Étymologie :
JAMBE, subst. fem.
Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1100 « patte des animaux » (Roland, éd. J. Bédier, 1491 : li destriers... Piez ad colpez e les gambes a plates) ; b) α) ca 1150 « membre inférieur de l'homme en son entier » (Charroi de Nîmes, éd. D. McMillan, 379) ; β) 1312 « partie de chacun des membres inférieurs de l'homme qui s'étend du genou au pied » (Vœux du Paon, éd. R. L. Graeme Ritchie, t. 4, 7851 : l'os de la jambe destre brisa outréement) ; γ) 1665 [éd.] « aptitude pour marcher, courir » (Guez de Balzac, Œuvres, t. 1, p. 44) ; c) 1564 jambe de bois « pièce de bois adaptée au moignon d'un amputé » (Paré, Œuvres complètes, XVII, 12, éd. J.-Fr. Malgaigne, t. 2, p. 620) ; 2. a) α) 1640 cela me fait la jambe belle « cela ne me sert de gueres » (Oudin Curiositez) ; 1842 faire une belle jambe à quelqu'un (Sue, Myst. Paris, t. 1, p. 25) ; β) 1670 cela lui rend la jambe bien mieux faite (Molière, Bourgeois gentilhomme, III, 3 ; cf. Ac. 1694 : ,,On dit par ironie qu'une chose rend la jambe bien faite à quelqu'un, pour dire qu'elle ne lui sert de rien``; b) α) 1671 jouer qqn par dessous la jambe (Molière, Fourberies de Scapin, I, 2) ; β) 1829 traiter par dessous la jambe (Béranger, Chans., t. 1, p. 239) ; γ) 1844 faire qqc. par dessus la jambe (Vidocq, Vrais myst. Paris, t. 3, p. 347) ; c) prendre les jambes à son cou α) 1690 « se résoudre à partir pour quelque voyage » (Fur.) ; β) 1740 « partir aussi vite que l'on peut » (Trév.) ; d) 1901 tenir la jambe à quelqu'un (Bruant, p. 260) ; 3. 1879 jambe du pantalon (Zola, Nana in Le Voltaire 12 nov., p. 1, col. 6 ds Quem. DDL t. 16). B. 1. a) 1321 « chacun des deux poteaux qui soutiennent le linteau d'une porte » (Richard, Une petite nièce de Saint Louis, Mahaut, p. 400 : les gambes del huys dudit portal) ; b) 1609 charpent. jambe de force (Mallevouëe, Actes de Sully, p. 128) ; c) 1676 [éd.] jambe sous poutre (Félibien, 621) ; d) 1827 jambe d'une maille (Baudr. supra) ; 2. 1564 jambes d'un compas (Paré, Œuvres complètes, VIII, 20, éd. J.-Fr. Malgaigne, t. 2, p. 59). Du b. lat. gamba « paturon du cheval (et gén. des quadrupèdes) » (aussi camba, d'où les différentes formes prov., cat., fr.-prov. et rhétorom. ; cf. FEW t. 2, 1, p. 111a-b), empr. comme terme vétér. au gr. κ α μ π η ́ « articulation du pied du cheval ». Ce mot, pop. à l'orig., a évincé le subst. class. crus « jambe », la lang. vulg. empruntant volontiers, pour plus d'expressivité, au domaine animal. Dans le domaine ibér., crus a également été remplacé par perna qui, à l'époque class., signifiait « gigot, jambon » (cf. esp. pierna « jambe »; port. perna « id. »). Cf. G. Rohlfs, Romanische Sprachgeographie, p. 93-94, § 66 et p. 276 et W. von Wartburg et S. Ullmann, Problèmes et méthodes de la ling., p. 175. Le fait de montrer une belle jambe et de prendre une démarche avantageuse a donné lieu à l'expr. faire une belle jambe. Jouer qqn par-dessous la jambe vient prob. d'une allusion aux joueurs de paume ou de boules qui, pour montrer leur supériorité, lançaient la balle ou la boule en la faisant passer par-dessous leur jambe. L'expr. tenir la jambe à qqn est une métaph. correspondant à « retenir par la jambe » et qui s'emploie dans le cont. d'une conversation interminable. Cf. Rey-Chantr.
Lire également la définition du nom jambe afin d'amorcer la réflexion symbolique.
