Étymologie :
FRAGON, subst. masc.
Étymol. et Hist. Fin xiie s. fregon (Naissance chevalier au cygne, éd. H. A. Todd, 1981) ; 1379 fragon (Arch. hospit. de Paris, II, 126, Bordier ds Gdf. Compl.). Empr. au b. lat. brisco, frisgo (Gloses, xe s. ds TLL s.v. brisconis, 2194, 21) prob. d'orig. gaul. (FEW t. 3, p. 806-807).
Lire également la définition du nom fragon afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Ruscus aculeatus [rugueux + qui a des aiguillons] - Buis piquant - Epine de rat - Fragon petit-houx - Fragon faux-houx - Fragon piquant - Fragonnette - Fregeon - Gringon - Houx-frelon - Myrte sauvage - Petit houx - Vergandier -
Botanique :
Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques du Fragon :
Propriétés Physiques. — Cette racine est blanche, grosse comme le petit doigt, longue, noueuse, articulée. Sa saveur fraîche est âcre et un peu amère ; sèche elle a une légère odeur térébinthacée, une saveur sucrée mêlée d'un peu d'amertume. Les fruits sont des baies sphériques, rouges à maturité, contenant deux à trois semences très dures.
Usages médicaux — Les anciens ont fait quelque cas de cette plante; sa racine figurait au nombre des cinq racines apéritives ordinaires propres à combattre les obstructions viscérales et à provoquer la diurèse. On l'employait dans l'hydropisie, la cachexie, la jaunisse, la rétention d'urine, les calculs, les affections scrofuleuses. La conserve des baies était vantée dans l'ardeur d'urine ; les semences figuraient dans la composition dite benedicta laxativa (Tournefort, Histoire des plantes). Cette plante parait être réellement diurétique ; la racine s'administre en décoction (30 à 60 grammes par kilogramme d'eau) ; les baies qui ont une saveur douce et les jeunes pousses que l'on mange quelquefois comme les asperges exercent la même propriété sur la sécrétion rénale. On a employé les semences torréfiées comme un succédané du café.
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Selon le site Health Medicine Network :
Le nom anglais de la plante (butcher’s broom – balai du boucher) vient du fait que les bouchers européens utilisaient ses tiges pour balayer le plan de travail de débitage des viandes, non seulement à cause de leur rigidité et de leur solidité, mais également parce qu’on pensait que l’huile essentielle que renferme le fragon épineux inhibait la prolifération bactérienne et contribuait à éloigner la vermine et les souris.
Très utilisé dans l’Antiquité comme diurétique, pour soulager les menstruations douloureuses et désengorger les enflures d’origine veineuse, le fragon fut aussi longtemps utilisé en Europe pour le traitement de la constipation, des troubles urinaires et des douleurs abdominales. La plante est pratiquement tombée dans l’oubli au début du XXe siècle. Cependant, dans les années 1950, deux scientifiques français (Lapin et Sannié) ont isolé dans ses rhizomes deux saponosides stéroïdiens, la ruscogénine et la néoruscogénine. Les propriétés fortement vasoconstrictrices de ces composés permettaient de justifier l’emploi de la plante dans le traitement de divers troubles d’origine veineuse, notamment l’insuffisance veineuse des membres inférieurs (jambes lourdes et enflées, varices, etc.) et les hémorroïdes.
Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :
De même que les jeunes pousses d'asperge cultivée, sont mangés ça et là dans les campagnes et parfois vendus au marché sous le nom d'asperges bâtardes (1) les turions de l'Asparagus tenuifolius (à Razéré et dans les Abymes de Myans) et ceux du petit houx, Ruscus aculeatus.
Note : 1) En Savoie, les gens de la campagne nomment bâtardes les plantes sauvages congénères des plantes qu'ils cultivent pour l'alimentation. Ainsi les noms d'ail bâtard, asperge bâtarde, oseille bâtarde, etc., s'appliquent aux espèces d'aulx, d'asperges, d'oseille, etc., qui croissent spontanément dans les campagnes et ne sont pas bâtardes du tout. Cette épithète s'appliquerait mieux aux plantes cultivées qui sont pour la plupart issues de croisement.
[...]
Cérémonies religieuses - De nos plantes à feuilles résistantes, le buis est la seule qui soit bénie le dimanche des Rameaux. Dans d'autres pays, le petit houx, Ruscus aculeatus, jouit de la même prérogative qui lui est refusée en Savoie.
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Croyances populaires :
Paul Sébillot, auteur de Additions aux Coutumes, Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne (Éditeur Lafolye, janv. 1892) relève des croyances liées aux cycles de la vie et de la nature :
210.-Pour guérir les attaques de nerfs, on fait boire au malade de la tisane de petit houx, puis on le frotte avec la plante bouillie.
