrasse dont il avait franchi la balustrade pour se trouver en présence de ces deux cadavres rigides qui avaient emporté leur secret dans la tombe.
Il eut envie de récidiver, pour voir, et s'il lui prenait un malaise en route et qu'il lâchât prose eh bien tant mieux, ça ferait un couillon de moins. Mais s'il réussissait ? Que dirait-il à ceux qui là-haut prenaient paisiblement le frais et qui verraient surgir cet énergumène déguisé en vieillard avec son panama et son costume de nankin démodé ? Il renonça.
A grand regret, il dit adieu à cette vision de la glycine qu'il laissa derrière lui au coin de la maison. Il continua à gravir l'androne, accompagné en sourdine par une musique qui venait de naître et qu'il connaissait bien. Sisteron en ce juillet-là n'était qu'une symphonie, tous ses habitants étaient sous le charme, et ce que Laviolette commençait d'entendre c'était la Passion selon saint Matthieu qui descendait depuis cette terrasse que camouflait une glycine. [...]
Alors il s'effaça dans l'ombre de la fontaine où la glycine monstrueuse puisait sa force. Il était face à la terrasse de Rogeraine discrètement éclairée. Il pouvait à travers les trous de la frondaison contempler tout ce qui s'y passait et notamment une balancelle de jardin mollement agitée au vent coulis où respirait la glycine dans la fraîcheur de la nuit.
[...]
Comme chaque fois qu'il s'arrêtait d'agir depuis hier au soir, dans sa tête retentissait le pas léger de Lemda parcourant le long corridor de la maison à glycine, là-bas à Sisteron. C'était à chaque fois comme autant de clous qui s'enfonçaient dans ses os. Il voyait la terrasse, avec ses luxuriantes guirlandes de glycine en fête et par le pertuis de cette splendeur mauve la main de Lemda scellée sur celle de son amant.
[...]
Et là-dessus, ils touchent leur képi et ils font mine de s'en aller. Puis ils reviennent. Entre deux doigts y en avait un qui tenait une chose qui avait pas l'air vrai. Je fins par reconnaître une culotte de femme. C'était une culotte bleu nuit toute en fleurs de dentelle. On aurait dit une glycine. Alors là ils nous disent :
"On a l'impression que c'est de ça qu'il est mort, il la tenait dans une main en la serrant contre sa bouche. Ou bien il se mouchait dedans ou bien il l'embrassait.
- Mort d'enthousiasme..., répéta Laviolette."
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