*
*
Anatomie :
Alain Froment, dans un ouvrage intitulé Anatomie impertinente, Le corps humain et l'évolution (© Éditions Odile Jacob, 2013) nous étonne avec des détails inattendus sur la jambe :
Abnégation : L'anatomie a ses héros et ses vilains: un chirurgien hollandais, Philip Verheyen (1648-1711), qui avait dû subir une amputation de la jambe, la disséqua avec soin.
[...]
Squelette : Le squelette des vertébrés est une structure d'une extrême élégance. Dans notre espèce, cette grâce est amplifiée par le fait qu'il tient en équilibre sur deux jambes, de sorte que même le corps le plus vilain ou le plus obèse est doté d'un beau squelette, à la fois gracile et résistant. [...]
Les sujets grands ont proportionnellement des jambes plus grandes, en raison d'une règle d'allométrie.
[...]
Canon : [...] Le rapport considéré comme normal est donc celui où la longueur des jambes représente la moitié de la taille. Plus les jambes sont longues moins elles sont infantiles, elles agissent donc comme un signal sexuel. La jeune femme qui a les plus longues jambes dans le milieu du cinéma est Wren Scott dont les jambes sur sa stature de 1,90 mètre font 1,24 mètre, soit 30 centimètres de plus que la moyenne. La culotte et les bas des gentilshommes étaient aussi une façon de séduire en montrant ses jambes, prétention nivelée révolutionnairement par l'avènement du pantalon des « sans-culottes ».
Proportions : Les proportions corporelles jouent un rôle capital dans la thermorégulation et l'adaptation au climat. Les zoologues ont tenté d'expliquer la morphologie du corps chez les mammifères par l'adaptation climatique, pour laquelle des règles écogéographiques célèbres ont été formulées empiriquement par Bergmann en 1847 et Allen en 1877. La règle de Bergmann énonce que dans une espèce polymorphique à large répartition géographique, les individus à corps large sont observés dans les régions froides, et les individus à corps plus petit dans les climats plus chauds. En effet, quand la masse augmente, la surface relative décroît en proportion. Puisque la chaleur est dissipée en surface, une masse plus grande conserve mieux la chaleur. La règle d'Allen postule que les individus ayant des extrémités (oreilles, membres, queue) plus courtes vont être observés sous les climats froids, ceux aux extrémités longues vivant sous les climats chauds. Ce système agissant comme un radiateur est basé sur l'évapotranspiration, car la sueur, en se dissipant, abaisse efficacement la température. Ces deux règles s'appliquent à l'homme lorsqu'on étudie le rapport entre la surface et la masse corporelle; il est maximisé dans les régions chaudes et minimisé dans les régions froides, ce qui explique que les Inuits ou les habitants des Andes soient trapus et épais, avec des jambes courtes, alors que les Nilotes sont grands, minces et déliés, avec de longues jambes. Cette différence de morphologie a été mise en avant pour expliquer les performances contrastées des Noirs et des Blancs dans certains sports. Les athlètes d'origine africaine ayant les jambes plus longues, leur centre de gravité situé 3 centimètres plus haut que chez les Blancs leur conférerait un léger avantage pour « tomber » vers l'avant lors de la course de vitesse. A l'inverse, en natation, un torse plus long comme celui des Blancs provoquerait une vague plus forte qui profite au nageur. Les Asiatiques ont des proportions comparables aux Européens, mais sont moins grands, ce qui leur fait perdre cet avantage. Ce genre d'interprétation est loin de faire l'unanimité, et le débat a fait rage dans plusieurs livres où déterminisme naturel et déterminisme social, comme toujours, s'affrontent.
[...]
Membre inférieur : La prépondérance du membre postérieur sur l'antérieur est une caractéristique de tous les primates, mais il atteint, on l'a vu, un développement considérable avec l'hominisation, l'amenant à un sixième du poids du corps. Plus longues et plus fortes avec la bipédie, les jambes permettent certaines performances telles que le saut en longueur, le saut en hauteur et le sprint. La station debout y crée une pression sanguine inhabituelle et pourtant, on ne fait normalement pas d'œdèmes des membres inférieurs, à cause du dispositif vasculaire du rete mirabile. La girafe, avec ses 6 mètres de haut, a été confrontée à des problèmes hydrauliques analogues, résolus de la même façon.
[...]
