Étymologie :
Étymol. et Hist. Ca 1120 bete bot. (Ph. de Thaon, Bestiaire, éd. E. Walberg, 1578 dans T.-L. : Li masles foilluz rest Si cume la bete est) ; ca 1393 bette (Ménagier, II, 2 dans Littré). Empr. au lat. beta de même sens, (Plaute, Pseud., 815 dans TLL s.v., 1942, 30), v. André Bot.
Étymol. et Hist. 1379 (Jean de Brie, Bon Berger, 149 dans T.-L.) ; 1790 blete ou blite dans Encyclop. méthod. Méd. Empr. au lat. médiév. bleta, forme citée dans André Bot., attestée aux ixe-xie s. (Glossae latino-theodiscae, III, 549-50 dans Mittellat. W. s.v., 1507, 68) croisement du lat. bēta « bette, poire » (Pline, Nat., 19, 113 dans TLL s.v., 1942, 45) et blitum de même sens (gr. β λ ι ́ τ ο ν) le rapprochement entre les deux mots est très anc. en lat. (Plaute, Pseud., 815, ibid., 1942, 30) ; blite serait un empr. dir. au lat. blitum; v. aussi bette.
Étymol. et Hist. 1. 1197 poree « potage aux poireaux ou aux légumes en général » (Hélinant, Vers de la mort, XXXII, 10 ds T.-L.) ; vers 1475 poiree (Evangile des quenoilles, Bruges, Colard Mansion, [s.d.], 5e journée, chap. 1 : je lui feroie mengier une poiree dherbes) ; 2. 1256 poree « variété de bette dont on consomme les côtes » (Aldebrandin de Sienne, Rég. du corps, éd. L. Landouzy et R. Pépin, 51, 27) ; 1549 poirée « id. » (Est., avec renvoi à poree). Dér. de por « poireau », v. poireau ; suff. -ée, v. -é.
Lire également la définition des noms bette, blette et poirée afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Beta vulgaris - Asperge des pauvres - Bette - Bette à carde - Bette à côte - Bette à tondre - Bette commune - Blea - Bleda - Blette - Côte - Côte de bettes - Jotte - Joute - Pétraules (Wallonie) - Poirée - Poirée à cardes -
Botanique :
Selon Jean-Marie Pelt, auteur d'un ouvrage intitulé Des Légumes (Éditions Fayard, 1993) :
Les légumes feuilles : la Bette et la Betterave. Ces deux légumes, si différentes d'un point de vue morphologique, sont pourtant très apparentés du point de vue botanique. L'un et l'autre viennent en effet d'une souche commune : la bette maritime, espèce spontanée des bords de l'océan Atlantique et de la Méditerranée.
De la culture de la bette ont dérivé deux plantes, l'une aux feuilles généreuses et à la racine pudique - la bette, précisément -, l'autre au feuillage plus modeste mais à la racine puissamment renflée et charnue - la betterave potagère. L'une et l'autre étaient déjà connues des Grecs et des Romains. Ne voit-on pas Cicéron raconter dans une lettre à son ami Gallus les coliques qu'il endura dis jours durant après avoir mangé un ragoût de bettes et de mauves : « La diarrhée m'a pris si bien que je commence aujourd'hui seulement à en espérer la fin. Ainsi, moi à qui il en coûte si peu de m'abstenir d'huîtres et de murènes, me voilà sottement pincé par des bettes et de la mauve ! » Les Romains des classes pauvres faisaient grand usage des soupes de bettes. Mais, selon Pline, les médecins considéraient la bette comme de qualité très inférieure au chou.
Au Moyen Âge, la bette était l'ingrédient principal de la plus populaire des soupes : la porée, ce qui lui valut d'ailleurs le nom de poirée. Avant la création des Halles de Paris, le premier marché aux légumes de la capitale se déroulait rue du Marché-à-la-Poirée. Poirée prit ensuite le sens plus général de légume vert.
Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Bette :
Propriétés Physiques. — On distingue deux variétés de cette plante, la Poirée ou Beta cicla et la Betterave ou Beta rapacea. La poirée présente à son tour trois sous-variétés, la poirée blanche, la blonde et la rouge ; on l'appelle aussi poirée à cardes ; en Angleterre on l'a surnommée asperge des pauvres. La betterave proprement dite comprend un grand nombre de sous-variétés. La racine de la poirée est dure et cylindrique ; elle est sans usage. Les feuilles présentent une nervure médiane fortement charnue ; elles ont une saveur douce, aqueuse, émolliente et rafraîchissante. La betterave n'est guère usitée pour ses feuilles qui sont données en nourriture aux animaux, mais tout particulièrement pour ses racines qui, indépendamment de leurs usages culinaires, fournissent à l'industrie des quantités de sucre qui vont s'accroissant d'année en année. Ces racines sont fusiformes ou napiformes, très grosses, charnues, blanches, roses, rouges ou marbrées
Usages médicaux. — Les feuilles de la poirée servent à préparer des bouillons tempéraments et rafraîchissants avec le veau ou le poulet ; elles sont un peu laxatives et conviennent aussi dans les irritations des voies urinaires ; elles servent encore au pansement des vésicatoires ; on les a dites détersives. On les emploie sous forme de décoction, de fomentation, de lavement et de cataplasmes. Les racines de la betterave se mangent cuites au four ou sous la cendre ; le sucre est plus abondant dans la sous-variété jaune que dans la rouge . Nous pouvons nous dispenser de parler ici du sucre et de l'alcool de betterave dont les usages sont bien connus.
Pierre Julien, d'après Les bettes en médecine et en gastronomie : Phytos, La bette ou poirée : son histoire et son utilisation en médecine et en gastronomie, (in Journal des médecins du Nord et de l'Est, mai 1969. In : Revue d'histoire de la pharmacie, 58ᵉ année, n°205, 1970. p. 128) :
Composantes essentielles de cette soupe aux légumes, la « porée », d'où est venu aux Anglais le terme de « porridge », les bettes bette proprement dite et poirée à cardes fournissaient aux Arabes un suc à injecter dans le nez pour combattre l'épilepsie causée par l'altération des humeurs visqueuses du cerveau. Cet usage est encore signalé par Lémery. Très estimées des phytothérapeutes du XIXe siècle, les bettes ont, pour leurs propriétés adoucissantes et rafraîchissantes, un emploi plus diététique et hygiénique que médical.
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Symbolisme alimentaire :
Pour Christiane Beerlandt, auteure de La Symbolique des aliments, la corne d'abondance (Éditions Beerlandt Publications, 2005, 2014), nos choix alimentaires reflètent notre état psychique :
Les Bettes elles-mêmes sont toujours de bonne humeur et de compagnie agréable. elles aiment engager une conversation conviviale et sont contentes d'avoir des contacts sociaux enjoués. Quelquefois elles semblent ne pas être de ce monde tant elles s'élèvent au-dessus de tous les côtés sombres de la société. Elles ont toujours l'air d'être en vacances dans un lieu paradisiaque qu'elles se sont créé au milieu de la nature. Elles savourent pleinement de délicieuses nourritures... et en même temps parlent intarissablement des choses intéressantes et véritablement édifiantes qu'elles viennent de rencontrer sur leur chemin.
Les Bettes élèvent le cœur, rendent les sentiments légers et libres.
Elles ont leur existence sur un plan éthique élevé et ne condescendent jamais à retomber plus bas. 3 Oh, que la vie est belle et lumineuse..." se réjouissent-elles de tout cœur. Elles regardent avec des yeux pleins de lumière et beaucoup d'optimisme. Dans le cas le plus extrême, les Bettes elles-mêmes auraient tendance à "fuir" au lieu de résoudre des problèmes fondamentaux. Ce n'est évidemment pas une bonne chose. Cependant, dans leur aspect positif, elles rayonnent de confiance et de contentement, une confiance, surtout, en ce que tout s'arrangera et que cela n'a pas de sens de se préoccuper déjà "à l'avance" de certaines problématiques, en quoi elles ont naturellement raison.
La personne qui aime les Bettes a parfois des choses qui lui pèsent sur le foie ou la bile. Elle regarde quelquefois les choses trop pesamment, trop sombrement, et aspire à secouer tout, à rejeter ce qui la submerge. Trop, c'est trop. Dans l'ambiance psychique des feuilles de Bette, l'être humain réussit merveilleusement bien à atteindre un niveau de plus grande légèreté et à s'élever magnifiquement au-dessus de toutes les pensées difficiles, déprimantes ou bilieuse. Ces feuilles élèvent la sphère psychique de cette personne jusqu'à ce qu'elle ne perçoive plus que de la lumière et des rayons de soleil.
Elle est maintenant capable de relativiser et rien en lui pèse plus. Sa tête devient plus légère, sans surcharge, ses yeux ne voient plus que le côté ensoleillé des choses. Cette personne fera bien de se rendre compte qu'elle-même peut faire évoluer sa vie vers la lumière ou l'obscurité : cela dépend de sa perspective, de son monde de convictions. Elle fera bien de suivre le conseil des Bettes et de toujours tout regarder d'un œil clair, optimiste et ouvert, sans s'imaginer à l'avance que les choses seront difficiles. "Regarde tout avec gaieté et en étant empli d'attentes positives", disent les Bettes avec l'optimisme invétéré de leur caractère, "ainsi tu verras que tout tournera bien mieux que tu aurais pu le craindre !"
