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Le Maquereau

Dernière mise à jour : 3 mars





Étymologie :


Étymol. et Hist. Ca 1140 makerel (Geffrei Gaimar, Hist. des Anglais, éd. A. Bell, 444). Orig. controversée. Selon l'étymol. traditionnelle (Bl.-W.3-5 ; FEW t. 16, p. 504b), emploi fig. de maquereau2*, ce poisson ayant, selon une croyance pop. (mais qui ne semble att. qu'à partir du xixe s., cf. A. Tobler ds Sitzungsberichte der königlich preussischen Ak. der Wiss., 1902, pp. 92-93), pour rôle de rapprocher les harengs mâles des harengs femelles, qu'il accompagne dans leurs migrations. D'apr. P. Guiraud (Fr. mod. t. 34, 1966, pp. 280-290), le mot se rattacherait plutôt à la famille de maquer, macher « frapper, contusionner », d'où « tacher », le maquereau étant un animal tacheté. Cette hyp. ne tient pas compte de la chronol. des sens : les dér. de makk- signifiant « meurtrir » n'apparaissent en fr. qu'au xve s., v. FEW t. 6, 1, p. 67a (il est vrai que le prov. les connaît dep. ca 1200, v. Rayn. t. 4, p. 111 et E. Lévy, Prov., mais «maquereau» se dit vairat dans ces parlers, v. FEW t. 14, p. 177a) ; maquereaux « taches qui viennent aux jambes quand on s'est chauffé de trop près », invoqué par Guiraud, n'apparaît qu'en 1552 (FEW t. 16, p. 503b) et peut être dû à une comparaison avec l'aspect du poisson ; pour groseille à maquereau (1752, Trév. : à Paris le peuple nomme ce fruit groseilles à maquereau, parce qu'on en met dans la sauce du maquereau), on rencontre la même hésitation quant à son étymol. : pour les uns (déjà Trév. 1752 ; FEW t. 16, p. 505a, note 6), ce fruit serait ainsi appelé parce qu'il entre dans la composition d'une sauce accompagnant le maquereau ; pour P. Guiraud, il s'agirait encore d'un dér. de makk- « tache », ce fruit étant tacheté.


Afin d'amorcer l'interprétation symbolique, vous pouvez lire la définition du nom maquereau.


Autres noms : Scomber scombrus ; Aurion (Nice) ; Barrat (Roussillon) ; Berdaou (Arcachon) ; Brezhell (Bretagne) ; Lisette (de Calais à la Vendée) ; Maquereau bleu ; Tumbulottu ou Tombulu (Corse).

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Symbolisme :


Selon Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani :


Le maquereau étant supposé, comme tous les poissons, comprendre notre langue, les pêcheurs tentent de l'attirer grâce à cette formulette :

Maquereaux, approchez de mon bateau,

J'ai pour vous dans mon seau,

Du chevrun et du monceau (appâts),

Que je vais vous jeter dans l'eau.


Selon la légende, il n'y a plus de maquereaux dans la rivière d’Étel (Morbihan) car saint Gudwal les a maudits : "Un jour qu'il traversait ce bras de mer sur un vieux fond de charrette en s'aidant des pieds et des mains, ces poissons s'élancèrent sur ses jambes et le mordirent cruellement ; il eut recours à l'anathème pour s'en débarrasser, les maquereaux s'enfuirent de l’Étel et ne sont jamais revenus".

Outre-Manche (Somerset), prendre un maquereau avant la lecture des chapitres 23 et 24 des Nombres, au temple, porte malheur.

Chez les Anglo-Saxons, pêcher de façon fortuite un maquereau annonce un vol."

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Symbolisme alimentaire :


Pour Christiane Beerlandt, auteure de La Symbolique des aliments, la corne d'abondance (Éditions Beerlandt Publications, 2005, 2014), nos choix alimentaires reflètent notre état psychique :


Le Maquereau est un poisson qu'on dirait plutôt tenace, rond, sanguin et qui se pourvoit généreusement de tout ce qu'il lui faut. Il se nourrit ; il se régale. Il ose se donner à lui-même la possibilité d'être "dans la chair". Il jouit de la vie... et veille en particulier à ce qu'il ne lui manque rien. Au fond, c'est un grand monsieur gentil : de nature un peu replète, il est gentil avec lui-même. Il se sert sans attendre qu'on lui donne : c'est un bon principe. Il s'entend à se rendre heureux.