JAMBE : Le mot « jambe » vient de gambê en grec (qui désigne aussi le paturon du cheval), et a donné somme toute plus directement, gambette et gambiller, viole de gambe, ingambe, gambader et finalement gigue, gigot, gigoter, gigolette et donc - joie de l'archéologie des mots - gigolo ! « Tibia » vient d'une racine indo-européenne qui a aussi donné tuyau, tube, d'où la notion d'os creux, et son extension au mot « flûte », tant au sens musical qu'argotique, quoi qu'on dise aussi « quilles » dès le xv" siècle. Le péroné, os long et grêle, a le sens d'agrafe ou de clavette en grec. L'anatomie l'appelle fibula, qui veut dire « épingle, broche, agrafe de toge » ; c'est la fibule des archéologues. Les Anglais disent splint bone (« attelle, éclisse ») car il est en position de renfort parallèlement au tibia. Chez de nombreux quadrupèdes, la fibula est soudée, voire fusionnée, au tibia pour renforcer l'efficacité du membre. Le mot « cheville » est la déformation de clavicula, « petite clé », os déjà rencontré ailleurs. Les malléoles, apophyses inférieures du tibia et du péroné dont on sent bien les saillies sous la peau, sont les « petits marteaux » qui assurent la stabilité de la mortaise de la cheville, un dispositif essentiel à la marche qui confère toute son importance à la discrète fibula.
*
*
Symbolisme :
Selon le Dictionnaire des symboles (1ère édition 1969 ; édition revue et corrigée Robert Laffont, 1982) de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant,
JAMBE : Organe de la marche, la jambe est un symbole du lien social. Elle permet les rapprochements, favorise les contacts, supprime les distances : elle revêt donc une importance d'ordre social. De là, sa signification ésotérique de pourvoyeuse des mariages, chez les Bambaras, qui la rapprochent du sexe, du nez et e la langue, tous organes qui, comme elle, sont des faiseurs et défaiseurs de sociétés. Ces quatre organes revêtent une importance fondamentale pour les Bambaras : ils sont les ouvriers du social, les responsables de la cohérence - ou de l'incohérence - de la collectivité. Le pied prolongeant la jambe, leur symbolisme est complémentaire : la première crée les liens sociaux, le second en est le maître et la clef. Par extension, la jambe est au corps social ce qu'est la verge au corps humain : elle est l'instrument de la parenté utérine et des relations sociales, comme la verge est celui de la consanguinité. La jambe, comme la verge, est un symbole de vie : mettre la jambe à nu signifie montrer sa puissance et sa virilité. Mimer le geste de chausser une botte devant quelqu'un constitue un affront d'une gravité exceptionnelle à l'encontre de la mère de celui-ci.
Dans Le Temple de l'âme : La Parole divine du corps humain (Éditions Dangles, 1998) Roland Arnold décrypte la symbolique des jambes :
Correspondances des niveaux d’appui et de maturation :
– pieds, chevilles : vie fœtale, naissance ;
– jambes, genoux : enfance ;
– cuisses, hanches : adolescence.
Les jambes : Du bas latin gamba (jarret, patte de cheval), du grec kampê.
Si les jambes sont les premiers piliers sur lesquels s’appuie le corps, il y a aussi référence à la puissance et à la vitesse de déplacement du cheval, symbole des forces instinctives primaires. Elles représentent les membres inférieurs dans leur ensemble, d’où les expressions « avoir de bonnes jambes » ou « prendre ses jambes à son cou ». Les jambes ont leur origine au niveau du cou-de-pied, et elles prennent appui sur un os en forme d’étoile, l’astragale (de aster qui signifie en latin « étoile ») qui, avec la dénomination de la voûte plantaire (répondant à la voûte crânienne au sommet de la tête), laisse percevoir une origine céleste du corps humain.
Le tibia, du latin tibia, tibicen, traduit la jambe, la flûte, mais surtout la notion de soutien, de pilier.
Le péroné, parallèle au précédent, est le deuxième os de la jambe, (fibula en latin exprime un lien, ce qui sert à fixer). Le péroné, fortement lié au tibia, donne de la solidité à la jambe, et toutes les lésions à ce niveau compromettent la station debout et la marche. Se briser la jambe traduit nettement une fracture dans le déroulement de la vie et entraîne un questionnement sur sa conduite. Le mot grec est peronê (proprement « cheville », donc clavicula) ; ainsi, le péroné devient-il cette grande et frêle clef du membre inférieur qui ouvre la serrure du pied pour une marche connaissante. La jambe correspond à l’enfance qui est caractérisée par l’activité, la rapidité et la course.
