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La Germandrée

Dernière mise à jour : 12 oct.




Étymologie :


Étymol. et Hist. xiie s. gemandree (Gloss. de Tours, 328 ds T.-L.). Issu, avec une altération mal expliquée, du lat. chamaedrys « id. » (transcr. du gr. χ α μ α ι ́ δ ρ υ ς « id. », étym. chêne [δ ρ υ ̃ ς] à terre [χ α μ α ι ́]) qui présente des formes latinisées comme camedria, v. André Bot.


Lire également la définition du nom germandrée afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Teucrium botrys, L. - Germandrée botryde - Germandrée femelle -

Teucrium chamaedrys - Calamandrier - Chasse-fièvre - Chêneau - Chênette - Gazon de chat - Germandrée petit-chêne - Germandrée officinale - Herbe à fièvre - Ive - Ivette - Petit-chêne - Sauge amère - Thériaque d’Angleterre -

Teucrium marum - Germandrée des chats - Germandrée marum - Marum -

Teucrium scordium - Chamaras - Germandrée aquatique - Germandrée d'eau - Germandrée des marais - Scordium des boutiques -

Teucrium scorodonia, L. - Faux scordium - Germandrée sauge des bois - Germandrée sauvage - Germandrée scorodonie -



Botanique :


Philippe Glardon, dans un article intitulé « La relation du texte à l’image dans l’Hortus sanitatis et les traités du milieu du XVIe siècle : quelques points de comparaison », Kentron [En ligne], 29 | 2013, mis en ligne le 22 mars 2017, propose une comparaison de deux descriptions, l'une médiévale, l'autre renaissante  qui permet de mieux comprendre la philosophie sous-jacente à toute description.

 

Dans sa thèse de Doctorat en pharmacie intitulée Les plantes médicinales des pelouses calcaires de la Réserve Naturelle de Montenach (57) (Nancy, 2010), Stéphanie Schaal propose la description suivante :


Description botanique : La plante est vivace, touffue, pubescente, haute de 30 cm. Les feuilles sont ovalesaigües, dentées, luisantes. Les fleurs roses sont disposées en épi court et feuillé (SCHAUENBERG PAUL, 1977). C’est une jolie plante vivace des terrains arides, rocailleux et calcaires. Sa souche rampante émet des tiges quadrangulaires très ramifiées, ligneuses et pubescentes, de 10 à 30 cm, dépourvues de feuilles au pied. Celles-ci sont ovales, munies d’un court pétiole, fermes, d’un vert gai, brillantes sur le dessus, profondément crénelées. Les fleurs, pourpres, rarement roses ou blanches, se montrent de mai à septembre, groupées en glomérules feuillées unilatéraux de 2 à 6. Le calice, généralement rougeâtre, velu et légèrement bossu vers la base, est pourvu de dents presque égales (1/3 de sa longueur totale). La corolle, très particulière, semble constituée par une lèvre unique à 5 lobes, la supérieure bipartite étant déjetée vers les 3 divisions de l’inférieure. Les 4 étamines rapprochées sont fortement saillantes vers le haut, avec des anthères, biloculaires opposées bout à bout. Un anneau nectarifère gorgé de suc entoure l’ovaire qui donne un fruit mûr, brun et papilleux (GARNIER et al, 1961).

 



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Vertus médicinales :


Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Germandrée :


Germandrée petit-chêne : Propriétés Physiques et Chimiques. Cette plante possède une odeur agréable, faiblement aromatique, qui diminue par la dessication. Sa saveur est amère, un peu astringente, aromatique, persistante. Elle contient un peu d'huile volatile et un principe extractif amer ; l'eau dissout ses principes actifs.


Usages médicaux.  La germandrée petit-chêne est tonique et amère ; on l'a dite aussi sudorifique, diurétique, emménagogue ; elle a joui d'une grande réputation contre une foule d'affections engorgements de la rate, du foie, ictère, scrofules, asthme, catarrhe pulmonaire chronique, aménorrhée, hypochondrie, scorbut, et surtout contre les fièvres intermittentes et la goutte ; elle faisait partie de la Portland powder vantée contre cette dernière affection. On conçoit que par ses propriétés toniques et amères cette plante puisse être utile dans la goutte liée à un trouble des fonctions digestives ; son emploi pour toutes les espèces de goutte est évidemment exagéré. Elle peut être prescrite avantageusement dans toutes les affections accompagnées d'une débilité des voies gastro-intestinales.