Symbolisme :
Selon Philippe-François-Nazaire Fabre d'Églantine, auteur du Rapport fait à la Convention nationale dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française (p. 23) :
Le Fragon était le nom attribué au 3e jour du mois de pluviôse.
Symbolisme celte :
Pascal Lamour, auteur de L'Herbier secret du Druide, des plantes pour les hommes et les esprits (Éditions Ouest-France, 2017) fait le point sur ses recherches :
Nom gaulois : Ousoubem - Usuben.
Il subsiste de nombreuses hésitations, et il est possible que ces noms gaulois désignent en réalité Daphne mezereum.
Saisonnalité Samain : Dans la symbolique, nous pouvons regrouper le fragon et le houx, Ilex aquifolium, utilisés l'un comme l'autre dans la représentation de notre mythologie. Ils auront des propriétés thérapeutiques différentes, mais leurs propriétés symboliques sont identiques.
Ici, nous prendrons l'appellation générale « houx ». Le houx souvent associé au gui est une plante de Samain, reliée au solstice d'hiver. Il est considéré aujourd'hui comme une des sept essences sacrées des druides. Il représente l'immortalité car il reste toujours vert, mais exprime aussi l'idée de bravoure et de résistance. « Le houx fut teint en vert. Il fut le héros. » nous dit-on dans le Kad Goddeu, nous montrant par là la capacité à représenter les héros les plus combattants. Nous sommes ici dans une figure masculine et guerrière. Nous pouvons le relier logiquement au dieu Dagda et à Lug, dans son aspect le plus sombre de la Samain : dieu guerrier puissant, père des druides, le plus honoré à la Samain.
Dans la mythologie irlandaise, le guerrier Nathcrantail n'a pour arme que « trois fois neuf épieux de houx » confirmant la représentation guerrière du houx qui a sa place dans la fête totale et militaire qu'est la Samain. C'est aussi la lettre T dans le signaire ogamique : Tinne est sans doute le nom du houx, symbole de l'immortalité.
En Bretagne, dans le chant « Merlin-barde » du Barzaz Breiz, le roi s'exprime ainsi :
« Où vas-tu ainsi, vieux Merlin, avec ton bâton de houx ? Je vais chercher ma harpe, consolation de mon cœur en ce monde ».
Dans ce chant, le roi rassemble le peuple autour d'un grand festin où coule l'hydromel : c'est la Samain. on découvre ici le houx comme symbole de la connaissance et de la sagesse, qui accompagne le barde, en particulier lorsqu'il se rend à une importante cérémonie.
Enfin, j'ai souvent accompagné mon père, pour couper du houx et en faire des manches de fourches et de haches, et il me disait : « Tu sais, le houx est résistant, c'est le plus beau bois pour la force. Quand tu tiens un outil, jamais il ne te glissera des mains. Mais il faut le couper à la Toussaint ! » Nous savons que la Toussaint s'est substituée à la Samain.
Son installation dans le Nemeton : Au milieu de Samain.
Son caractère Samain : L'usage Samain du fragon, de stimulation de l'intestin, a été abandonné. En revanche, le houx, Ilex aquifolium, a une écorce antiépileptique qui est un caractère Samain récurrent.
Propriétés dans les trois mondes :
Dans le premier monde : la santé du corps
Dans la tradition celtique : le fragon a été employé pour stimuler l'intestin et traiter les calculs rénaux. [...]
Dans le deuxième monde : la santé de l'esprit, les propriétés ésotériques
C'est un protecteur contre les mauvais esprits. il suffit d'en installer dans sa maison, au solstice d'hiver. Il sera consacré lors de la cérémonie du solstice et placé à un endroit passant de la maison. Ainsi les invités seront-ils eux-mêmes protégés. Le houx est un symbole de défense physique, par l'arme qu'il permet de concevoir mais aussi symbolique, par la barrière virtuelle qu'il crée.
Dans le troisième monde : la médecine magique de l'autre monde
On dit que « le soleil ne quitte jamais le houx », ce qui en fait un symbole d'immortalité. Les âmes de la forêt l'habitent pendant les durs mois d'hiver. Le houx sera employé en fumigations, dans le nemeton.
Le bâton du druide pourra être réalisé en bois de houx. En marchant, tel Merlin, son bâton à la main, il frappera le sol de trois fois trois coups. Ainsi, les âmes passagères lui apporteront la connaissance et la sagesse. Ce sera le bâton du maître de cérémonie, celui qui accueille tous les druides dans le nemeton et qui les conduit ensuite à leur place. Appelé souvent le Pendragon, il installe les druides dans le cercle, puis il lâche son bâton pour saisir le glaive, lui aussi symbole axial de la connaissance.
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Contes et légendes :
Voir aussi la fiche du Houx