*
*
Michel Odoul, auteur de Dis-moi où tu as mal, je te dirai pourquoi (Nouvelle Édition revue et corrigée Albin Michel, 2002) nous donne sa vision de la jambe, empreinte de la philosophie chinoise :
Le Chemin de Vie ou la Légende Personnelle : Le Chemin de Vie est une sorte de fil conducteur que tout être humain suit au cours de son existence. Nous pouvons le comparer au scénario d'un film ou au « livre de route » des rallyemen actuels. Nous avançons sur ce chemin en utilisant un véhicule particulier qui est notre corps physique. Les Orientaux nous proposent une image fort intéressante pour ce véhicule et ce Chemin de Vie. Nous sommes, disent-ils, comme une charrette, une Calèche qui représente notre corps physique et qui circule sur le chemin qui symbolise la vie ou plutôt le Chemin de Vie. Voyons jusqu'où nous pouvons pousser cette image. [...]
Cette Calèche est tirée par deux chevaux, un blanc (Yang) qui est à gauche et un noir (Yin) qui est à droite. Ces chevaux symbolisent les émotions, ce qui nous montre à quel point ce sont elles qui nous tirent, voire nous mènent dans la vie. La Calèche est conduite par un Cocher qui représente notre mental, notre Conscient. Elle possède quatre roues, deux devant (les bras), qui donnent la direction ou plutôt impliquent la direction donnée par
le Cocher aux chevaux, et deux derrière (les jambes), qui portent et transportent la charge (elles sont d'ailleurs toujours plus grosses que celles de l'avant). À l'intérieur de la Calèche, il y a un passager que l'on ne voit pas. 11 s'agit du Maître ou Guide Intérieur de chacun de nous, de notre Non-Conscient, de notre Conscience Holographique. Les chrétiens l'appellent « l'Ange Gardien ».
[...]
Le bas et le haut : Revenons au corps humain. Ainsi que nous l'avons vu précédemment dans la codification taoïste, le bas est Yin et le haut Yang. Si nous plaçons cela au niveau du corps humain, le haut du corps est donc Yang et le bas du corps Yin. Rappelons-nous cependant de la « relativité » de ces notions. Si nous observons la moitié inférieure du corps, qui dans le relatif du corps est Yin, pour ce qui la concerne elle, le haut de la jambe sera Yang et le bas Yin. L'illustration suivante nous permet de mieux saisir cela. [...]
Prenons un exemple simple. Une personne souffre d'un problème de genou. Le genou faisant partie de la jambe, le premier niveau de relation est avec le Yin de cette personne puisque les jambes font partie du bas du corps. Mais dans la jambe, le genou se trouve juste au milieu, c'est-à-dire entre le Yin et le Yang. Il fait la jonction, l'articulation entre ces deux parties. Le second niveau de relation se situe donc entre le Yang et le Yin. En résumé, c'est donc la relation entre le Yang du Yin et le Yin du Yin qui pose problème et c'est sur ce plan-là que nous chercherons le message et la solution éventuelle.
[...]
Chaque fois que nous aurons mal à une jambe, cela voudra dire que nous vivons des tensions relationnelles. Mais en revanche, cela ne peut pas dire que chaque fois que nous aurons des tensions relationnelles, nous aurons mal à une jambe. Nous pouvons toujours choisir, en fonction des raisons de ces tensions, un autre moyen et un autre lieu d'expression, à moins que nous sachions et choisissions tout simplement de les faire taire.
[...]
Les maux du squelette et de la colonne vertébrale : [...] Les atteintes générales à la structure osseuse sont rares et ont plutôt tendance à se localiser à un endroit précis du corps (jambe, bras, tête, poignet, etc.). À chaque fois, la signification du message sera directement en relation avec cet endroit, mais en sachant que le problème exprimé là est profond, structurel, lié à une croyance fondamentale qui, à tort ou à raison, est perturbée par le vécu de la personne.
[...]
Les membres inférieurs : Ils sont composés de deux parties, la cuisse (cuisse et fémur) et la jambe (mollet, tibia et péroné), et de trois axes importants qui sont leurs articulations principales. Les membres inférieurs sont terminés par une pièce maîtresse, le pied.
