Étymologie : Le terme bistorte signifie étymologiquement ”deux fois tordues” ou ”double torsion” en référence à la forme de sa tige. Il vient du latin bistortus
Autres noms : Bistorta officinalis - Andrelles - Andresse - Bistourte - Bistorte commune - Bistorte officinale - Bouïne - Couleuvrée - Couleuvrine - Faux épinard - Feuillotte - Grande oseille - Herbe d'Hélène (Antiquité grecque) - Langue de bœuf - Langue de veau - Polygone - Renouée bistorte - Renouée des serpents - Serpentaire - Serpentaire rouge -
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Botanique :
On peut remarquer que cette plante figure dans la liste des simples recommandée par Charlemagne comme nous le montre la traduction d'Elisabeth Magnou-Nortier dans son article intitulé « Capitulaire De Villis et curtis imperialibus (vers 810-813) : texte, traduction et commentaire », Revue historique, n°607, juillet-septembre 1998, p. 643-690 :
70. Nous voulons que nos intendants possèdent dans les jardins des plantes de toutes espèces, à savoir : le lis, les roses, le fenugrec, la menthe-coq, la sauge, [...] le glaïeul, la serpentaire, l'anis, les coloquintes [...]
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Planche botanique N°279 de l'Atlas des Plantes de France de Masclef, 1894.
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Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Bistorte :
Propriétés Physiques et Chimiques. — Cette plante tire son nom de la double courbure de sa racine qui est oblongue, courte, comprimée, cannelée. Celle-ci est inodore, d'une saveur acerbe et styptique ; elle contient une grande quantité de tannin, de l'acide gallique, de la fécule et de l'acide oxalique. La décoction est très rouge ; elle précipite les dissolutions de fer et de gélatine.
Usages Médicaux. — La bistorte est un de nos meilleurs astringents indigènes ; outre ses usages médicaux elle a été aussi employée au tannage des cuirs. La farine que contient la racine la rend comestible ; ses feuilles se mangent jeunes comme les épinards. La racine astringente et tonique a été recommandée dans la diarrhée, les flux muqueux, leucorrhée, blennorrhée, dysenterie, incontinence d'urine, hémorragies passives. Elle convient dans le traitement des fièvres intermittentes ; Cutsen l'associait dans ce cas à la racine de gentiane. La décoction ou le vin de bistorte en gargarisme raffermit les gencives, déterge les aphtes et dissipe les engorgements chroniques des amygdales. Cazin propose de l'appliquer, à l'instar de la ratanhia, au traitement des fissures. Cette racine entre dans le diascordium.
Pierre-Joseph Buchoz, médecin de Monsieur et auteur de Etrennes du printemps, aux habitans de la campagne, et aux herboristes, ou pharmacie champêtre, végétale & indigène, à l'usage des pauvres & des habitans de la campagne (Lamy libraire, Paris, 1781) recense les vertus médicinales des plantes :
Racine de Bistorte. On prescrit sa décoction dans les flux & les pertes.
Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :
Parmi les nombreux astringents de la flore indigène, les plus réputés sont les baies de myrtille et le rhizôme de bistorte, Polygonum bistorta, dont la forme bizarrement contournée a toujours vivement excité la curiosité du peuple et lui a valu une réputation bien au-dessus de ses mérites.
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Symbolisme :
Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), la Bistorte (Polygonum bistorta) a les caractéristiques suivantes :
Genre : Féminin
Planète : Saturne
Élément : Terre
Pouvoirs : Pouvoirs psychiques - Fécondité.
Utilisation magique : Quand la transe ou les états médiumniques sont recherchés, c'est le gros rhizome qui est employé, frais ou séché au soleil aussitôt après son arrachage. Une racine séchée artificiellement au four perd les trois quarts de ses propriétés vibratoires 3 et, dans le cas de la Bistorte, on ne peut pas les faire renaître par trempage et réhydratation.
Pour vous mettre dans des états propices à la clairvoyance, aux « voyages psychédéliques », brûlez de la racine de Bistorte avec votre encens préféré. Calfeutrez les issues et inhalez profondément la fumée. A recommander avant une séance de relaxation ou de méditation.
Une infusion de feuilles et sommités fleuries, bouillie le soir de la mort de Jean-Baptiste (21 août) et refroidie toute la nuit sous un rayon de lune, fait une eau bénite d'une puissance rare: on la réserve généralement pour les exorcismes difficiles.
Dans les rites de fécondité, c'est la partie aérienne qui est employée. La femme qui désire enfanter malaxe la plante entre ses mains, puis elle se frotte le ventre et les cuisses avec la botte imprégnée de sucs. Parfois elle dort avec des Bistortes sous sa chemise de nuit.
