Étymologie :
Étymol. et Hist. xiiie s. (Le Livre des Simples Medecines, éd. P. Dorveaux, § 52). Empr. au lat. médiév. persicaria (ca 1250 ds Latham ; v. aussi Nierm.), dér. de persicus « pêcher ».
Étymol. et Hist. 1548 (G. Gueroult, Hist. des plantes de L. Fousch, CCXXXV ds Gdf. Compl.). Part. passé subst. de renouer*.
Lire également les définitions des noms persicaire et renouée afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Voir aussi la fiche consacrée à la Bistorte.
Autres noms : Polygonum amphibium - Persicaire acide - Renouée amphibie -
Renouée des oiseaux : Polygonum aviculare - Aviculaire - Centinode - Cent-nœuds - Chaméléon - Corigeole - Couche - Crépinette - Herbe à suron - Herbe aux cent nœuds - Herbe aux cochons - Herbe de fer - Herbe de pourceau - Herbe des Saints-Innocents - Herbe nouée - Herniole - Lâchée - Langue de passereau - Langue-passerine - Noueuse - Ongle de rat - Porcine - Poulette - Renouée âcre - Renouée mâle - renouée trainasse - Sanguinaire - Soleil de terre - Tire-goret - Traînante - Tramiane -
Polygonum Hydropiper, L. - Curage - Herbe à crapaud - Renouée poivre d'eau - Persicaire âcre - Persicaire brûlante - Piment aquatique - Piment d'eau - Renouée âcre
Persicaria maculosa - Fer à cheval - Herbe Proserpine - Maison du Soleil - Persicaire douce - Pied-rouge - Pilingre - Renouée persicaire -
Polygonum viviparum - Bistorta vivipara - Renouée vivipare -
*
*
Botanique :
*
Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques des Renouées :
Polygonum amphibium : Propriétés Physiques et Usages Médicaux. — La racine de cette plante qu'on recueille à l'automne est la partie principalement usitée ; elle est insipide au goût et a quelque ressemblance avec la salsepareille ; on l'a quelquefois vendue pour cette dernière. On lui attribue les mêmes propriétés médicales ; on lui a vu guérir des dartres et autres maladies de la peau. Plusieurs auteurs en ont fait un succédané de la salsepareille comme dépuratif (Burtin, Coste, Willemet). Cazin conseille de l'expérimenter dans le traitement des accidents syphilitiques cutanés. On emploie à l'intérieur la décoction (100 grammes pour 1500 réduits à 1 kilogramme) et pour l'usage externe une décoction plus concentrée encore. L'extrait se prescrit à la dose de 1 à 2 grammes.
[...]
Polygonum Hydropiper : Propriétés Physiques et Usages Médicaux. — Cette plante est inodore ; ses feuilles ont une saveur âcre, piquante, poivrée et même brûlante. Elle est rubéfiante et vésicante. Son nom de persicaire lui vient de la ressemblance de ses feuilles avec celles du pêcher. Cette plante est excitante et diurétique ; elle a été autrefois vantée dans la gravelle, le catarrhe vésical, l'œdème, l'anasarque et les engorgements des viscères abdominaux. On la croyait aussi utile dans la chlorose et contre l'aménorrhée. L'usage interne de la persicaire est aujourd'hui complètement négligé ; des faits soigneusement observés mettraient à même d'apprécier les avantages que son énergie indique (Cazin). A l'extérieur, ses usages sont nombreux, on l'emploie comme détersive sur les ulcères atoniques, scrofuleux, contre les engorgements lymphatiques. On s'en sert en gargarisme dans les angines muqueuses et gangréneuses. Ses propriétés toniques et stimulantes paraissent la rapprocher de la menthe et de la pyrèthre.
Formes et doses. — Poudre, 1 à 4 grammes. - Infusion, 5 à 15 grammes par kilogramme d'eau. Extrait, 50 centigrammes à 2 grammes. - Extérieur : décoction, 15 à 30 grammes par kilogramme. - Lotions, fomentations.