Les articulations qui relient, articulent le pied, la jambe, la cuisse et le buste, sont la hanche, le genou et la cheville. Quel est le rôle premier et physiologique de nos jambes ? Ce sont elles qui nous permettent de nous déplacer, d'aller vers l'avant ou vers l'arrière, d'un endroit à un autre et, bien entendu, vers les autres. Ce sont donc nos vecteurs de mobilité qui nous mettent en relation avec le monde et les autres. La symbolique « 'sociale » de la jambe est très forte. C'est elle qui permet les rapprochements, les rencontres, les contacts, d'aller de l'avant. Tout ce qui appartient à la jambe est rattaché au mouvement dans l'espace et notamment l'espace relationnel. Nos jambes sont donc nos vecteurs de relation. Elles sont leur représentation psychologique et leur agent physique potentiel.
Les maux des membres inférieurs : Très globalement, lorsque nous avons des tensions ou des douleurs dans les jambes, cela signifie que nous avons des tensions relationnelles avec le monde ou avec quelqu'un. Nous avons de la difficulté à avancer ou à reculer dans l'espace relationnel du moment. Plus la localisation dans la jambe sera précise, plus elle permettra d'affiner le type de tension que nous vivons et sans doute de le comprendre. Nous allons détailler avec chaque partie de la jambe leurs significations particulières. Il faudra simplement toujours replacer chaque type de signe dans le cadre de base qui est celui des « relations» avec le monde et les autres, Étudions d'abord les articulations de la jambe, la hanche, le genou et la cheville, puis nous passerons ensuite à la cuisse, au mollet et au pied.
[...]
Les maux du mollet, du tibia ou du péroné : Ils vont nous parler de notre difficulté à accepter les changements que notre vécu peut parfois imposer dans nos critères extérieurs de vie. Notre difficulté à changer d'opinion ou de position sur un point de vue habituel de notre relation au monde peut se manifester par une douleur dans cette région de la jambe, voire aller jusqu'à la fracture. Elle se produit lorsque la tension est trop forte et que nos positions sont tellement ancrées, plantées dans le sol, qu'elles ne peuvent admettre la torsion imposée par l'extérieur. C'est alors le tibia ou le péroné, voire les deux, qui «lâche ». Mais la simple «raideur» du mollet signifie déjà que nous avons de la difficulté à «bouger », à donner à la cheville et au pied la possibilité de jouer leur rôle de mobilité, de potentiel de changement de point d'appui dans la vie. C'est de cette difficulté, par exemple, dont nous parlent les points de sciatique qui se manifestent dans cette partie de la jambe. Il s'agit bien entendu toujours là d'une sciatique, avec toute sa signification de base, mais avec en plus la finesse de l'expression par le mollet.
Si la tension se manifeste dans le mollet gauche, elle est en relation avec la dynamique Yang (père). [...]
Si la tension se manifeste dans le mollet droit, elle est en rapport avec la dynamique Yin (mère). [...]
Nous pouvons imager et résumer tout ce qui concerne la partie «basse» de notre corps, nos jambes, dans le schéma qui suit. 11 nous permet de visualiser d'une façon simple ce qui s'y passe et comment.
Chaque fois que nous vivons des tensions dans cette partie inférieure, celles-ci sont le signe que, dans notre rapport à la relation à l'autre (désir, volonté, impossibilité, incapacité, peur, etc.) ou à nous-mêmes, nous vivons une tension équivalente, liée soit à notre incapacité supposée, soit à une incapacitation venant de l'extérieur. Nous sommes en face d'une attitude, d'un rôle ou d'une position, dans laquelle nous ne pouvons, ne savons ou n'arrivons pas à être.
*
*
Patricia Verhaeghe, autrice d'un article intitulé "Le Corps, architecture du temple divin" (Revue Le Son bleu n°2 et 3, juin/septembre 2007) nous permet d'avoir une vision résumée du symbolisme de la jambe :
Les Mystères ont pour seule fonction d’amener tout chercheur de Vérité à révéler les secrets qu’ils contiennent. Décider de percer le sens sacré du corps humain – grand livre de la Vie – revient à percer la Porte des Mystères, autrement dit à dévoiler le sens caché de notre être et par conséquent sa finalité. Or, pour ouvrir cette porte, il nous faut plonger au plus intime de nous-même à la rencontre de Celui en qui nous avons l’être, le mouvement et la vie. Nous découvrons l’œuvre potentiellement divine du Grand Organisateur – Rayon 7 - et la révéler consiste à enlever le voile.