Les femmes de Greifenberg, en Poméranie, attachaient leur tablier au tronc d'un noyer, puis elles le flagellaient avec des tiges de Bistorte avant de le porter.
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Selon Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani :
Cette plante à fleurs roses, surnommée "couleuvrine" ou "serpentaire" à cause de sa racine épaisse, dur et tordue comme un serpent, exerce son pouvoir sur la fécondité : une femme en mal d'enfant doit malaxe la plante entre ses mains, s'en frotter le ventre et les cuisses ou encore dormir avec des bistortes sus sa chemise de nuit.
Le rhizome de bistorte, frais ou séché au soleil, facilite transes et état médiumnique : "Pour vous mettre dans des états propices à la clairvoyance, aux "voyages psychédéliques", brûlez de la racine de bistorte avec votre encens préféré. Calfeutrez les issues et inhalez profondément la fumée. A recommander avec une séance de relaxation et de méditation.
Enfin, en préparant une infusion de feuilles et de sommités fleuries de bistorte, bouillie le soir de la mort de Jean-Baptiste (21 août) et refroidie une nuit entière sous un rayon de lune, on obtient une eau bénite "d'une puissance rare" qui sera utilisée dans les exorcismes difficiles.
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Roger Tanguy-Derrien, auteur de Rudolph Steiner et Edward Bach sur les traces du savoir druidique... (L'Alpha L'Oméga Éditions, 1998) s'inspire du savoir ancestral pour "récapituler de la manière la plus musclée les informations sur les élixirs" :
Bistorte (Polygonum bistorta) : Recentre l'individu désorienté et lui remet les pieds sur terre. La présence d'acide oxalique dans sa composition suggère que l'âme a accusé une émotion qu'elle n'a pas encore très bien digérée. L'élixir de Bistorte intervient pour remettre de l'ordre dans toutes les parties constituantes de l'homme.
Bistorte signifie deux fois tordus. On pourrait dire aussi deux fois spasmés, tant les énergies de l'Homme semblent dévier par des obstacles dus à des tensions entre l'Homme Émotionnel et l'Homme Énergétique. Deux organes dépendant entièrement de l'Homme Émotionnel : la vésicule biliaire et les reins. C'est précisément à ces endroits là que s'installent des concrétions sous forme de calculs. Les voies de circulation étant obstruées, on conseillera cet élixir pour combattre l'inconvénient de la déviation de la cloison nasale, pour combattre l'inconvénient de la déviation de la cloison nasale, pour combattre l'urétrite, l'énurésie, la leucorrhée, la diarrhée, la dysenterie, l'entérite, la précancérose de l'intestin, la phlébite, les hémorroïdes.
Rappelons que l'une des causes les plus plausibles des hémorroïdes vient d'un disfonctionnement de la veine porte qui manifeste son mécontentement en produisant ces gonflements désagréables. La veine porte est en général perturbée lors d'une contrariété. Nous classerons encore cet organe sous la dépendance de l'Homme Émotionnel.
En outre, cette plante possède 15 à 20% de tanin, de l'amidon, de la vitamine C. tous ces ingrédients vont agir de manière positive sur un terrain tuberculinique. Les spécialistes de médecine chinoise choisiront cet élixir pour traiter l'axe poumon-gros intestin. Et les astrologues l'utiliseront pour traiter deux axes : l'axe Gémeaux-Vierge [il ne s'agit pas d'un axe en astrologie ! l'axe Vierge-Poissons ? ] ; et l'Axe Taureau-Scorpion. pour ce dernier axe, on conseillera l'élixir pour la gingivite, la stomatite, l'inflammation de la bouche et de la gorge, l'angine, les aphtes, les saignements de nez. Ceci concerne l'amont. Et pour l'aval : la métrite, la leucorrhée, les hémorragies utérines. Voilà ce que peut nous apporter cette petite fleur rose en épis (signature uranienne typique) que l'on trouve dans les régions humides de montagne, en moyenne altitude (500 mètres). La bistorte est un des plus puissants astringents du monde végétal. On peut le comparer au célèbre rathania d'Amérique du sud.
