Étymologie :
Étymol. et Hist. I. Organe central de la circulation. A. Ca 1050 « siège de la vie » (Alexis, éd. Ch. Storey, 445 : Ço'st granz merveile que li mens quors tant duret) ; 1130-40 (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 62 : Ele ama Deu et Deu l'ama, Trestot son cuer li adona). B. Ca 1100 au propre (Roland, éd. J. Bédier, 2965 : [Li emperere ad fait] tuz les quers en paile recuillir). C. Ca 1100 p. ext. « la poitrine » (ibid., 3448 : L'escut li freint, cuntre le coer li quasset). D. 1195-1200 « siège des sensations physiques » (Renart, éd. Martin, branche 11, 565 : il avoit a son cuer grant fein); ca 1200 « estomac » (ibid., branche 9, 1724 : A pou que li cuers ne me faut) ; xiiie s. « région épigastrique » (J. Le Marchand, Mir. N.-D. de Chartres, 5 ds T.-L. : a vomir les convenoit Du mal qui au cuer leur venoit) ; 1508 dire tout ce qu'on a sur le cœur (Eloy d'Amerval, Livre de la Deablerie, 147b ds IGLF) ; 1633 coucher du cœur sur le carreau « vomir [jeu de mots tiré des cartes] » (Comédie des Proverbes, acte II, scène 2, Anc. Théâtre fr., t. 9, p. 42). E. Fin xiie s. « partie centrale » (Mort Aymeri de Narbonne, 607 ds T.-L. : El cuer de France). F. 1340 « objet en forme de cœur » (v. Gay). G. 1585 « as de cœur » (N. Du Fail, Contes d'Eutrapel, t. 2, p. 202 ds IGLF). H. 1600 « sorte de cerise » (Ol. de Serres, Théâtre d'Agric., VI, 26 ds Hug.). II. Centre de la vie intérieure. A. Siège des émotions, de l'affectivité. Ca 1050 (Alexis, 464 : Ne puis tant faire que mes quors s'en sazit) ; ca 1100 (Roland, 317 : Tro avez tendre coer) ; 1er tiers xiiie s. (Lancelot du Lac, éd. O. Sommer, t. 5, partie 3, p. 353 : il navoit oi noveles ... qui tant li feissent mal au cuer) ; 1167-70 p. méton. cœur désigne la personne chérie (G. d'Arras, Ille et Galeron, 4160 ds T.-L.). B. Siège du désir, de la volonté. Ca 1050 (Alexis, 166 : Quant tut sun quor en ad si afermét) ; ca 1162 de son cuer « de toute son ardeur, très sincèrement » (Flore et Blancheflor, 1925 ds T.-L.) ; début xive s. avoir au cuer de (faire qqc.) (Ovide moralisé, éd. C. de Boer, livre V, 460) ; 1579 de gayeté de cœur (H. Estienne, Precellence du lang. fr., 359 ds IGLF) ; 1585 du meilleur de mon cœur (N. Du Fail, Contes d'Eutrapel, t. 2, p. 275). C. Siège du sentiment moral, du courage. Ca 1100 (Roland, 1107 : mal seit del coer ki el piz se cuardet) ; ca 1220 son cuer reprendre « reprendre courage » (G. de Coincy, Mir., éd. Koenig, I Mir 18, 326) ; 1508 à cœur vaillant, rien impossible (E. D'Amerval, loc. cit., 138b). D. Siège de l'intelligence. 1130-40 « discernement » (Wace, Ste Marguerite, 431 : Lors cuers, lor sens, fais oscurer) ; ca 1190 « savoir intuitif » (M. de France, Lais, Guigemar, 547, éd. J. Rychner : Mis quors me dit que jeo vus pert) ; ca 1220 les ielz dou cuer (G. de Coincy, Mir., éd. Koenig, II Ch 9,3792) ; cf. au xviie s. le cœur en tant que siège de la grâce, permettant la communication avec Dieu (Pascal, Pensées, section IV, 278 et 277, éd. Brunschvicg, t. 13, p. 201 : C'est le cœur qui sent Dieu, et non la raison; le cœur a ses raisons, que la raison ne connaît point ; section XII, 793, t. 14, p. 232 : aux yeux du cœur et qui voient la sagesse). E. Siège du souvenir, de la mémoire. Ca 1190 (M. de France, Fables, 70, 61 ds T.-L. : Senz quer fu e senz remembrance) ; ca 1200 retenir par cuer (Poème moral, éd. Bayot, 1036) ; ca 1220 savoir par cuer (G. de Coincy, Mir., éd. Koenig, I Mir 11, 757) ; 1690 (Fur. : On dit aussi, qu'on fait dîner quelqu'un par cœur quand on ne luy a point donné à dîner) ; 1694 p. ext. de savoir par cœur : apprendre une chose par cœur (Ac.), v. aussi Tobler, Sitzung der philosophisch-historischen Classe vom 27. October 1904, Berlin, p. 1274, 1275. Du lat. class. cǒr (peut-être par l'intermédiaire d'une forme *cǒre, Fouché, p. 656, Bl.-W.1-5) qui, dans la conception antique, est à la fois le siège de la vie et des fonctions vitales, et celui des passions et des émotions, des pensées et de l'intelligence, de la mémoire et de la volonté (cf. gr. κ α ρ δ ι ̓ α « cœur » et aussi « entrée de l'estomac », « siège des passions et des facultés de l'âme »; v. aussi K. Weinberg ds Arch. St. n. Spr., t. 203, 1966-67, pp. 1-31) ; pour par cœur, v. Bambeck, Lat. rom. Wortstudien, no 126.
Lire également la définition du nom cœur afin d'amorce la réflexion symbolique.
