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La Noix de galle




Étymologie :


Étymol. et Hist. 1. Av. 1105 gales « noix de galle, galles du chêne » (Gl. fr. de Raschi, 534, p. 75 ds T.-L.) ; ca 1256 galles (A. de Sienne, Rég. du corps, 44, 17, ibid.) ; 2. ca 1160 jale « (d'un animal) excroissance cornée de l'épiderme ; sorte de rogne » (Eneas, 3936, ibid.). Empr. au lat. de l'époque impériale galla « galle, noix de galle ».


Lire également la définition du nom galle afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Pomme de chêne -

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Vertus médicinales :


Johann Alfred Ulsamer, auteur de la Pharmacie domestique : recueil des plantes médicinales qui doivent se trouver dans toute pharmacie domestique bien ordonnée ; collection faite pour le peuple dans les jardins, les prairies, les champs et les forêts. (Koesel, 1894) :


Et ce noble arbre [le chêne] sera encore pour nous un remède , une consolation, un médecin sûr et habile. Ses propriétés sont renfermées dans son écorce, ses feuilles, ses fruits et la noix de galle, qui sont d'un prix inestimable.

[...]

Noix de galle. - Ce produit n'est autre que de petites excroissances produites sur le tronc ou les feuilles du chêne par la piqûre d'une espèce de guêpe. Les noix de galles les meilleures et les plus actives nous viennent de la Turquie et de la Hongrie. On saupoudre de noix de galle pulvérisée, les blessures saignantes ; elle fait disparaître la chair morte autour des plaies ; mise dans une dent creuse, cette poudre calme les douleurs.

Contre les vomissements violents il est bon de placer sur l'estomac un linge trempé dans un mélange d'eau de pluie et de vinaigre, dans lequel on a fait bouillir de la noix de galle. En cas d'empoisonnement, par des sels métalliques ou des alcaloïdes qui peuvent être neutralisés par l'acide tannique, on peut encore employer la noix de galle : tels sont les empoisonnements par le plomb, l'antimoine, le cuivre, l'étain, l'émétine, la vératrine, la colchicine etc.

Le chêne voit naître bien des générations ; il les voit se réjouir durant leur vie, puis se lamenter, se fatiguer, et, finalement, s'en aller toutes dans la froide. demeure du tombeau. Et comme il semble prendre part à nos chagrins et soulage une partie de nos misères, il est et demeurera pour tous un ami cher, un consolateur apprécié et un médecin sûr.

 

Dominique Champault, "La naissance à Tabelbala". (Journal des Africanistes, 1953, vol. 23, no 1, pp. 87-101)


Les suppositoires de wez-weza (Chlamydophore pubescens) et de noix de galle pulvérisée, introduits dans le vagin avant les règles, auraient la propriété de les rendre plus abondantes et d'assurer la conception sept jours plus tard.

[...]

D'une femme à terme on dit : en tazz'ato — sa lune est montée — Aux premières douleurs elle boit une tisane de fenugrec, de clous de girofle, de feuilles de myrte et de noix de galle.

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Usages traditionnels :


Tatiana Gersten, autrice de "La problématique des encres ferro-galliques à travers l’observation d’un manuscrit musical non autographe du 18es." (In : CeROArt. Conservation, exposition, Restauration d’Objets d’Art. Association CeROArt asbl, 2010) rappelle l'importance de la noix de galle dans la fabrication des encres noires :


Introduction : Ce sont des milliers de documents sur papier et parchemin qui sont touchés par la corrosion due aux encres ferro-galliques : manuscrits d’écrivains et de scientifiques, documents officiels, dessins, manuscrits musicaux,… En effet, les encres ferro-galliques, appréciées pour leur couleur et la facilité de leur mise en œuvre, sont les encres manuscrites les plus largement utilisées en Occident du Moyen Age au XXe siècle. [...]


Composition de l’encre ferro-gallique : Les quatre principaux ingrédients qui la composent sont les tannins végétaux extraits de noix de galle et le sulfate de fer pour la formation des composés colorés, la gomme arabique en tant que liant et l’eau en tant que solvant. Certaines recettes montrent que des additifs étaient parfois ajoutés pour donner plus de brillant à l’encre, en améliorer la couleur… On trouve ainsi par fois du vin, du vinaigre, des colorants, du sucre, de l’alun…

Les tannins végétaux sont des composés de glucose et d’acides organiques divers, dont l’acide gallique et certains de ses dérivés. Ces tannins extraits des noix de galle par décoction ou macération sont mélangés au sulfate de fer pour former un composé soluble de couleur pâle. Il résulte également de cette réaction la présence de nombreux ions H+ responsables de l’acidité de l’encre. Dans la plupart des très nombreuses recettes que l’on connaît, le sulfate de fer est en excès, ce qui explique la présence d’ions métalliques libres dans l’encre, ions qui n’ont pas pu réagir avec les tannins.

Au contact de l’air, ces complexes ferro-galliques s’oxydent pour former les composés noirs insolubles qui donnent sa couleur caractéristique à l’encre.