Le corps symbole du temple divin : Le corps est l’instrument de notre âme et le Temple de notre Esprit. La Parole Divine est en effet au centre de notre corps.
Le corps, en tant que livre de chair, nous offre un enseignement d’une très grande richesse. En effet, le langage anatomique relève d’une science secrète en ce sens qu’il est révélateur des secrets de la vie occultés. Il s’agit de retrouver cette Parole sacrée enfermée au plus profond de nous-même par l’intermédiaire des symboles anatomiques. La seule finalité de notre vie étant l’accomplissement du Soi. Notre chair devient alors parlante.
Anatomie symbolique : Il y aurait beaucoup à dire sur les différents organes composant notre corps ainsi que sur les organes des sens mais il faut bien poser un cadre. Je me limiterai donc à une étude succincte des différentes parties de notre anatomie squelettique.
[...]
La jambe : La mortaise tibio-péronière – ou coup de pied – s’articule avec l’astragale, os du tarse qui forme le talon. Le mot astragale vient du latin astragalus mais aussi de aster qui signifie « étoile ». Le terme « astragale » est aussi utilisé en architecture pour désigner la moulure séparant le fût d’une colonne de son chapiteau.
Le tibia, os de la jambe, agit comme un pilier. Il transmet au pied les contraintes provenant de notre verticalité.
Le péroné – du grec peronê ou fibula en latin, quant à lui, exprime la notion de lien, d’agrafe. Il sert en quelque sorte d’attelle au tibia. Le péroné permet également le retournement et, en tant que clef du membre inférieur, il ouvre la serrure du pied pour une marche connaissante.
*
*
Le site La Vague de Vie propose un fascicule intitulé "Le symbolisme des organes du corps humain" (malheureusement non sourcé) dans lequel on peut lire la notice suivante :
JAMBES : Organes de la marche (locomotion), les jambes symbolisent le lien social, le potentiel de mouvement (déplacement pour explorer son milieu), le support d’une structure, tout en gardant une prise de contact avec la Matière ou la Nature. Elles permettent des rapprochements, favorisent les communications, suppriment les distances, donnent accès à toutes les directions, bien que, allégoriquement, il vaille mieux toujours aller de l’avant. Elles expriment la force de réalisation de l’être humain, par la maîtrise de sa libido (au sens large de pulsion de vie et de goût de vivre), pour arpenter la Terre, comme on parcourt ses terres intérieures. Dans ce dernier sens, elles suggèrent les solutions qu’on se propose de chercher pour régler ses problèmes évolutifs ou les réponses qu’on se prépare à trouver à la même fin. Plus elles sont saines et puissantes, mieux elles expriment son besoin de toujours avancer dans la vie, muni des meilleurs moyens et des meilleures connaissances. On les relie globalement à Mercure.
En rêve, les jambes peuvent éclairer la manière dont on prend position et dont on se tient debout. On les associe au degré de confiance, de progrès, d’équilibre, d’indépendance et de maîtrise. Elles appellent à répudier tout système de deux poids et deux mesures. Elles renvoient à l’enfance, caractérisée par l’activité, la rapidité, la spontanéité et la course.
Les affections aux jambes : Elles permettent d’aller vers l’avant ou l’arrière, d’un endroit à un autre, de se déplacer, de produire des mouvements dans l’espace ou d’établir des relations. Ces vecteurs de la mobilité précisent comment on se met en relation avec le monde, comment on approche les autres (rencontres et contacts), comment on progresse. Peur d’aller de l’avant, de ne pas arriver à son but, de manquer de temps ou de moyens (d’argent). Difficulté à avancer ou à reculer dans l’espace relationnel du moment. Peur de se sentir limité dans ses choix ou ses manœuvres. Refus des contacts avec les autres, contacts limités à l’aspect utilitaire des relations. Peur de l’avenir. Manque de réalisme. Blocages inconscients qui briment ses objectifs.
JAMBES AMPUTÉES : On a perdu tous ses moyens de progresser. Les solutions qu’on envisage risquent d’entraîner l’immobilisation et la stagnation, d’engendrer une catastrophe.