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Anatomie :
Roger Durand, dans un article intitulé "Le corps, temple de vie" (Revue Le Son bleu n°2 et 3, juin/septembre 2007) nous éclaire sur l'anatomie spirituelle du corps humain :
La constitution trinitaire de l’homme : L’Etre humain est une étincelle divine, une âme spirituelle et une personnalité (le pôle MATIERE de notre schéma initial). Cette personnalité est quadruple : intellect, émotionnel, corps de vitalité ou corps éthérique, corps physique tangible. C’est l’interpénétration entre le corps de vitalité et la partie physique tangible qui constitue le corps humain. Toute la dynamique énergétique du corps humain provient du corps de vitalité, la partie tangible n’est qu’un récepteur passif de ce qui se passe dans ce dernier. Les systèmes sanguin, nerveux, endocrinien, immunitaire jouent un rôle essentiel dans le transfert de la vitalité au corps organique. C’est notre étincelle divine qui insuffle la « vie » dans notre corps. Ce transfert se fait par un fil de matière subtile, le fil de vie ou sutratma, qui vient s’ancrer dans le centre énergétique du cœur situé entre les omoplates dans la matière éthérique. Un deuxième fil, le fil de conscience, part de l’âme spirituelle et se fixe dans le centre de la tête. Le corps de vitalité a un statut à part lors de la genèse de la personnalité à chaque incarnation. Il résulte en effet d’une extension de l’âme spirituelle dans la matière physique de la personnalité. Il est donc littéralement l’âme du corps physique. Nous verrons ultérieurement que ce corps de vitalité est le récepteur de toute une série d’influences. Il porte, entre autres propriétés, l’information qui « tient » l’être objectif. A la mort de l’être humain, les fils de vie et de conscience sont coupés, la partie objective n’est plus tenue et se désagrège.
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Les corps subtils : Le corps de vitalité est tout particulièrement en résonance avec le corps émotionnel. Les perturbations de ce dernier entraînent bon nombre de maladies, par le biais du corps éthérique. En revanche, un corps émotionnel stabilisé par l’âme spirituelle et le plan du cœur (le plan budhique) va apporter une forme d’harmonie dans le corps physique.
Les états de conscience : Le corps de vitalité est le grand relais de la créativité humaine. Le contact de plus en plus conscient avec le plan du cœur fait descendre dans le monde physique « le vrai, le beau et le bien ».
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Symbolisme :
Selon le Dictionnaire des symboles (1ère édition 1969 ; édition revue et corrigée Robert Laffont, 1982) de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant,
Le cœur, organe central de l'individu, correspond de façon très générale à la notion de centre. Si l'Occident en fait le siège des sentiments, toutes les civilisations traditionnelles y localisent au contraire l'intelligence et l'intuition : c'est peut-être que le centre de la personnalité s'est déplacé, de l'intellectualité à l'effectivité. mais Pascal ne dit-il pas que les grandes pensées viennent du cœur ? On peut dire aussi que, dans les cultures traditionnelles, la connaissance s'entend en un sens très large, qui n'exclut pas les valeurs affectives.
Le cœur est effectivement le centre vital de l'être humain, entant qu'il assure la circulation du sang. C'est pourquoi il est pris comme symbole - et non bien sûr comme siège effectif - des fonctions intellectuelles. On trouve cette focalisation en Grèce. Elle est importante en Inde où le cœur est considéré comme Brahmapura, la demeure de Brahma. Le cœur du croyant, dit-on en Islam, est le Trône de Dieu. Si, dans le vocabulaire chrétien également, le cœur est dit contenir le Royaume de Dieu, c'est que ce centre de l'individualité, vers lequel la personne fait retour dans la démarche spirituelle, figure l'état primordial, et partant le lieu de l'activité divine. Le cœur, dit Angelus Silesius, est le temple, l'autel de Dieu : il peut le contenir entièrement. Le cœur, lit-on encore dans le Houang-ti nei king, est un organe royal ; il représente le roi ; en lui réside l'Esprit. Si l'église cruciforme s'identifie au corps du Christ, l'emplacement du cœur est occupé par l'autel. Le saint des Saints est dit être le cœur du Temple de Jérusalem, lui-même cœur de Sion, qui est, comme tout centre spirituel, un cœur du monde.
Le double mouvement (systole et diastole) du cœur en fait aussi le symbole du double mouvement d'expansion et de résorption de l'univers. C'est pourquoi le cœur est Prajâpati : il est Brahmâ dans sa fonction productrice, il est l'origine des cycles du temps. Selon Clément d'Alexandrie, Dieu, cœur du monde, se manifeste selon les six directions de l'espace. Allah est semblablement Cœur des cœurs et Esprit des esprits.
Parce qu'il est au centre, les Chinois font correspondre au cœur l'élément terre et le nombre cinq. Mais en raison de sa nature - car il est le soleil - ils lui attribuent aussi l'élément feu. il s'élève jusqu'au principe de la lumière, comment le Sou-wen. La lumière de l'esprit, celle de l'intuition intellectuelle, de la révélation, brille dans la caverne du cœur. L'organe d'une telle perception est, selon le Soufisme, l'Œil du Cœur (Ayn el-Qalb), expression qu'on retrouve dans nombre de textes chrétiens, et notamment chez saint Augustin.
Le cœur est le Roi, disait le Nei-king. La fonction du cœur est de gouverner, confirme un texte ismaélien. Le cœur, enseigne le maître taoïste. Liu-tsou, est le maître du souffle ; ceci pourrait s'expliquer par la seule analogie entre le rythme cardiaque et la respiration, identifiés dans leurs fonctions de symboles cosmiques. Mais Plutarque utilise la même image : le soleil diffuse la lumière comme le cœur diffuse le souffle. Or, dans le Taoïsme aussi, le souffle (k'i) est la lumière ; il est l'esprit.
A suivre.
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Dans Le Temple de l'âme : La Parole divine du corps humain (Éditions Dangles, 1998) Roland Arnold décrypte la symbolique du cœur :
1. Le cœur : Du latin cordis (cœur), le cœur, organe central de l’individu, correspond de façon très générale à la notion de centre ; il est le centre vital en tant que moteur assurant la circulation sanguine.
a) L’homme intérieur : Dans la tradition biblique, le cœur symbolise l’homme intérieur, la vie affective, le siège de la sagesse, de l’émotion et de l’amour profane ou spirituel. Il est également l’endroit où se développent les sentiments, l’intelligence (apprendre par cœur) et l’intuition. C’est pourquoi il est pris comme symbole, et non bien sûr comme siège effectif, des fonctions intellectuelles.
Le cœur est à l’homme intérieur ce qu’est le corps à l’homme extérieur.
Le mot cœur est employé dans la Bible une dizaine de fois pour désigner l’organe, alors qu’on trouve plus de mille exemples dans lesquels son interprétation est métaphorique.
Dans l’islam, le cœur du croyant, dit-on, est le trône de Dieu. Chez les chrétiens, le cœur contient le Royaume de Dieu.
Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu. (Matthieu 5, 8)
Un représentant des Chartreux écrira dans Amour et Silence : « Notre Seigneur Jésus-Christ veut que nous fassions le vide dans notre cœur, mais c’est pour l’emplir de divin ; et cette purification est toujours incomplète si elle ne s’achève pas en cette plénitude...
Ainsi, un cœur pur est un cœur sans mélange, et tout est pur amour. Mais purifier le cœur est un véritable travail intérieur, pour voir...