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Croyances populaires :


Selon Antoine Zebouin, auteur de "Croyances populaires à Mossoul, Turquie Asiatique". (In : Anthropos, 1915, pp. 266-269) :


De même, la noix de galle et le bibelot sont suspendus au cou des petits enfants, et des animaux chers à leurs maîtres : cela les empêche en outre de leur être ravis par la mort.

 

Dominique Champault, dans un article intitulé "Un collier d'enfant du Sahara algéro-marocain." (Journal des Africanistes, 1956, vol. 26, no 1, pp. 197-209) mentionne également la noix de galle :


La noix de galle : taya, est très généralement utilisée pour la coiffure féminine, en bouillie délayée à l'huile. Elle a la réputation de contribuer à l'allongement de la chevelure. Elle est employée ici pour l'odeur qu'elle dégage. En effet, les jeunes enfants soumis à celle qu'exsudent les aisselles de certaines femmes, dépérissent et refusent de s'alimenter. Telle est du moins l'explication la plus communément donnée de l'inappétence des bébés. Taya, comme nua le clou de girofle, surmonte heureusement toute mauvaise odeur.

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Symbolisme :


Gustave Mondain, évoque dans son article intitulé "Les Malgaches et l’Ancien Testament". (In : Études théologiques et religieuses, 6e année, n°1, 1931. pp. 94-109) la noix de galle comme composante d'un rituel ordalique :


Il n’est pas jusqu’à la pratique de l’ordalie qui n’ait pu faire le sujet de quelque rapprochement. Cette pratique, comme on le sait, est très répandue à Madagascar. Elle se présente sous des formes variées suivant la tribu : la plus courante est celle qu’on désigne sous le nom de tanguena à laquelle nous avons déjà fait allusion à propos de la circoncision : on faisait avaler à l’accusé un peu d’eau dans laquelle on avait jeté une petite quantité de pulpe provenant d’une sorte de noix de galle assez vénéneuse qui pousse sur certains arbres de la forêt malgache ; avec cette mixture, le patient ingurgitait trois petits morceaux de peau de poulet et de l’eau de riz tiède ; l’opérateur invoquait par une prière solennelle l’esprit qui se localisait dans la noix de galle, et qui devait déclarer la culpabilité ou l’innocence de l’accusé. En cas d’innocence, ce dernier devait rendre les trois morceaux de peau avalés ; au cas contraire, l’esprit en retenait un ou deux.

 

Marie-José Latour, Lis tes ratures. (In : L’en-je lacanien, 2011, no 1, pp. 69-79) :


Jadis, pour lire, il fallait préalablement abluer le texte, soit le laver en passant légèrement une liqueur préparée avec de la noix de galle, cela afin de faire revivre l’écriture, de la faire revenir à elle-même. Quand se retrace la trace même, difficile alors de distinguer le tracé de l’effacement. Quelque chose de cela est en jeu dans la lecture, la lecture est un effacement. En effet, il n’y a pas de trace pour le parlant qui ne se conjoigne à l’effacement. Cette conjonction est cela même qui définit le sujet 18. À plusieurs reprises dans son séminaire, Lacan va préciser ce qu’il en est du rapport de l’être parlant à la trace et à son effacement, soit au signifiant : « Le signifiant est une trace effacée 19 . » Lacan insiste sur l’effacement, car c’est ce qui se pose comme pouvant être effacé qui inaugure le signifiant 20, le signifiant étant ce qui subsiste de cet effacement, un « effaçon ». Annuler un trait par une barre en inaugure sa dimension signifiante. Barrer une barre, c’est porter un non sur le nom, le minimum d’une signature. La barre est l’occasion à ce que produise l’écrit 21, ce n’est pas pour autant la lettre.

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Mythologie :


Dans la thèse de Maria Adelaide da Silva Cristóvão, intitulée La Moira enchantée au Portugal : mémoires d'un récit mythique. (Université Paris 10, 2007) :


Du Nord au Sud du Portugal, des ruines d'anciens monuments ou de villages abandonnés, ainsi que des rochers, des dolmens, des grottes, des fontaines, des puits et des cours d'eau accueillent en leur sein un être fantastique, une Moira enchantée, qui y garde un trésor et attend un humain qui voudra bien briser son enchantement. C'est sous forme tantôt humaine, tantôt animale (serpent ou chèvre), tantôt mi-femme mi-animal serpent à partir de la taille, que la Moira se laisse apercevoir. On la voit à la Saint-Jean, elle coiffe ses cheveux d'or au soleil, elle tisse avec des métiers à tisser en or ou encore elle offre des figues, des noix de galle et du charbon qui ensuite se transforment en or. Pour briser son enchantement elle demande aux bergères du lait et du pain et aux bergers de les embrasser quand elle a pris la forme d’un serpent. Il s'agit de récits mythiques, hérités de la mémoire collective, élaborés incessamment par les apports individuels qui contribuent à l'identité de la communauté dans une perspective de vie et de mort, donc de fécondité et de fertilité.

 

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