L'espace psychique de ce légume incite l'être humain à ne pas se faire de souci, mais plutôt à tout bien "mâcher" et tout bien "avaler" dans la vie, et, au besoin , à se permettre occasionnellement un renvoi (un rot), plutôt que de se laisser submerger sans réaction et de tout avaler. Refuse, si c'est nécessaire pour ton bien-être ; ne te laisse pas surcharger ; ne prends pour toit (dans ce que t'offre un autre par exemple) que ce que tu es capable de gérer, ce qui est bon pour toi, et dis "non" lorsque tu sens qu'il le fat.
"Ne te fais pas de souci MAINTENANT, regarde les choses tranquillement un peu plus tard... avec une vue d'ensemble, il n'est rien à quoi tu ne puisses apporter de solution si tu réfléchis avec bon sens, sans tenter de forcer les choses. Détends-toi maintenant, jouis, jette toutes les questions et les soucis par-dessus bord et repends toutes ces questions aussitôt en les structurant et avec une vue générale sereine, de sorte que tout puisse être résolu aisément. mais il est préférable que maintenant cela ne te préoccupe pas : mange, savoure, détends-toi un peu et sois d'agréable compagnie pour toi-même et pour les autres. Jouis maintenant de la compagnie d'autres personnes dans ton entourage et élève ton coeur radicalement au-dessus de tute problématique. Rien ne peut encore alourdir ton coeur : aie confiance, crois que tu pourras examiner tout problèème un peu plus tard, en y réfléchaissant tranquillement, et y apporter une bonne solution... il ne sera ainsi ! La^che prise, abandonne-toi au moment présent, mâche bien, ne t'accroche pas à ce qui hier encore tournait dans sa tête. Ne laisse plus aucune charge peser sur tes épaules...", disent les Bettes.
Le caractère de cet aliment est plutôt à qualifier de "simple", sans fioritures, peut-être un peu primitif, sans être "arriéré" toutefois ; certes, il évacue le superflu, l'excès. Il se limite à peu de choses, se focalise sur un simple petit point au milieu. Il semble ne pas (vouloir) en savoir plus. Il préfère tout garder propre et lisse, garder le sol net comme quelqu'un qui est "Vierge", de sorte qu'en fin de compte il ne doive pas trop s'en préoccuper.
Ce caractère dit : "Laisse-moi tranquille maintenant dans ma petite maison bien propre.3 On peut l'associer à une couler tendant vers le bleu clair ; peut-être a-t-il tendance à s'arrêter à la surface des choses, à ne pas vouloir approfondir, aller plus loin. Il aime le calme dans la tête, une structure claire, transparente et nette, ainsi que l'ordre et la perspective, de sorte qu'il n'ait pas le sentiment de se laisser appesantir par quoi que ce soit ou d'être "surchargé".
L'être humain qui a envie de cet élément ou aime en manger a parfois une faim dévorante de plus, encore et toujours plus ; il porte un regard sur le monde qui est tout sauf pondéré et froid (contrairement aux Bettes, qui elles voient les choses ainsi), mais regarde plutôt autour de lui avec des yeux empourprés et parfois noirs. Où peut-il trouver quelque chose à ramasser, où y a-t-il quelque chose à saisir , quelque chose à "trouver" pour se remplir ? Où trouvera-t-il l'argent, les produits, personnes ou autres éléments susceptibles de rassasier sa "faim" ?
Dans le cas le plus extrême, il cherche confusément et fiévreusement en rond ; sa tête est accaparée par tout ce sur quoi sa faim se porte, et par les objets du monde extérieur.
Ses glandes salivaires fonctionnent déjà intensément ; car cela le fait saliver, quand il darde à la ronde ses regards pleins de convoitise, cherchant, épiant ou aspirant.
La cause ultime de cette description approfondie réside dans le dote. C'est l'être humai qui s'est un jour écarté de la Foi en sa propre Complétude et qui est convaincu que pour pouvoir exister il doit se remplir avidement d'objets en dehors de lui.
Que lui disent les Bettes ? "Arrête ! Reste pur et limpide. Passe l'aspirateur dans ta propre maison, mais n'aspire rien autour de toi. Calme-toi et purifie-toi, pour que ton corps et ton cerveau puissent retrouver la santé et la détente. Ne te cramponne pas aux autres, aux hoses en dehors de toi-même.
Evente-toi un peu, rafraîchis-toi. Ne te focalise pas anxieusement-passionnément-avidement sur le monde extérieur, avec l'instinct de saisir, mais hausse-toi jusqu'à ton propre plan supérieur plus léger, ensoleillé, plein de confiance, élevant consciemment les choses, sans soucis."
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