Formes et doses. - Poudre, 2 à 10 grammes. - Infusion, 50 à 60 grammes par kilogramme d'eau. - Extrait, 1 à 8 grammes. - Eau distillée, 50 à 100 grammes.


Germandrée aquatique : Propriétés Physiques et Chimiques. Cette germandrée exhale une odeur forte, pénétrante, alliacée qui se dissipe par la dessication ; sa saveur est amère, un peu chaude et piquante. Elle contient un principe gommo-résineux amer auquel elle doit ses propriétés stimulantes.


Usages médicaux. Cette plante a joui dans l'antiquité d'une grande réputation ; on lui supposait la propriété de s'opposer à la putréfaction, d'empêcher la gangrène, de guérir les maladies putrides et la peste et de s'opposer à l'action vénéneuse des poisons (Hippocrate, Galien, Mithridate). Le scordium des anciens fut reconnu être notre germandrée aquatique par Guillaume Pelissier, évêque de Montpellier, et Rondelet, professeur à l'université de la même ville ; au temps de Tournefort, cette plante passait pour fondante, apéritive, diurétique et sudorifique ; on donnait l'infusion dans les fièvres malignes, la petite vérole, la rougeole et les maladies de la peau ; aussi pour rétablir l'appétit, pour se garantir de la goutte, pour faire mourir les vers et pour purifier le sang. En usage externe elle servait comme vulnéraire et détersive. Sans accepter tout ce que la crédulité des premiers âges a admis sur les vertus médicales du scordium, on ne peut lui contester des propriétés toniques et stimulantes qui trouveront de nombreuses applications pour l'usage interne et pour l'usage externe. Cette plante entre dans l'électuaire Diascordium.


Formes et doses. Infusion, une petite poignée par demi-litre d'eau. - Poudre, 4 à 8 grammes. - Extrait, 2 à 20 grammes. - Suc exprimé, 15 à 60 grammes. - Extérieur : infusion, décoction, cataplasme.


Germandrée botryde : Usages médicaux. Cette espèce est aromatique, stimulante et fébrifuge ; on lui reconnaît les propriétés de la germandrée petit-chêne ; on peut l'employer aux mêmes usages.


Germandrée sauvage : Usages médicaux. La germandrée sauvage possède une odeur alliacée beaucoup plus faible que celle du scordium ; elle est souvent substituée à tort à celui-ci. Elle a été employée comme antihydropique, antiscorbutique et même antivénérienne (Ray). Elle mérite d'être soumise à de nouvelles expérimentations. Les gens de la campagne la font infuser dans du vin blanc (30 grammes par kilogramme) et l'administrent dans l'anasarque.


La germandrée de montagne (Teucrium montanum, L.) possède aussi les propriétés des labiées aromatiques et se donne sous les mêmes formes et aux mêmes doses ; il en est de même du Teucrium marum, L., (herbe aux chats) souvent cultivé dans nos jardins dont l'odeur est fortement aromatique et la saveur âcre et amère ; cette plante est principalement employée comme sternutatoire.

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A. B., auteur discret de Les Vertus des plantes - 918 espèces (Tours, 1906) recense les propriétés thérapeutiques d'un grand nombre de plantes :


Germandrée, petit chêne. Choemedris minor repens : Feuille assez semblable à celle du chêne, haute d'un pied, elle vient dans les lieux incultes et pierreux, fleur labiée, dont les étamines tiennent lieu de la lèvre supérieure ; l'inférieure divisée en cinq parties à celle du milieu est plus large que les autres, creuse eh forme de cuillère, semences au nombre de quatre, les fleurs naissent dans l'aisselle des feuilles.

VERTUS : C'est un amer stomachique, incisif, sudorifique excellent et sûr dans les maladies lentes et chroniques où il s'agit de diviser les humeurs, purifier le sang par les urines ou la transpiration, comme dans les démangeaisons, les catarrhes, la goutte ; elle s'emploie pour les maladies du sexe, d'obstructions et les vieux ulcères, elle est emménagogue, on s'en sert le matin en forme de thé, et on peut compter sur un effet sûr quand on le continue pendant quoique temps et qu'on suit un bon régime ; à l'extérieur, en fomentation, elle est un fort bon détersif et elle est présente dans la plupart des antidotes.