Car le cœur de ce peuple est devenu insensible ; ils ont endurci leurs oreilles, et ils ont fermé leurs yeux, de peur qu’ils ne voient de leurs yeux, qu’ils n’entendent de leurs oreilles, qu’ils ne comprennent de leur cœur, qu’ils ne se convertissent, et que je ne les guérisse.
Matthieu 13, 15.
Lorsqu’un homme écoute la parole du Royaume et ne la comprend pas, le Malin vient et enlève ce qui a été semé dans son cœur.
Matthieu 13, 19.
Dans la notion de cœur, il y a donc bien plus à comprendre que le simple aspect anatomique. Il en va d’une connaissance au-delà de l’apprentissage et, pour tout dire, d’une sorte d’« inconnaissance du cœur », au-delà de la raison.
En Chine, le cœur est l’organe royal : il est le roi, le souverain qui gouverne. Et ce n’est pas par hasard que Dieu sonde le cœur et les reins de l’homme.
Nous pouvons considérer le cœur comme étant situé à la racine des membres supérieurs qui débouchent sur les mains, qui vont exprimer les œuvres de l’être humain.
Les mains sont les prolongements du cœur. Et un proverbe, issu de la sagesse profonde du peuple, illustre bien ce thème : « Mains serrées, cœur étroit. »
La parole, autre œuvre de l’homme, est liée au cœur : « Car c’est de l’abondance du cœur que la bouche parle » (Matthieu 12, 14.)
Les fruits révèlent la nature de l’arbre ; les paroles, les actes révèlent les secrets du cœur et l’esprit qui y habite. Dans ce sens, le cœur est aussi le lieu secret, caché et profond. « Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est éloigné de moi. » (Matthieu 15, 8).
Ne vous amassez pas des trésors sur la terre (champs extérieurs), où la teigne et la rouille détruisent, et où les voleurs percent et dérobent ; mais amassez-vous des trésors dans le ciel (la tête, champs intérieurs), où la teigne et la rouille ne détruisent point, et où les voleurs ne percent ni ne dérobent. Car là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur.
(Matthieu 6, 19-21)
Le cœur est malheureusement resserré chez beaucoup de personnes dans la mesure où leur richesse s’enfle, idée qui est exprimée par une parole du Christ : « On ne peut pas aimer Dieu et Mammon !
b) La vie affective : Le cœur réagit vivement à la vie émotive, qui est la traduction des pulsions inconscientes incontrôlées, et il peut nous renseigner sur le côté caché et intime de l’homme.
Les problèmes cardiaques sont dus à des décharges nerveuses erronées, au-delà du champ conscient, liées à un trop-plein émotionnel et affectif. Les « problèmes de cœur » font écho aux relations d’amour négatives, c’est-à-dire de l’ordre de la possession, aux pensées restrictives sur le plan spirituel.
Les hommes sans cœur, ou ayant un cœur dur comme la pierre, font le profil des futurs cardiaques.
L’amour entre les couples d’humains est l’icône de l’Amour divin. Le cœur en est le centre d’expression.
Le cœur est un complexe nerveux à libérer car il a un fonctionnement automatique, autonome, d’une perfection extraordinaire. En fait, il s’agit d’évoluer vers une vie affective, émotionnelle, juste ; cette « bonne orientation » du cœur est offerte à celui ou celle qui cherche et écoute Dieu.
A ce propos, l’anatomie nous rappelle que cet organe a des oreillettes, c’est-à-dire des petites oreilles pour écouter et pour entendre. Nom venant du latin auricula (petite oreille), et qui a donné le verbe ausculter.
Comment est-il possible que le cœur entende ? Pourquoi a-t-il des oreilles ? Il ne peut que s’agir d’une écoute d’un autre niveau, de l’écoute intérieure du Dieu vivant en nous.
Les anatomistes du Moyen Age n’étaient certainement pas ignorants de cette fonction spéciale, et il me semble qu’ils aient souhaité nous transmettre cette connaissance à travers les âges. Qu’ils en soient ici remerciés.
c) Ecouter son cœur puisque le cœur écoute... Le cœur, muscle creux comportant deux oreillettes et un seul ventricule, fonctionne de façon autonome. L’automatisme cardiaque est une propriété spécifique du tissu nodal dont les cellules, en raison de leur caractère embryonnaire, auraient conservé la propriété de se contracter rythmiquement. En effet, chez le fœtus, l’activité cardiaque débute très précisément le vingt et unième jour (3 fois 7) en un point particulier tout aussi précis : c’est le primum movens, et nous sommes dans le mystère absolu ; à un moment donné de l’évolution, il y a explosion d’une énergie donnant la première contraction du cœur, puis son rythme. Personne ne sait comment cela se produit. Et ces impulsions rythmées ne s’arrêteront que soixante, quatre-vingts, voire cent années plus tard.
La merveille, c’est qu’il y a quelque chose, un top de départ, un rythme, une vie, plutôt que rien !
Les affections déréglées, possessives et dominatrices engendrent des tensions cardiaques et finalement donnent des troubles cardiaques. « Avoir mal au cœur » n’est pas un vain mot. Les problèmes cardiaques sont avant tout une invitation à un lâcher-prise, ce qui correspond à un désencombrement des pensées « malsaines » dans le sens non saintes, afin de laisser battre le cœur en harmonie et en paix.
Le cœur est aussi symbole de l’amour. L’adolescent fou amoureux ne grave-t-il pas un cœur dans l’écorce d’un bel arbre ? Le cœur amour nous enseigne le rythme du don gratuit car le cœur vibre sans « pourquoi ? », tout comme l’amour se donne et se vit sans « pourquoi ? ».
Le cœur bat la vie pour célébrer son Créateur, Dieu.
Mourir sans perdre la vie nous entraîne à mourir aux émotions et aux sentiments négatifs, pour vivre avec intelligence (de legere, lire au-dedans). et avec l’Intelligence divine, qui se déploie en grâce et miséricorde.
Le système artériel et veineux du cœur a une disposition en forme de couronne, à tel point qu’il a été appelé « système coronaire », du latin corona, la couronne. Celle-ci nous rappelle l’Onction divine représentée par la couronne, symbole d’accomplissement et de perfection. Nous sommes tous roi ou reine quelque part, et nous sommes appelés à goûter dès à présent au Royaume de Dieu, qui est ici et maintenant (Maintenant, dans le sens de main tenant celle de Dieu). C’est le message principal du Nazaréen.