JAMBES EN ÉTAT DE MARCHE : Cette image brosse un tableau de sa vie, exprimant son goût de progresser et d’évoluer, bien qu’à l’inverse on puisse avoir commencé à se laisser aller au gré des évènements ou des situations. Une marche facile confirme l’atteinte temporaire d’une vie psychique aisée. Par la qualité de la marche, on peut évaluer la causalité qui unit les actes (les choix) et les effets (les résultats) pour mieux orienter sa vie et lui assurer plus de qualité. La marche aisée peut encore exprimer son goût du confort et du bien-être ou son besoin de réalités parfaitement tangibles. Globalement, la marche éclaire le comportement personnel général. L’impossibilité de se déplacer dénote un sentiment d’impuissance : peur de l’extérieur ou des autres, oppositions présumées, discussions stériles, litiges qui font obstacle à son progrès; querelles d’intérêt, rivalités oppressantes. La marche à reculons traduit des craintes, de l’angoisse, des soucis qui apparaissent difficiles à résoudre dans la situation présente. On a l’impression de régresser ou d’involuer.
[...]
PÉRONÉ : Étroitement associé au tibia, cet os, qui réfère à un lien ou à une fixation, donne de la solidité à la jambe. Il indique le degré de continuité dans le déroulement de la vie et il renvoie à un questionnement sur la conduite (marche vers la connaissance).
[...]
TENDON D’ACHILLE : Cette réunion épaisse de muscles à la partie postérieure de la jambe symbolise les ressources de l’âme, vulnérables, en cas de faiblesse psychique.
Les affections du tendon d’Achille éclairent des pertes de ressources au niveau de l’âme. Faiblesse psychique. Vulnérabilité
*
*
Contes et légendes :
Nicole Belmont, dans un article intitulé "Les croquemitaines, une mythologie de l'enfance ?." (In : Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d'ethnologie, n°2-4/1998. Les croquemitaines. Faire peur et éduquer. pp. 7-19) s'interroge :
Faut-il classer parmi les êtres anthropmorphes les croquemitaines qui sont des parties détachées du corps humain se comportant de façon autonome ? La Jambe crue et l'Œil ouvert a été dénombrée par Charles Joisten parmi les croquemitaines les plus répandus en Ariège. Il rapporte la description qu'on en donne à Saint-Jean-de-Verges : « une jambe avec un œil ouvert et une corne », et elle court plus vite que tout le monde. Il signale que la Jambe Crue est très populaire en Languedoc ; Daugé rapporte que la Came crusese nourrit du sang des enfants ; D. Fabre et J. Lacroix signalent la Cambacrusa, jambe crue qui marche seule dans les rues (Joisten, 1962, pp. 56-57). On trouve aussi la Jambe rouge dans la Drôme. L. Gandini cite la description de Gamba con le braccia, donnée par un enfant italien : « C'est une jambe toujours pliée avec des bras toujours droits et longs ; il prend les en¬ fants par la tête et il les emporte dans les bois » (Gandini, 1975, p. 153).
Littérature :
Contreblason de la Jambe.
ET toy la jambe avec ta belle greve
A ton genou donneras tu point treve ?
Il ne s'en fault que la nuict seulement
Que ton genou ne soit incessamment
Estrainct au tour & lyé de jartiere
Pour te monstrer la greve plus legere.
Les Blasons anatomiques du corps féminin, Paris, 1543.
Les Jambes de bois
Quand on perd une jambe à la guerre
On en met une autre en bois
Car il paraît qu’on a beau faire
Les jambes ne repoussent pas.
Mais peut-on me dire pourquoi
Il ne pousse pas de feuilles sur les jambes de bois ?
Des feuilles toutes vertes
Avec des tas d’insectes,
Des feuilles toutes belles
Où les papillons viendraient réparer leurs ailes…
Le soleil voudrait se mettre de la partie
Il pourrait y grimper des fruits,
Et ça serait tout de même chic
D’avoir sur soi des poires
Qu’on prendrait sans histoires
Des pommes et des prune et des petits pois chiches !
Si tous les hommes avaient une jambe de bois
Qu’on arroserait bien les jours qu’il ne pleut pas
ça f’rait une forêt qui n’en finirait pas.
René de Obaldia, "Les jambes de bois", Innocentines, Editions Bernard Grasset, 1969.
*
*