Germandrée aquatique. Choemedris paluttris canescente feu scordium officinarum. Caractère du petit chêne, ajouter les tiges carrées et les feuilles velues, blanchâtres, odeur d'ail. Les fleurs sont labiées.


VERTUS : Le scordium a toujours été vanté comme très bon contre la malignité des humeurs, on en tire une excellente teinture avec l'esprit de vin, comme il est sudorifique il purifie le sang de toutes humeurs étrangères qui tendent à la pourriture ; il entre dans tous les antidotes des anciens, comme la thériaque, l'eau générale, vulnéraire, les deux orviétans, il est antihystérique et convient dans les pâles couleurs, la suppression des règles, il est bon vermifuge, il est admirable pour déterger les vieux ulcères, les feuilles entrent dans le mondicatif d'ache, le diascordium, pour résoudre les tumeurs froides et indolentes. On se sert de l'eau distillée, de l'infusion ou du sirop.


Marum. Chamaedris maritima incana frutescens foliis lancalatis. Tragoriganum lobelii. Caractère du chamadris, fleur en fer de pique, verdâtre.


VERTUS : Cette plante mérite une place distinguée parmi les céphaliques. Antispasmodique, sudorifique, alexitère vulnéraire, cordiale, stomachique. On en fait une eau qui surpasse celle de la reine de Hongrie, on peut s'en servir comme du thé dans les affections froides de la tête, spasmodiques de l'estomac pour se garantir du mauvais air.

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Marie Girard mentionne la germandrée dans son article intitulé "Le coup de froid et ses remèdes en Chartreuse" paru dans Ecologie humaine, 1993 :


« Faire circuler », « digérer », « éliminer »

L'irruption du froid dans l'organisme refroidit l'ensemble des liquides et des matières circulantes. Et elle entraîne le blocage :

- du sang : « Quand les gens avaient pris froid, ils en buvaient de la germandrée petit-chêne, c'était bon pour le sang aussi ».

 

Pierre Lieutaghi dans un article intitulé « Aux frontières (culturelles) du comestible » et paru dans la revue Ethnologie française, vol. vol. 34, n°3, 2004, pp. 485-494, revalorise la savoir populaire :


L’emploi populaire des ressources de la pharmacopée atteste que l’une des caractéristiques foncières de la tradition orale est d’induire de l’innovation, à l’inverse de ce qui est couramment avancé. Déjà, quiconque détient une recette et la met en œuvre suscite une variante, sans qu’il y ait pour autant désarticulation du savoir : le champ des probabilités d’emplois se referme autour d’une moyenne implicite (quantité de plantes, doses journalières, durée des cures, etc.), laquelle procède justement des expériences diverses. On voit ainsi la germandrée petit-chêne, grand amer dépuratif dans la région considérée, prescrite en cures de quatre à dix jours, les traitements plus longs étant habituellement perçus comme dangereux.


Note : À la fin des années quatre-vingt-dix, le petit-chêne s’est retrouvé interdit à la vente libre en France. Vanté pour des vertus « amaigrissantes », sous forme de gélules, il a causé des accidents graves (hépatites aiguës) chez des personnes qui avaient jugé bon d’accélérer le traitement. En masquant les saveurs désagréables de beaucoup de plantes médicinales (ici l’amertume extrême), les gélules favorisent le surdosage. Les précautions d’emploi de la médecine populaire auraient pu, si elles avaient été prises en compte, enseigner la prudence. C’est l’occasion de remarquer que l’industrie pharmaceutique s’efforce de plus en plus de masquer le « goût de remède » par des « goûts de fruits » (ou supposés tels), et que se renverse en même temps l’ancien rapport entre aliment et remède : le premier peut enseigner le second ; mais le second ne peut, sans risques d’atteintes graves à des catégories d’appréhension fondamentale, empiéter sur le champ du premier.