N’oublions pas que ce symbolisme est très fortement exprimé par le rituel de la traditionnelle galette des Rois mages, célébré dans toutes les familles le jour de l’Epiphanie, début janvier. Celui ou celle qui a le bonheur de tirer la fève est couronné d’une couronne dorée, la fève étant le germe de la vie spirituelle.
Quiconque le fait battre pour célébrer son orgueil et sa vanité en subira les conséquences. Au plus profond de son centre, va naître l’angoisse, l’angor, pouvant aller jusqu’à la mort par arrêt cardiaque. L’infarctus, du latin in « dans » et farcire « farcir », lésion localisée qui ressemble à de la farce, n’échappe pas à l’économie neurologique mal gérée.
Le cœur est couronné par le sang, lieu de l’âme, nous l’avons vu, et il ne bat que pour écouter l’Amour de Dieu. Laisser parler son cœur, écouter son cœur..., nous chantent les poètes. Et quiconque entre dans cette compréhension en tirera le bénéfice pour sa santé.
d) Quand le cœur va bien, tout va bien. Le cœur donne le rythme à la vie qu’on mène, et les troubles du cœur, tant le rythme que la fonction, dénotent un trouble du rythme de la vie.
Toutes émotions, colères, peurs, angoisses, excitations, font partie des pulsions inconscientes, à savoir des forces venant de la partie nébuleuse et ténébreuse de la pensée. C’est cette partie inaccomplie qui doit se transformer en lumière, ce que les cardiaques sont invités à faire durant leur repos forcé. Car tout problème du cœur impose une convalescence où le patient doit retrouver une vie calme avec absence d’effort. Toute charge cardiaque est alors éliminée, comme si l’être atteint était obligé de rentrer à l’intérieur de lui-même, pour méditer sur la folie de sa vie. Ecouter son cœur, parce qu’il a des choses à dire, peut entraîner un changement radical de la manière de vivre, seule condition pour espérer une longue vie. Tout cardiaque devrait être invité à faire du yoga ou de la méditation pour trouver la paix du cœur.
Car les affections du cœur rappellent à l’ordre et à la sagesse ontologique.
Les problèmes cardio-vasculaires sont nombreux et complexes, et même s’ils sont liés à la nourriture et au sport, ils ont toujours des rapports avec les histoires de cœur, avec la capacité d’amour ou au contraire son substitut : la possession.
Et l’angor ou angine de poitrine, un des premiers signes des troubles du cœur, est générateur d’angoisse, qui est la représentation symbolique de l’angoisse devant la mort, devant Dieu et le sacré.
♣ Méditation : la vie symbolique du cœur au quotidien :
– être écœuré ;
– sans cœur, cœur de pierre ;
– cœur de fer ;
– cœur en or ;
– mal au cœur ;
– enfant de chœur ;
– le cœur sur la main ;
– à cœur ouvert ;
– un grand cœur ;
– avoir le cœur barbouillé (nausée) ;
- joli comme un cœur ;
– serrer sur son cœur ;
– cela fend le cœur ;
– donner son cœur ;
– cœur fidèle ;
– le courrier du cœur ;
– avoir le cœur gai, gros... ;
– de gaieté de cœur ;
– si le cœur vous en dit ;
– vider son cœur ;
– parler cœur à cœur ;
– de bon cœur ;
– en avoir le cœur net ;
– au cœur du problème ;
– Dieu connaît vos cœurs (Luc 16, 15) ;
– le Sacré-Cœur, le Cœur divin.
e) Méditation sur le cœur.
Alors Jésus leur dit : Ô hommes sans intelligence, et dont le cœur est lent à croire... (Luc 24, 25).
Les disciples sur le chemin d’Emmaüs (Peuple obscur) ne reconnaissaient pas le Christ ressuscité(1). Et ils se dirent l’un à l’autre : Notre cœur ne brûlait-il pas au-dedans de nous lorsqu’il nous parlait en chemin et nous expliquait les Ecritures (Luc 24, 32) ?
[...] en sorte que Christ habite dans vos cœurs par la foi (Ephésiens 3, 17).
Or l’espérance ne trompe point, parce que l’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné (Romains 5, 5).
Et parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé dans vos cœurs l’Esprit de son Fils, lequel crie : Abba ! Père ! (Galates 4, 6)
[...] car si notre cœur nous condamne, Dieu est plus grand que notre cœur, et il connaît toutes choses. Bien aimés, si notre cœur ne nous condamne pas, nous avons de l’assurance devant Dieu. (I Jean 3, 20-21)
Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme le monde la donne. Que votre cœur ne se trouble point, et ne s’alarme point. (Jean 14, 27)
Et que la paix du Christ... règne dans vos cœurs
Et soyez reconnaissants. (Colossiens 4, 15)
A Saadi, de conclure :
Tout ce que tu vois rend grâce à Dieu.
Le cœur attentif sait cela.
Ce n’est pas seulement la fleur sur le rosier,
qui Lui rend grâce,
chacune des épines également le louange.
Le cœur, organe noble par excellence tant il est à l’intérieur du corps, représente l’intérieur des choses et est protégé par le thorax, qui veut également dire cuirasse, car la nature ne protège que ce qui est précieux.
Note : 1) C’est-à-dire nous-même évolué et éclairé ; ressuscité à la vie spirituelle.
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Michel Odoul, auteur de Dis-moi où tu as mal, je te dirai pourquoi (Nouvelle Édition revue et corrigée Albin Michel, 2002) nous donne sa vision symbolique du cœur, apprise de la philosophie et de la médecine chinoise :
Je vous présente dans le tableau suivant les noms des douze méridiens de base et des organes qui leur sont associés :
YIN | YANG | |
Méridiens ou Organe | Poumons Rate-Pancréas Coeur Reins Maître-Coeur Foie | Gros intestin Estomac Intestin grêle Vessie Triple Foyer Vésicule Biliaire |
Le Principe du Feu : Il est, comme son nom l'indique, celui de la flamme, de ce qui brûle en nous. Cette flamme est intérieure, qu'il s'agisse de l'aspect passionnel d'un individu mais aussi de son aspect « lumineux », de sa clarté psychologique et intellectuelle. La brillance, l'intellect, l'intelligence de l'esprit et aussi la spiritualité dépendent de ce Principe. La vision claire des choses, la liberté d'esprit, la puissance de compréhension et la fulgurance d'analyse appartiennent au Feu. Il donne par conséquent la lucidité mais aussi, à l'inverse, la subjectivité.
La compréhension que nous avons du monde dépend de la qualité du Feu.