Polygonum aviculare : Usages Médicaux. — Cette petite plante inodore et presque insipide passe pour astringente, styptique et vulnéraire. On lui a reconnu des propriétés qui la rapprochent un peu de la ratanhia. Elle a été prescrite dans les vomissements de sang, les hémorrhagies, la diarrhée, la dysenterie, les flux muqueux. Les graines pulvérisées ont une odeur nauséeuse ; on les dit fortement émétiques et purgatives. Cette plante est inusitée. Dubois et Cazin rappellent l'attention des médecins sur son usage comme antidiarrhéique.
*
*
Usages traditionnels :
Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :
La Savoie possède peu de plantes dont les rhizomes non tuberculeux soient alimentaires. M'ont été indiquées comme telles : le Polygonum viciparum dans nos hautes montagnes (le Polygonum bistorta n'est pas comestible)...
[...]
Les scrofules et les maladies de la peau sont traitées par la persicaire, Polygonum persicaria et lapathifolium.
*
*
Croyances populaires :
Dans Le Folk-Lore de la France, tome troisième, la Faune et la Flore (E. Guilmoto Éditeur, 1906) Paul Sébillot recense nombre de légendes populaires :
Dans l'Aube, on met de l'herbe à cochons (Polygonum aviculare) dans une poche du côté du cor que l'on veut faire partir en disant : « Que mon cor s'en aille à l'aide de cette herbe. »
*
Symbolisme :
Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), la Renouée des oiseaux (Polygonum aviculare) a les caractéristiques suivantes :
Genre : Féminin
Planète : Saturne
Élément : Terre
Pouvoirs : Guérison ; Divination.
Utilisation rituelle : L'herbe aux cent-nœuds, accrochée au bouton de porte d'un jeune homme qui vient de se fiancer, signifie qu'il va se laisser complètement ficeler par celle qu'il épouse, qu'il n'aura pas son mot à dire chez lui et qu'il devra vivre dans les jupons de sa femme.
Utilisation magique : En Vénitie, la tradition veut qu'on consulte une tige de Renouée des oiseaux pour connaître la destinée après la mort. On commence par la pointe, en remontant vers les racines ; sur le premier nœud on dit : « Paradis » ; sur le deuxième : « Purgatoire » ; sur le troisième : « Enfer », et ainsi de suite. Le mot qu'on prononce lorsqu'on est arrivé au dernier nœud est censé dire la vérité. Dans d'autres régions d'Italie, la même herbe apprend aux filles si elles se marieront au village, ou hors du village. Elles brisent un nœud en disant : «Je me marierai ici »; un deuxième en disant : «Je me marierai dehors ». Le mot qu'elles prononcent, arrivées au dernier nœud, leur révèle leur sort.
Pour ne plus souffrir des rhumatismes, il faut ligaturer le membre atteint avec des tiges de Renouée et aller uriner sur un pied d'estragon (Montpezat-de-Quercy, Tarn-et-Garonne)
*
*
Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, il y a deux entrées pour les renouées :
Renouée : Appelée aussi « maison du Soleil » ou « herbe Proserpine », cette plante herbacée très fertile, vivement conseillée aux mélancoliques, est un aphrodisiaque puissant : « Si quelqu'un en boit, elle l'excitera beaucoup à l'amour et lui donnera des forces pour user du coït », dit Albert le Grand. Avoir sur soi de la renouée guérit les maux de cœur et d'estomac et soulage les néphrétiques. Sa racine portée dans les mêmes conditions guérit les maladies ophtalmiques.
Contre les maladies de peau, il faut frotter la partie atteinte avec une renouée humide de rosée, cueillie le matin de la Saint-Jean et contre les rhumatismes, « ligaturer le membre atteint avec des tiges de renouée et aller uriner sur un pied d'estragon », selon un usage du Tarn-et-Garonne.
On peut supposer que la plante avait également un certain pouvoir sur les menstruations comme l'évoque la prière suivante à prononcer lors de sa cueillette : « Herbe Proserpine, fille du roi Horcus, comme tu as arrêté la fécondité de la mule, ainsi arrête le flux de sang d'une femme ».
Ceux qui ont été mordus par un chien enragé doivent éviter le contact de la renouée : ils risqueraient un nouvel accès de rage, selon une croyance du XVIe siècle.