Mots-clés : se rapporte au génie de l'esprit planétaire d'Uranus. Car le symbole de ce dernier est le sigle coudé de l'éclair comparable à sa racine bistordue comme un serpentaire (serpent d'air). Car elle contient de l'acide oxalique et ox de oxalique suggère la présence de l'élément oxygène indispensable à toute bonne combustion. Car Polygonum, le nom de la famille dont elle est issue, indique bien les nombreux angles du sigle uranien. On l'appelle aussi la couleuvrine pour suggérer la représentation de la vouivre, l'énergie tellurique montante chère aux Celtes. Enfin, la fleur rose est caractéristique de la couleur de ce génie si discret mais ô combien présent dans le domaine aérien. Les géomètres ne diront pas le contraire !
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Mythologie :
Dans son article intitulé "Un conte étymologique. Hélène et les serpents" In : Journal des savants, 1990, n° 15 pp. 177-198, Suzanne Amigues tente d'identifier les plantes qui se cachent sous la périphrase "Herbe d'Hélène". Elle commence par rappeler la légende puis, après avoir identifié six plantes, elle en vient à celle qui nous intéresse ici :
Toujours est-il que le phytonyme helenium a été rapproché dès l'Antiquité du nom d'Hélène, dans un conte étymologique dont nous avons conservé deux versions assez différentes. L'une d'elles est évoquée incidemment dans Pline, XXI, 59 : Helenium e lacrimis Helenae dicitur natum et ideo in Hélène insula laudatissimum « l'helenium passe pour être né des larmes d'Hélène ; aussi celui de l'île d'Hélénè est-il le plus estimé ». A nous de reconstituer les circonstances de l'anecdote. Au sujet de l'île d'Hélénè (aujourd'hui Makronisi) qui s'étend le long de la côte orientale de l'Attique, en face de Thorikos et de Sounion, Strabon (IX, 1, 22 = C 399) cite l'épisode homérique des amours de Paris et d'Hélène dans l'île de Kranaè (F 443-445), en précisant que le poète « appelle Kranaè l'actuelle Hélène ainsi nommée parce qu'elle fut le théâtre de ces amours ». Mais d'après Euripide, Hélène, 1670-1675, c'est là qu'Hermès déposa Hélène, « l'enlevant à Paris, refusée à ses embrassements ». Des larmes d'Hélène reléguée dans cette île « rocheuse et déserte » (Strabon, ibid.) l'imagination populaire a fait naître l'helenium.
En Égypte également on a donné à helenium le sens d' « herbe d'Hélène », en fondant cette interprétation sur diverses circonstances du séjour de la belle Grecque dans ce pays. Déjà L'Odyssée (S 219-232) avait rendu célèbres les drogues que lui avait offertes Polydamna, l'épouse du roi Thon ; en 412 a.C. l'Hélène d'Euripide représenta l'héroïne en butte aux assiduités de ce roi. Sur ces données légendaires diffusées par la littérature dans tout le monde grec s'est formée, en Égypte même et à une époque que nous essaierons plus loin de préciser, la tradition rapportée par Élien (N.A. IX, 21) :
« Jadis l'île de Pharos (les Égyptiens racontent la légende comme je vais la raconter) était infestée de toutes sortes de serpents. Quand le roi d’Égypte Thonis eut reçu en garde Hélène, la fille de Zeus, (Ménélas la lui avait confiée pendant qu'il parcourait la Haute Égypte et l'Ethiopie) et se fut épris d'elle, il fit violence à Hélène pour la contraindre à des relations amoureuses. D'après la légende, la fille de Zeus raconta l'affaire en détail à l'épouse de Thonis, qui s'appelait Polydamna ; celle-ci, craignant de voir arriver un jour où l'étrangère l'éclipserait par sa beauté, fit mettre Hélène en lieu sûr à Pharos et lui donna une herbe détestée des serpents qui s'y trouvaient : il suffisait aux serpents de la sentir pour disparaître sous terre. Hélène planta cette herbe qui, le moment venu, refleurit et répandit une graine détestée des serpents ; et le fait est qu'une telle engeance n'exista plus à Pharos. Les gens compétents en la matière disent que la plante a été appelée hélénion ».
La glose d'Hésychius n'est qu'un bref résumé de la version d’Élien, augmenté d'une curieuse mention de serpents herbivores : « Hélénion : sorte de plante qu'Hélène, dit-on, sema pour se protéger des serpents, afin qu'ils en mangent et périssent ».
Au contraire, l'Etymologicon Magnum, 328, 16-19, fournit une variante importante : « Héléneion : plante d'Alexandrie. Selon la tradition, elle naquit des larmes d'Hélène quand celle-ci pleura sur Canopos, le pilote de Ménélas, victime d'un serpent hémorrhoïs ».