De lui viennent le plaisir, la joie, la satisfaction heureuse. Le monde des émotions dépend du Principe du Feu et la passion qu'il porte peut devenir parfois violence si elle est en excès. C'est le Principe des envolées, qu'elles soient émotives, lyriques ou autres. Dès que le passionnel est présent, le Feu l'est aussi. L'optimisme, l'enthousiasme, la facilité d'élocution et d'expression dépendent de lui, ainsi d'ailleurs que notre ardeur, notre fougue et notre serviabilité.
Quatre méridiens sont associés au Principe du Feu, ceux du Cœur et de l'Intestin Grêle, du Maître Cœur et du Triple Foyer.
Le méridien du Cœur (signe astrologique chinois du Cheval) : Le Cœur est associé à l'Été. Son méridien aide à adapter les stimulations externes à la condition interne du corps. . Il est de ce fait intimement lié à l'émotivité et régularise le fonctionnement de tout le corps par son action sur le cerveau et les cinq sens. Il est considéré par les Taoïstes comme « l'Empereur » des organes et du psychisme. L'intelligence et la conscience dépendent du Cœur. Une relation très étroite existe entre le Cœur, le Maître Cœur (que l'on appelle le « Premier Ministre ») et le cerveau. Tout déséquilibre du Cœur rejaillit sur tous les autres méridiens. Il contrôle la distribution du sang et régit le système vasculaire. Comme il est en relation avec la langue, il permet de distinguer les saveurs.
Au niveau physiologique, ce méridien correspond donc à la langue et aux vaisseaux sanguins, et se localise physiquement au front et se repère par le teint. Sur le plan psychologique, il est associé à la conscience, à l'intelligence, à la passion, à l'éclat mais aussi à la violence. C'est l'amour, mais l'amour passionnel, celui qui brûle, qui consume.
Son heure solaire de force se situe de 11 à 13 heures et il termine son trajet sur la face interne du bout de chaque auriculaire.
[...]
Le méridien du Maître Cœur (signe astrologique chinois du Chien) : Le Maître Cœur est un organe virtuel qui est associé au Cœur dont il reprend les correspondances avec le Principe du Feu. Il assiste le méridien du Cœur en contrôlant le système circulatoire central et règle ainsi la nutrition du corps. Toutes les relations du Cœur avec les autres organes transitent d'abord par le Maître Cœur (aidé du Triple Foyer) qui va tendre à équilibrer celles-ci. Son rôle est de transmettre à tout le corps les ordres du Cœur dont il est, en fait, le porte-parole. Les Taoïstes l'appellent d'ailleurs le « Premier Ministre », alors que le Cœur est considéré comme « l'Empereur ». Il est donc celui qui est chargé de relier et d'harmoniser tout ce qui se passe à l'intérieur. Il structure, construit, entérine et légifère tout ce qui concerne notre conceptualisation intérieure des choses et c'est lui qui veille au respect des repères intérieurs, des croyances établies. C'est enfin lui qui a la charge de la sexualité et de son équilibre.
Le Maître Cœur est lié aux vaisseaux sanguins pour leur structure, au myocarde et au péricarde et aussi au cerveau par son action importante sur le psychisme et la qualité du mental. C'est lui qui fait circuler, qui a la charge de la diffusion des choses, tant sur le plan physique (circulation sanguine) que sur le plan psychologique (circulation des idées, fluidité du raisonnement, capacité à recycler les idées). Les émotions qui lui sont associées sont la joie, le plaisir et le bonheur.
Son heure solaire de force se situe de 19 à 21 heures et il termine son trajet au bout du majeur de chaque main.
[...]
Le cœur : C'est l'organe principal de la circulation sanguine. Il est la pompe maîtresse de cette circulation, mais une pompe intelligente et autonome dont la finesse de réaction est extraordinaire. Par son rythme, il est capable de répondre instantanément à la moindre sollicitation, qu'elle soit physiologique (effort) ou psychologique (émotion). En étroite relation avec le cerveau, il est capable de réguler très précisément les pressions et les rythmes circulatoires nécessités par les circonstances environnementales. C'est lui qui commande, dirige notre capacité d'adapter les réactions intérieures aux exigences extérieures. Le cœur est un muscle dit «involontaire », c'est-à-dire qui fonctionne en dehors de notre volonté consciente. Sa relation avec notre Inconscient est forte et explique l'influence importante de nos émotions conscientes et inconscientes sur notre rythme cardiaque. Siège traditionnel de l'amour et des émotions, sa relation privilégiée avec le cerveau, qui dépend de lui en énergétique, nous montre combien un amour véritable ne peut se contenter d'être passionnel mais qu'il se doit d'être aussi « intelligent » Il risque sinon l'aveuglement.
Les maux du cœur : Ils nous parlent de nos difficultés à vivre l'amour et à gérer nos émotions qui ont tendance à prendre le pas sur le reste dans notre vie. Ils peuvent signifier aussi que nous laissons trop de place au ressentiment, à la haine, à la violence, que nous refoulons ou exprimons par des biais (sport, jeux, blessures). Pendant ce temps-là, la place de l'amour de la vie, de nous-mêmes, des autres, de ce que nous faisons diminue chaque jour. Or, rappelons-nous que le cœur distribue le sang en nous. Si nous cultivons des états émotionnels négatifs, ils vont être distribués de la même manière. On dit en énergétique que l'état du Cœur et du Chenn (sa représentation spirituelle) se voit au teint de la personne et à l'éclat de ses yeux, de son regard.
Les palpitations, les tachycardies, les infarctus et autres problèmes cardiaques expriment toute notre peine à gérer nos états émotionnels ou, au contraire, à leur laisser la possibilité de s'exprimer, de vivre en nous. La prise trop au sérieux de la vie et de tout ce qui s'y passe, l'absence de plaisir dans ce que nous faisons ou ressentons, le peu d'espaces de liberté et de décontraction fragilisent les énergies du cœur et peuvent se traduire par des tensions cardiaques. Mais l'excès de plaisir ou de passion fragilise aussi les énergies du Cœur et peut se traduire par les mêmes effets.
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Le site La Vague de Vie propose un fascicule intitulé "Le symbolisme des organes du corps humain" (malheureusement non sourcé) dans lequel on peut lire la notice suivante :
COEUR : Porte de l’âme, dressée entre le monde de la Force et celui de l’Essence, le cœur constitue le centre de l’existence sur le plan physique, révélant l’ordonnance de la matière et la discipline des énergies vitales. Il est le principe vital et de détermination individuelle, le noyau central de l’énergie créatrice par laquelle tous les atomes physiques sont maintenus en place, subordonnés à la volonté de vivre de l’âme. Par le flot sanguin, il répand la vitalité; par le flot lymphatique, il répartit la conscience dans la densité. Figure de Regulus, la Coupe divine, voilà la Source de l’Amour, la Force créatrice centrale qui dispose de tout. On l’appelle le canal libre de l’énergie vitale de l’âme ou le corridor entre l’âme et l’Esprit. Cet organe nourricier qui anime la circulation décrit le centre magnétique et vital de la réalité humaine.