La renouée des oiseaux sert à la divination : en Italie, les jeunes filles qui veulent savoir si elles trouveront un époux dans leur village ou ailleurs interrogent chaque nœud de la plante en récitant : « Je me marierai ici, je me marierai dehors », tandis qu'en Vénitie, pour connaître son sort dans l'au-delà, on dit à chaque nœud de sa tige, de la pointe vers les racines : « Paradis, Purgatoire, Enfer » et ainsi de suite.
Persicaire : La feuille de cette plante des lieux humides, du genre renouée, pote sur son limbe une tache rouge qui, selon une superstition belge, ne serait pas moins qu'une tache menstruelle de la Vierge ! En Flandre, on l'attribue au sang du Christ car la persicaire se trouvait au pied de la croix.
Par lien de sympathie, la feuille, présentée de façon à ce que la fameuse tache touche le nez, en arrête les saignements : présentée de l'autre côté, elle les provoque. Au XVIIe siècle, on préconisait l'application de persicaire sur les ulcères. La guérison survenait soi on enfouissait la plante à l'endroit même où elle avait été cueillie.
*
*
Mythologie :
Aurore Petrilli dans un article intitulé "Le trésor du dragon : pomme ou mouton ?" paru In : Gaia : revue interdisciplinaire sur la Grèce Archaïque, numéro 16, 2013. pp. 133-154 évoque le pouvoir magique de la renouée persicaire, lié au symbolisme de l'or :
L’or : L’or a toujours été un métal recherché et il a, très tôt, revêtu une forte symbolique, quelle que soit la civilisation qui en faisait usage. L’Antiquité grecque ne déroge pas à cette règle et les Anciens estimaient beaucoup ce métal. L’or, c’est le soleil. Comme le dit Dacosta, c’est la « lumière solaire matérialisée » (Dacosta, 1991, p. 99 ; Diel, 1966, p. 172). L’énergie de l’or est colossale. Sa fonction symbolique, outre celle de conférer de manière évidente un caractère précieux à un objet donné (même très courant), est double. Cette double expression figurée est équitablement partagée entre les deux mythes.
Le premier thème est celui de l’immortalité qui s’exprime en premier lieu dans l’épisode des pommes des Hespérides. En effet, l’or est une matière réputée imputrescible, inaltérable et presque indestructible. Cette inoxydabilité lui confère d’emblée une sorte de pureté qui l’associe au divin ( Fontana, 1995, p. 66). En revêtant les fruits de cette matière on les rend imputrescibles, éternels. Ils le sont d’autant plus s’ils sont entièrement faits d’or. Leur vol doit donc, par une action sympathique, conférer à Héraklès leur immortalité. Celle-ci ne pourra pourtant pas être effective tant que le héros ne se sera pas consumé sur le bûcher de l’Œta.
Le second thème est celui du pouvoir et de la royauté (Jourdain Annequin, 1989, p. 23) qui s’exprime surtout dans l’épisode de la Toison d’or. Ici, l’or de la Toison doit légitimer l’accession au trône de Jason. Ces deux thèmes sont toutefois assez proches, parfois même associés. La Toison d’or représente également un gage de prospérité pour qui la détient. Il est compréhensible qu’Aiétès ait quelques réticences à s’en défaire. Enfin, elle peut aussi symboliser une certaine immortalité à travers la conservation et les honneurs rendus à la dépouille de l’animal.
Pour finir sur le pouvoir de l’or dans l’Antiquité, ajoutons simplement qu’il existe une plante, nommée Polygonum Idaeum ou Persicaire de l’Ida, qui aurait la capacité d’aurifier les dents des moutons qui la broutent. Cette plante aux feuilles duveteuses et aux fleurs d’un rose très pâle est connue depuis l’Antiquité, notamment par les bergers qui remarquèrent cette étonnante vertu. Jamais utilisée en cuisine, elle servait en revanche beaucoup en médecine, notamment contre les maux de dents (Psilakis, 1990, p. 21). Le pas est vite franchi qui relie la coloration des dents des moutons à une action magico-médicinale contre les douleurs dentaires et confirme un peu plus l’action bénéfique et protectrice de l’or.
*
*