Cette dernière définition est véritablement synthétique puisque l'hélénion y est dit né des larmes d'Hélène comme dans Pline, à Alexandrie où se situe le conte d'Élien, et lors de la mort de Canopos, évoquée par Nicandre (Thér. 309-315) à propos de l'hémorrhoïs et des effets de son venin. L'originalité de Nicandre par rapport aux témoignages cités plus haut est de ne pas faire mention d'une plante appelée hélénion. Expliquant la reptation maladroite de l'hémorrhoïs par le fait qu'Hélène, dans sa colère, brisa la colonne vertébrale de celui qui avait mordu Canopos {Thér. 316-319), le poète aurait probablement noté, s'il l'avait su, qu'on attribuait aux pleurs d'Hélène l'origine de l'hélénion. Il semble que ce dernier point de la légende se soit développé à Alexandrie entre l'époque de Nicandre (11e siècle a. C.) et celle de Sostratos (deuxième moitié du Ier siècle a. C.) dont le traité Des animaux qui blessent et qui mordent est la source d'Élien pour le passage qui nous intéresse. Il y a en tout cas quelque trois cents ans d'écart entre les premières occurrences du phytonyme hélénion dans les ouvrages botaniques de Théophraste, composés pour l'essentiel au cours de la décennie 320-310, et l'explication qui en était donnée dans le traité de Sostratos, postérieur à 30 a. C. Il faut donc voir là une étymologie populaire tardive et examiner de près la description des plantes appelées hélénion pour essayer de comprendre l'origine et, s'il y a lieu, le sens premier de leur dénomination commune.
[...]
Enfin le Pseudo-Apulée, V, 6, fait de helenium un synonyme de uiperina pour désigner, selon Fraas, Synopsis, p. 230, la renouée bistorte (Polygonum bistorta L.). Cette plante habite les prairies humides et tourbeuses de toute l'Europe tempérée, seulement en montagne dans les régions méditerranéennes ; elle est présente en Italie mais manque à la Grèce. Au nom de uiperina sous lequel Fraas l'a reconnue, correspondent les noms vernaculaires français couleuvrée et serpentaire ; tous font allusion à son rhizome contourné et marqué de replis.
[...]
N'ayant découvert aucun facteur d'unité dans la morphologie des sept espèces considérées, nous en examinerons maintenant les usages et propriétés. Il faut noter au préalable que les anecdotes relatives au séjour d'Hélène en Égypte {cf. supra, p. 178-180) ont toutes un rapport avec les serpents : l'herbe plantée par Hélène à Pharos les fait fuir (Elien) ou périr (Hésychius) ; la mort de Canopos est due à la morsure d'un serpent hémorrhoïs (Nicandre, E.M.). Sous le merveilleux du conte transparaît un fond de vérité : Vhélénion était censé mettre les serpents hors d'état de nuire. Sa plantation dans un lieu infesté de reptiles relève de la magie prophylactique plutôt que d'une technique éprouvée. En effet, quoi qu'en dise Hésychius, aucun serpent ne se repaît d'herbe, et il est douteux qu'une plante exerce sur un animal qui ne la consomme pas une répulsion aussi forte que le prétend Élien d'après Sostratos. Mais les Anciens pensaient que certaines plantes agissaient à distance sur des êtres dangereux et les réduisaient à l'impuissance. [...] De même l'hélénion qui aurait chassé les serpents de Pharos donne à penser que des plantes de ce nom passaient pour alexitères.
Un autre point de la légende mérite attention. Selon Nicandre et l'Etymologicon Magnum, le serpent responsable de la mort de Canopos était un hémorrhoïs. Nicandre décrit cette espèce (Thér. 282-297) avec tant de précision, en dépit de son emphase coutumière, qu'on a pu l'identifier avec une vipère des régions désertiques du Proche-Orient, Echis cannata ou Pseudocerastes fieldi. Comme l'indique son nom grec, cette vipère a un venin caractérisé par des effets hémorragiques très violents dont le poète donne une peinture saisissante. Il convient donc de rechercher aussi d'éventuelles propriétés hémostatiques et vulnéraires dans les plantes appelées hélénion. Nous en reprenons l'étude dans l'ordre précédemment adopté.
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La renouée bistorte, qui correspond selon toute vraisemblance à l'helenium/uiperina du Pseudo-Apulée, est au contraire une plante médicinale très connue. Son gros rhizome tordu au moins deux fois (d'où le nom de « bistorte ») est extrêmement riche en tanins, substances astringentes et hémostatiques par excellence. Il était utilisé naguère, et l'est peut-être encore sous forme de préparations, pour favoriser la cicatrisation des plaies ainsi que dans le traitement des hémorragies.
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