Le cœur désigne le centre de l’amour, du don de soi, de la compassion, de la connaissance, de la croissance, de l’expansion, de la prospérité. Il permet à la vie spirituelle ou à la force vitale de s’écouler et d’entretenir l’énergie et la vie des autres centres. Il conditionne également le développement de l’organisme intérieur indépendant, se fondant sur la vérité de la conscience intérieure. Image de la puissance de la réversibilité, il accumule dans son espace fermé les grandes forces vitales. Les mystiques le désignent comme l’organe de la contemplation et de la vie spirituelle, en plus de l’appeler le berceau de la Seconde Venue du Christ. Voilà le centre rassembleur de tout ce qui va et vient dans le corps et le psychisme. Il diffuse la nouvelle d’être dans toutes les parties du corps. Il rend la connaissance effective, affective et agissante. Il règle le rythme vital, alimentant le sentiment du Moi.
Le cœur sert de creuset mystérieux duquel chaque force prend de l’altitude en se posant la question de sa propre authenticité. Cet athanor réunit les apparents contraires à titre de carrefour et d’espace de fusion. Par lui, l’être apprend à tout assembler et à rassembler toutes les facettes de son être au service du but unique. Il résout l’antagonisme entre l’intérieur et l’extérieur, calcinant ces antagonismes par l’oxygène et la force vitale. Il veut donner et donner sans cesse, sans attente, de façon impersonnelle et inconditionnelle, comme le fait le Soleil. Voilà le vaisseau de la véritable vie amoureuse et affective, le centre de la conscience de l’être incarné. Principal instrument de l’âme, il contient un point, quelque part, où toute question devient vaine : c’est le point de fusion avec l’Omniscience de l’Amour divin. Principe de beauté, de sérénité, de paix, d’harmonie, il figure le lieu sacré où s’opère la transformation de l’humain en divin par la réalisation de l’Amour pur. Y vibre cette conscience qui dirige l’être humain et la censure, entretenant tous ses membres et tout son être. Il distille l’amour de soi et la compassion pour atténuer les peurs d’habiter dans un monde parfois apparemment hostile. Il cherche toujours à rassurer pour permettre d’accepter la vie dans ce monde, pour y maintenir le désir de vivre et de perpétuer la vie à ce niveau.
Organe central de l’individu, correspondant à la notion de centre, siège de l’amour le plus élevé, de l’intuition, mais aussi de l’équilibre, il lui permet de faire retour, dans la démarche spirituelle, vers son état primordial. Voilà le Roi, le lieu de l’Activité divine. Son double mouvement, systole et diastole, figure le mouvement d’expansion et de résorption de l’Univers. Il illustre l’Œuvre de Dieu, le Créateur, dans sa fonction productrice, depuis l’Origine des Temps. Centre de la Lumière de l’Esprit ou de la Révélation, il gouverne la vie de l’être, lui enseignant l’essentiel. C’est le Maître du Souffle, celui qui sera placé sur la Balance du Jugement après la transition. Il symbolise la Présence divine en chacun, comme la conscience de cette Présence. En lui brille la Triple Flamme. Principe de la vie et de la personnalité, le cœur désigne l’homme intérieur avec sa vie amoureuse et affective, se révélant comme le siège de l’intelligence vraie et de la sagesse. Centre de l’attention, de la vigilance, de la mémoire et de l’imagination, voilà le lieu secret et caché de la conscience, le point insaisissable où la Créature rencontre son Dieu, la Présence de l’Esprit sous son double aspect de Connaissance et d’Être.
Du point de vue mystique, le cœur figure le Portail étroit, le carrefour des réseaux de circulation, qui reçoit en totalité la tonalité qui véhicule l’une ou l’autre des voies d’expression. Autrement dit, à titre d’agent directoire, il constitue la porte commune de la circulation entre le flux des divers corps. Il agit comme le médiateur du haut et du bas. De la sorte, il offre l’initiation la plus grande : celle de l’amour inconditionnel et impersonnel. Siège de l’Âme ou de l’Enfant divin, il contient le diamant et la couronne. Il ouvre sur tous les chemins de la Vie, permettant de visiter toutes les demeures de l’Au-delà. Il aide à connaître le vrai visage de sa personnalité au-delà des leurres, des artifices, de l’ironie, de la fourberie. Il engendre le grand face à Face avec Dieu. Cet agent actif, intelligent, censeur et initiateur, reçoit une fonction de sélection. Il engendre la simplicité et la fluidité. Voilà l’organe qui reçoit et qui donne sans compter, où se passent toutes les réactions. Il conduit au centre de soi-même, à ou se trouve toute particule en mouvement, animées par sa Divinité intime. Il sert de symbole à la conscience, à l’amour, à la vérité, à la sincérité. Il permet de monter ou de descendre au centre des choses. En ce centre, tout se croise, se mêle et se crée.
Le cœur évoque souvent les pensées les plus cachées, les plus secrètes, les plus intimes et les plus authentiques d’un être. Il révèle les efforts à produire, le degré d’amour à rayonner et la joie de vivre à découvrir. Lié au chiffre zéro, il peut incliner vers l’amour ou sombrer dans les pièges de l’attachement. Il invite à découvrir le plus court et le plus sûr chemin pour parvenir au centre d’une situation enrichissante. Il suggère parfois de se rendre plus disponible aux autres, à un projet, aux évènements. Il invite toujours à établir un contact avec une source d’énergie qui unit en soi-même et raffermit les liens avec les êtres chers ou précieux, capable de renouer certains liens défaits. Il commande qu’on cultive l’esprit d’union, le contraire radical de la séparativité et de l’égoïsme.
