Étymologie :
Étymol. et Hist. 1314 (Chirurgie Henri de Mondeville, éd. A. Bos, no 1799). Empr. au lat. médiév. tormentilla « id. » 1250 ds Latham, dér. dimin. de tormentum (v. tourment), à cause des propriétés curatives de cette plante ; cf. l'a. m. fr. tormentine « id. » ca 1270 (Et. G. Paris, 266 d'apr. FEW t. 13, 2, p. 44a) − 1530, Palsgr., p. 284 : tourmentine, et le lat. tormina « mal de ventre ».
Lire également la définition du nom tormentille afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Potentilla erecta - Herbe au diable - Herbe de Sainte Catherine - Potentille dressée - Potentille tormentille -
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Botanique :
Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la :
Propriétés physiques et Chimiques. - Cette racine est oblongue, tuberculée, brune au-dehors, rougeâtre au- dedans, dure, très pesante ; son odeur est nulle ; sa saveur styptique et un peu aromatique ; elle offre quelque ressemblance avec celle de la bistorte qui est plus rouge et plus astringente. Elle contient une grande quantité de tannin, de la gomme, de la myricène, de la cérine, une huile volatile, des matières extractives (Messner).
Usages Médicaux. - La tormentille est un de nos meilleurs astringents indigènes ; au siècle dernier elle était très employée dans la diarrhée, la dysenterie, l'hématurie et autres hémorragies ; on l'employait comme adjuvant à la médication antiscorbutique. Il résulte d'expériences comparatives faites par M. Dausse, relativement aux quantités de tannin contenues dans les racines de tormentille et de ratanhia, que 5 grammes d'extrait de la première en valent 4 de la seconde. M. Dausse a constaté aussi que les préparations de tormentille exhalent une légère odeur de rose. Les usages de cette plante sont ceux de tous les astringents ; à l'intérieur elle est recommandée dans les flux muqueux ou sanguins et contre les fièvres intermittentes ; à l'extérieur, en gargarisme pour raffermir les gencives et dans le relâchement de la luette ; en application locale pour ranimer les ulcères baveux. On la dit aussi vulnéraire et on l'applique sur les contusions , sur les ecchymoses. Elle entre dans la thériaque et le diascordium. La dose de la poudre est de 2 à 4 grammes et celle de la décoction de 8 à 50 grammes par kilogramme d'eau ; celle de l'extrait de 1 à 4 grammes.
La racine du Potentilla fragariastrum, Ehr., (Fragaria sterilis, L.), Potentille fraisier, est inodore et d'une saveur légèrement astringente ; les feuilles sont inodores et possèdent une saveur douceâtre.
Caroline Munari, autrice d'une Investigation phytochimique de plantes alpines (Thèse Doctorale, Université de Genève, 2006) vient confirmer ces usages :
Utilisations médicinales et traditionnelles des Potentilla : Parmi le genre Potentilla, trois espèces ont été ou sont toujours considérées comme officinales : Potentilla anserina L., Potentilla erecta (L.) Raeuschel et Potentilla reptans L. [Hänsel et al., 1994].
L’espèce la plus connue est sans doute Potentilla erecta appelée aussi Tormentille ou Herbe au Diable. Historiquement, les rhizomes de la Tormentille étaient utilisés en usage externe en rinçage et gargarisme contre les stomatites et les angines, pour traiter les maux de dents et la poudre moyennement fine était considérée comme un excellent dentifrice. Des bains et des compresses en cas d’ulcères, de brûlures, d’engelures ou d’hémorroïdes étaient aussi préconisés. De nombreux usages internes sont répertoriés tels que pour la dysenterie, les ulcères, la goutte, les sciatiques, la fièvre et les affections pulmonaires, cardiaques et hépatiques. Les feuilles servaient à combattre la fièvre, l’épilepsie, les ictères ; elles étaient aussi employées en compresses pour soigner les plaies [Schaffner et al., 1992 ; Hänsel et al., 1994 ; Wichtl et Anton, 2003].
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En raison de leur teneur élevée en tanins, ces différentes Potentilla ont des indications très similaires découlant de ces composés. Elles ont des propriétés astringentes, anti-inflammatoires et sont utilisées par voie interne comme antidiarrhéique, dans les gastroentérites et les dysenteries ainsi que dans la symptomatologie hémorroïdaire. Par voie externe, elles sont utilisées dans les inflammations des muqueuses buccopharyngées, notamment en gargarismes, en lavage et badigeonnage [Bruneton, 1999 ; Wichtl et Anton, 2003]. Une étude a mis en évidence sur les extraits aqueux de Potentilla erecta et Potentilla anserina une inhibition in vitro de la biosynthèse des prostaglandines et de l’exocytose induite par le PAF (platelet activating factor), pouvant résulter en un possible effet anti-inflammatoire [Tunon et al., 1995]. Par voie interne, les tanins exercent un effet antidiarrhéique et antiseptique clairement démontré [Bruneton, 1999]. Une étude contrôlée, randomisée, en double aveugle effectuée pour tester l’efficacité d’un extrait de Potentilla erecta lors de gastro-entérite chez les jeunes enfants (principalement dues aux rotavirus) confirme encore cette indication [Subbotina et al., 2003].