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Dans sa thèse de Doctorat en pharmacie intitulée Les plantes médicinales des pelouses calcaires de la Réserve Naturelle de Montenach (57) (Nancy, 2010), Stéphanie Schaal recense les usages thérapeutiques de la Germandrée petit-chêne :


Utilisation traditionnelle : La germandrée est un stimulant, diurétique et cholérétique (SCHAUENBERG, 1977).

 

Selon la présentation de Stéphane Andreani, "Les huiles essentielles de Corse et Vertus insoupçonnées des plantes envahissantes." proposée à la Journée des associations du Cap Corse, le 6 juin 2015 :

Usages traditionnels :


  • utilisée par les bergers pour éloigner les mouches des fromages ;

  • en infusion contre les rhumes, les maux de tête ;

  • connue pour soulager les symptômes de la malaria.

  • propriétés insecticides (C. Beaupin Thèse de doctorat) ;

  • psychotrope sur les félidés (T. Ellsner et coll, Chemoecology, 2000 ;

  • un antibiotique large spectre (montré par N. Djabou, V. Lorenzi, E. Guinoiseau, S. Andreani, A . Muselli, Food control, (2013) : L’huile essentielle de Teucrium marum s’est avérée efficace contre un grand nombre de souches bactériennes dont deux pathogènes alimentaires et deux souches responsables de maladies nosocomiales (Campylobacter jejuni ; Listeria innocua ; Staphylocoque doré; Enterobacter aeroginosa) ;

  • son hydrolat est capable de venir interférer sur la communication chimique entre bactéries pathogènes (quorum sensing).

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Symbolisme :


Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :


Germandrée - Plus je vous vois, plus je vous aime.

Les plantes de ce genre sont très communes dans nos bois. Les feuilles de la germandrée marum, séchées et pulvérisées, provoquent l'éternument et jouissent de toutes les propriétés de la sauge, de la menthe et du romarin. La germandrée petit chêne, est la représentation en miniature du roi des forêts, et l'on ne peut assez admirer les détails délicats de ses différentes parties.

 

D'après Le Livre des superstitions, Mythes, légendes et croyances (Éditions Robert Laffont, S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani :


Le pouvoir de cet arbrisseau aromatique que les Provençaux appellent erbo du masco (herbe de la magicienne), est mis en valeur par une légende se déroulant dans la région de Hyères (Var) : un jour, deux enfants, surpris par l'orage, trouvèrent abri près d'un germandrée petit-chêne. Ils entendirent alors une conversation pour le moins étrange :

« Casse ceci et cela, disait l'éclair.

- Voilà qui est fait, répondait le tonnerre.

- Tiens, tue ces deux enfants, disait l'éclair.

- Impossible, répondit le tonnerre, le calamandriée [du latin calamandria : germandrée] les protège. »

Depuis, en Provence, cette plante placée dans la cuisine ou la chambre protège la maison de la foudre et du tonnerre.

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Mythologie :


Dans Le Folk-Lore de la France, tome troisième, la Faune et la Flore (E. Guilmoto Éditeur, 1906) Paul Sébillot recense nombre de légendes populaires :


Dans la Gironde il est utile d'avoir constamment dans sa maison un pied de fougère mâle, dans le magasin, mais non exposé au public, un paquet de germandrée aquatique (teucrium scordium) et au-dessus de la porte, mais de façon à ce que les étrangers ne la voient pas, une croix de verveine sauvage, à laquelle on a mêlé de la germandrée.

[...] Une femme qui veut rendre un homme amoureux, lui met dans sa poche, sans qu'il s'en aperçoive, un peu de germandrée aquatique (teucrium scordium).

 

Teucrium désigne le genre en latin, et vient du grec teukris, teukros ou teucros, ou encore teucer. Or, Teucer est un des fondateurs de la cité de Troie, qui, selon la légende, utilisa la Germandrée comme médication.


N.B. Teucer ou Teucros, fils du dieu-fleuve Scamandre, avait fondé une première ville en bordure du Scamandre. Puis Dardanos, fils de Zeus, chassé de Samothrace, vient se réfugier en Troade, épouse la fille de Teucer et fonde la ville de Dardania. Tros, successeur de Dardanos, fonde la ville de Troie. Son fils Ilos fonde Ilion et réunit les trois villes voisines qui deviennent Troie.

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