Dans sa notion purement physique, le cœur peut incliner vers des entreprises mièvres et capricieuses puisqu’il reste alors uniquement le véhicule des sentiments. Or les sentiments, qui préfèrent garder bon, aimable, sentimental ou romanesque, peuvent induire dans une quête de satisfactions éphémères et relatives. Il faut illuminer son cœur, l’ouvrir à l’Amour divin, pour pouvoir parler d’intelligence du cœur qui répond à des élans purement divins. A l’apparition d’un cœur, on peut être sûr qu’une voix lumineuse cherche puissamment à se faire entendre. Il faut se donner le droit de l’écouter pour entendre le message d’un rythme vital et mieux intégrer ses pensées ou ses sentiments. Autrement, on risque de sombrer dans les émotions fortes et complexes, engluantes. Est-on appelé à se réjouir de la Présence de Dieu ou de celle de l’être aimé ? Est-on appelé à mieux s’aimer soi-même, sans culpabilité, sans regrets, sans remords? Est-on appelé à mieux promouvoir son bien-être ? Doit-on mieux situer son centre d’intérêt ? Le cœur, c’est la Coupe du Graal.
Les affections au cœur : Manque profond d’amour de la vie et du sens évolutif, problème émotif qui perdure ; manque d’enthousiasme ; vie de robot (métro, boulot, dodo) ; confiance dans l’effort et la pression ; intransigeance ou intolérance ; séparativité ; perte du sens du partage et de l’échange ; manque de générosité ; égoïsme vital ; chagrin prolongé ; existence monotone ou activisme ; vie dans l’amertume et la dureté ; refus de s’ouvrir aux autres ou d’exprimer ses sentiments ; manque de franchise et de spontanéité. On n’a jamais écouté son cœur, on a toujours écouté sa tête, ses intérêts ou les autres. Déséquilibre entre le donner et le recevoir. Oubli de l’esprit de service. Attitude de séparativité. Épuisement de sa vitalité. Les émotions ont tendance à prendre le pas sur le reste dans sa vie. On laisse trop de place au ressentiment, à la haine, à la violence, qu’on refoule et exprime par le biais d’autres moyens (sports, jeux, toxicomanies).
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Pauline Petit retrace l'histoire du symbole du cœur dans un article intitulé "Le cœur, organe de l’amour" (publié sur le site de France Culture le 14 février 2020) :
On le trouve imprimé sur les cartes de Saint-Valentin, gravé au canif sur les troncs d’arbre, coupé en deux parties d’un même pendentif qui lie des amoureux... Le cœur est partout. Comment ce bout de chair battant et sanguinolent est-il devenu l’une des représentations de l’amour ?
Deux pétales rouges arrondis qui se rejoignent sur le haut et se terminent par une pointe en forme de V : voilà un cœur. Des courriers enflammés aux émoticônes en passant par les bijoux et les tee-shirts “I ♥ NY”, le cœur est devenu le motif du transport amoureux, l’icône qui signifie l’action d’aimer. Mais d’où vient cette forme lisse et symétrique, bien loin de l’organe sanglant que nous portons en nous ? Comment le cœur, ce “mot charnel et sensible, mot rond dans lequel il y a du sang” comme l’écrivait Anna de Noailles dans La Nouvelle espérance, est-il devenu un symbole de l’amour ?
La symbolique du cœur : de l’intériorité à l’affectivité : Le cœur, “viscère rouge en forme de cône renversé situé dans le médiastin, constitué d'un muscle (myocarde) doublé de deux tuniques (péricarde, endocarde)...” selon sa définition médicale, a toujours été l’objet de mythes. Avant même d’être associé à l’amour, le cœur humain symbolisait, du fait de sa position supposée dans le corps humain, le centre de l’être, siège de son intelligence. Comme on peut le lire dans le Dictionnaire des symboles (Robert Laffont, 2000), les religions lui ont accordé une place essentielle et ce, dès l’Antiquité. Dans la religion égyptienne par exemple, on déposait lors de la psychostasie le cœur du défunt sur la balance du jugement divin. C'était aussi la coutume de placer sur la poitrine du mort une amulette appelée “scarabée de cœur” sur laquelle était gravée une formule censée empêcher le cœur de témoigner contre le défunt au tribunal d’Osiris. Le cœur était en effet considéré comme le berceau des secrets... On retrouve cette même idée dans la tradition hébraïque : évoqué dans l’Ancien Testament, il désigne l’organe caché de l’homme, celui au sein duquel ses intentions les plus intimes peuvent trouver refuge. Dans la tradition islamique également, le cœur, et ses nombreuses enveloppes protectrices, est moins “l’organe de l’affectivité que celui de la contemplation et de la vie spirituelle”.
Comme le note Roger Parisot dans Le Cœur (Pardès, 2000), l’affectivité a commencé à gagner le cœur à mesure que sa physiologie était mieux comprise. William Harvey, grand médecin anglais auquel on attribue la compréhension de la circulation sanguine générale, observait dans son Motu Cordis (1628) les effets de nos émotions sur le cœur. Touché par la sensibilité de cette “pompe rotative” qui bat au rythme de nos sentiments, le sérieux médecin devait lui-même se montrer passionné au moment de décrire l’ingénieux organe vital : “Le cœur est (...) le foyer divin qui, exerçant ses fonctions, nourrit, chérit, accélère le corps tout entier, et est le fondement de la vie, la source de toute action” (cité par Martin Kemp dans Christ to Coke, How Image becomes Icon, Oxford University Press, 2011).
Dans son Traité des passions de l’âme (1649), Descartes examinait ces incidences psychosomatiques : l’accélération du pouls de l'amoureux, la sensation de “chaleur agréable” et le désir qui “agite le cœur plus violemment qu’aucune des autres passions”... Résumant ces vues, le physiologiste Claude Bernard écrivait : “Les sentiments que nous éprouvons sont toujours accompagnés par des actions réflexes du cœur ; c’est du cœur que viennent les conditions de manifestations, quoique le cerveau en soit le siège exclusif.” (“Étude sur la physiologie du cœur”, Revue des Deux Mondes, 1865). Quand la médecine se fait science du cœur, les expressions consacrées trouvent tout leur sens : notre cœur bat la chamade à la vue de l’être aimé ou se brise victime d’un chagrin amoureux.
La conception du cœur comme organe des émotions s’est ainsi ancrée dans notre imaginaire. Lorsqu’en 1967, le chirurgien cardiaque Christian Barnard réalise la première transplantation cardiaque entre une jeune femme de 26 ans décédée dans un accident de la route et Louis Washkansky, un homme âgé de 55 ans, l’épouse de ce dernier confiait être “pétrifiée” à l’idée de voir les sentiments de son mari changer, persuadée “comme tout le monde, que le cœur contrôlait les émotions”... Même lorsque les connaissances en anatomie n’étaient pas encore très précises, l’amour semblait couler dans les veines à partir du cœur : les Romains, raconte l’historienne américaine Marilyn Yalom dans The Amorous Heart : An Unconventional History of Love (Basic Book, 2018), croyaient qu’il existait une veine, appelée la “vena amoris”, qui allait du cœur au quatrième doigt de la main gauche, l’annulaire.