Plus récemment, d’autres activités pharmacologiques ont été mises en évidence à partir d’extraits et ont montré sur le rat un pouvoir bactériostatique, molluscicide contre l’hôte intermédiaire du vecteur de la schistosomiase (Potentilla erecta (L.) Rausch) et antiviral [Schaufelberger et Hostettmann, 1983 ; Vennat et al., 1992 ; McCutcheon et al., 1995], ainsi que des effets antiallergiques, antihypertensifs, antiulcéreux (Potentilla reptens L.) et hypoglycémiques (Potentilla fulgens L.) [Syiem et al., 2002 ; Wichtl et Anton, 2003; Gürbüz et al., 2005].
De nombreux tanins, hydrolysables ou condensés ont des propriétés antioxydantes et antiradicalaires. Diverses études effectuées sur des Potentilla ont confirmées ces activités. Ainsi, la fraction hydrosoluble de Potentilla erecta agirait comme capteur de l’anion superoxide et serait donc antiradicalaire. Les pentamères et hexamères de proanthocyanidines seraient les plus actifs [Vennat et al., 1994]. Une autre étude portant sur le même genre a confirmé les propriétés antioxydantes de ces proanthocyanidines par le biais de l’inhibition de la lipoperoxydation et de l’élastase, une enzyme protéolytique [Bos et al., 1996]
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Usages traditionnels :
Bruno Bonnemain, auteur de "L’Histoire de la pharmacie via l’Internet (45)." (In : Revue d'histoire de la pharmacie, 101e année, N. 383, 2014. pp. 412-415) rapporte un usage connu chez les éleveurs :
Les diarrhées sont un problème fréquent chez les porcelets. Une consultation systématique de la littérature effectuée par les vétérinaires du FiBL Hannah Ayrle et Michael Walkenhorst a montré qu’à part le thym, la camomille, l’échinacée ou la potentille tormentille, l’ail pourrait aussi servir à prévenir les diarrhées des porcelets.
Regina Hofmann-De Keijzer et Andreas G. Heiss, auteurs de La teinture à la Préhistoire : matériaux, techniques et analyses. (Journée thématique de l’APRAB, Supplément n°5, 2015) évoquent un usage de la tormentille non actualisé (!) :
Les couleurs brunes sont relativement faciles à obtenir en utilisant des tanins provenant d’espèces sauvages largement disponibles, par exemple de l’écorce de chêne, des galles de chêne ou des rhizomes de Potentille tormentille (Potentilla erecta L.). Il est donc étonnant que ces composés aient rarement été détectés dans les textiles préhistoriques. Une des raisons serait que la laine naturelle de mouton brune a simplement été utilisée pour obtenir des couleurs brunes. Dans la production textile de l’âge du Bronze et du premier âge du Fer, les tanins étaient très probablement utilisés pour obtenir de la couleur bleue à partir du Pastel des Teinturiers et pour obtenir du noir gallo-tannate.
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Symbolisme :
Selon Joan Tocabens, auteur de Herbes magiques et petites formules : Sorcellerie en Roussillon et autres Pays Catalans, (Perpignan, Ultima Necat, 2012) :
En Catalogne, le rhizome de la potentille tormentille était traditionnellement réduit en poudre et mélangé avec de l'eau pour être utilisé comme philtre d'amour.
Lucien Baillaud, auteur d'une Nomenclature botanique : noms des plantes en duo. (In : Le Journal de Botanique, 2012, vol. 57, no 1, pp. 3-36) évoque un moyen mnémotechnique fondé sur une mémoire populaire :
Aide à la mémoire : À la vue d’une plante, son nom peut revenir immédiatement à la mémoire du botaniste. Pour le débutant, cette acquisition de la connaissance est facilitée si le nom est une sorte d’évocation de la plante. On est souvent loin du compte : parmi nos ouvrages français usuels, seule la Flore de Fournier renseigne sur l’étymologie des noms linnéens, c’est rarement une évocation efficace.
Un aspect confidentiel de la connaissance du nom des plantes ou plutôt de leur mémorisation réside dans les procédés mnémotechniques, souvent appréciés des étudiants, mais pouvant prêter à confusion. Certains sont traditionnellement enseignés de maître à élèves, sans qu’on sache depuis quand, ni quels en sont les auteurs. Ils peuvent pâtir des modifications de la nomenclature scientifique. B. de Foucault (1993) les a introduits dans la question générale des noms des plantes ; il s’agit toujours de repérer des associations d’idées, des points communs, des invariants. Il a révélé plusieurs des procédés dont il se sert : [...]
En voici quelques autres : [...]
Potentilla erecta, la Tormentille, naguère connue sous le nom de Potentilla Tormentilla, se tourmentait de n’avoir que quatre pétales alors que ses congénères en ont cinq, me signale Mme Cécile Lemoine, qui ajoute : elle est devenue Potentilla lamentosa lors de reconnaissance de plantes que l’on faisait aux examens de botanique.
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