L’éclosion formelle du cœur, de la botanique à l'anatomique : Mais comment en est-on arrivé à dessiner le cœur comme un triangle arrondi et échancré pour exprimer l’amour ? Les origines de cette forme telle que nous la connaissons aujourd’hui sont incertaines. Deux pistes doivent cependant être explorées pour essayer d’en avoir le cœur net. La première est botanique. Le symbole de l’amour résulte de la schématisation de la forme des feuilles de lierre qui, étant vivaces toute l’année, symbolisaient la fidélité et l’endurance. On évoque aussi la ressemblance avec les feuilles de figuiers ou les graines de silphion, une plante condimentaire et médicinale très appréciée dans l'Antiquité gréco-romaine, aujourd’hui disparue. Si les premiers cœurs représentés en sculpture ou dans des fresques étaient bien inspirés des plantes, souligne Marilyn Yalom, ils avaient souvent une “valeur décorative”.
La seconde voie d’explication est à nouveau anatomique. Toujours dans Christ to Coke, How Image becomes Icon, l’historien de l’art Martin Kemp observe les tâtonnements scientifiques de la représentation du cœur. Si les dessins anatomiques réalisés par Léonard de Vinci sont d’inspiration végétale (le génie, qui s’adonnait parfois à la dissection, soutenait que les artères sanguines prenaient racine dans le cœur comme le tronc et les branches d’un arbre de la graine), progressivement, les planches médicales représentent des “cœurs humains” plus réalistes “dont la forme se rapproche de la forme conventionnelle du cœur que nous connaissons”, comme celle du Traité d’anatomie humaine de Govard Bidloo (1685).
Disséqué et analysé sous toutes ses coutures, le cœur trouve son image romantique à la fin du Moyen Âge. C’est au monde chevaleresque de l’amour courtois ou “fin’amor”, que l’on doit la systématisation du cœur aux lignes rondes et épurées qui nous sont aujourd’hui familières. Tantôt littéral et sanguinolent, tantôt désincarné et réduit au motif percé d’une flèche, les manuscrits enluminés de la littérature médiévale fournissent de nombreux exemples de cœurs. Dans son étude, Marilyn Yalom date “la première image connue de l’icône du cœur indubitable” en 1344, dans Le Roman d’Alexandre, l’un des grands livres d'images médiévaux. Dans l’illustration ci-dessous, une femme tient un cœur vraisemblablement reçu de l’homme qui se tient devant elle. Alors qu’elle accepte son offrande, il touche sa poitrine pour lui indiquer d’où vient son cadeau.
Des manuscrits aux enseignes des jeux de cartes en passant par les armoiries, l’icône du cœur s’est popularisée. Au XVIe siècle, l’humaniste Pierre Sala a contribué à l’histoire du cœur amoureux avec son Petit livre d’amour, recueil d’emblèmes dans lequel le symbole occupe le premier rôle (ill. ci-dessus). Du XVIIe au XIXe siècle, "la représentation de l’adoration du Christ en la forme du Sacré-Cœur a été décisive dans la normalisation iconique et formelle du cœur", explique Martin Kemp. Le “Sacré-Cœur" est représenté par un cœur rouge-sang, couronné d’épines duquel émanent des rais de lumière ou des flammes. Au cours du XIXe siècle en France, certains catholiques donneront à la dévotion du Sacré-Cœur une coloration royaliste, rappelant les cœurs arborés par les Chouans de Vendée et ceux qui auraient dû orner les étendards royaux sous le règne de Louis XIV.
Le symbole païen s’est aussi installé dans l’univers iconographique populaire. Au XXe siècle, il devient même un motif commercial, utilisé sur les cartes et les boîtes de chocolat pendant de la période de la Saint-Valentin. L’icône s’est même faite verbe en devenant un logo, décliné en émojis. Le “♥” a envahi “l’art graphique international, notamment avec la campagne de publicité « I ♥ NY » pour « I love New York », initié en 1977, raconte Martin Kemp. Le département du développement économique de l’État de New York avait chargé l’agence de publicité Wells Rich Greene de monter une campagne pour la ville. Le rébus a été conçu par Milton Glaser, designer graphique, pour un budget de 1 500 dollars.” Son design est tombé dans le domaine public, entraînant d’infinies variations.
Représenter l’amour : le cœur comme motif artistique : Les artistes, peintres, sculpteurs ou photographes se sont bien entendu saisis de ce motif universel pour exprimer les mille et unes facettes de l’amour. Dans une exposition intitulée “Cœurs. Du romantisme dans l’art contemporain”, le Musée de la Vie romantique à Paris met ces jours-ci en lumière les représentations du symbole de l’amour, en résonance avec les thématiques classiques du romantisme. À travers une sélection de 40 œuvres contemporaines, le cœur devient le personnage principal des phases du sentiment amoureux.
Signe de l’émoi naissant et des premiers tourments, il est délicatement tenu, comme dans les scènes d’offrande de l’amour courtois, par une adolescente dans la toile de Françoise Petrovitch Dans mes mains (2018). Mais son côté mièvre peut aussi être tourné en dérision, comme l’explique Gaëlle Rio, directrice du musée : “Le cœur est volontairement kitsch chez Pierre & Gilles, ou est érotisé et détourné dans le Tableau de mariage de Philippe Mayaux, où la forme du cœur est aussi celle des fesses”.
Pour ne pas conclure sur le cœur brisé par la blessure d’amour, que représente dans son ambivalence Annette Messager avec son convalescent Cœur au repos en filet de pêche noir, à la fois fragile et endurant, l’exposition interroge le cœur "gravé et éternel". Il transcende, presque ironiquement, la mort avec le crâne de Gilles Barbier : “En le mettant à l’envers, l’artiste fait apparaître la cavité nasale en forme de cœur, et y inscrit 'cœur éternel'", commente Gaëlle Rio. Dans un ultime pied de nez, le cœur-symbole survit au cœur-organe.
Du monde de l'art à la vie quotidienne, le cœur a su se faire une place dans nos communications numériques, et même faire évoluer son implicite charte graphique : au-delà du classique cœur rouge, il existe plus d’une trentaine d’émoticônes contenant un cœur. Mais, comme l'interrogeait l'historienne Marilyn Yalow dans une conférence consacrée à ce symbole, le ❤ qui ponctue nos messages est-il véritablement capable de transmettre toutes les nuances de l’amour ?
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