Celui qui n'ose pas assez être vraiment lui-même, qui ose trop peu faire valoir ses droits quant à sa nature réelle et quant à ce qui est réellement bon pour lui parce qu'il se demande s'il peut ou non faire ceci ou cela, consommer ceci ou cela, s'accorder ceci ou cela, peut avoir besoin de la sphère du Maquereau. Il hésite à bien s'alimenter à maints égards : il devra se rendre compte que lui seul est capable de sentir et de savoir ce qui est bon pour lui.

A-t-il honte de ses besoins ? Tout d'abord, il comprendra que la tâche de tout être humain consiste à se permettre de "jouir" de l'existence, principalement en ce qui concerne "l'ingestion d'aliments" : il refusera d'adhérer au culte insensé de l'apparence qui prétend, avec ses tableaux de calories, aider les gens à rester minces, même ceux qui sont de nature ronds et bien en chair. L'amateur de Maquereau se rappelle qu'il a le droit, plus qu'il ne le pense, de s'établir dans la chair et la graisse, pour la simple raison que sa nature le demande. Il connaîtra la santé et le bonheur dès lors qu'il osera manger ce dont il a envie, d'une manière saine bien sûr.

Il se peut que cet être humain ait honte de ses "appétits" et de ses besoins dans d'autres domaines. Ceci n'a pas lieu d'être, bien sûr, à condition qu'il transforme ses convoitises en conscience, qu'il comprenne que les appétits et les convoitises ont en fait la traduction d'un énorme potentiel de forces créatives qui demandent l'autorisation d'exister. Dès lors, au lieu de s'orienter vers l'objet de ses convoitises, il choisira de s'alimenter sainement de mets dont il a envie par nature, de manière que toute sa potentialité vienne s'implanter dans la matière. Ce n'est qu'après avoir rempli cette condition que cet être humain pourra permettre à ses Énergies Créatrices de couler vers l'extérieur de la bonne façon et les convertir en actes.

L'amateur de Maquereau doit oser s'affirmer dans la vie avec force et fermeté et, si sa nature le lui demande, dans toute sa rondeur et sa robustesse, à la manière d'un chêne. Il ne doit s'interdire aucune nourriture, sous peine de créer un effet de frustration et d'avidité en raison du déséquilibre qui se produirait entre le champ énergétique et la forme matérielle. L'envie de Maquereau inique que cet homme fera bien, pour son bien-être, de laisser se développer une certaine rondeur tant dans son caractère que dans son corps physique.

Cet être humain est habité par un grand besoin d'être très gentil, très "rond" et très doux avec lui-même, de bien prendre soin de lui de toutes les manières. Il fera bien de se donner de l'amour et d'assouvir tous ses besoins à volonté aussi longtemps qu'il ne doit pas pour ce faire occasionner de désagréments aux autres. Il fera bien de s'offrir à lui-même ce dont il a besoin sans l'attendre des autres !

« N'aie pas honte », dit le Maquereau, « du "don" que tu te fais ! Ose être plus doux, ne crains pas tes sentiments de douceur. N'aie pas honte de jouir de la vie dans la douceur. Ose manger ce dont tu as envie d'une façon saine (attention, il est évident que des conditions importantes sont liées à ceci : voir à ce sujet la première partie du présent ouvrage). Permets-toi de t'épanouir, non pas en dehors de la ronde douceur.

Sois surtout fier d'être bien en Chair ! Si tu laisses toute liberté aux muscles et aux graisses d'occuper le volume nécessaire sans la moindre inhibition, tu te sentiras physiquement bin ans ta peau, fort et en parfaite santé comme un chêne. Utilise toutes ces saines énergies en toi, transforme-les en créations luxuriantes et savoure-les ! »

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Thierry Argant, auteur d'un article intitulé "Le gibier et le monde sauvage à Lyon à l’époque antique et alentours." (Communication faite à Poitiers, 2007 env.) étudie la manière de se nourrir des Gallo-Romains :


[...] Un troisième monde, qui n’est pas considéré comme « gibier », revêt quant à lui une importance fondamentale dans l’approvisionnement de la ville : le Poisson (figure 1). Cette source de protéines a été exploitée très tôt à Lyon qui est riche de ses deux cours d’eaux aux caractéristiques complémentaires. Cependant, la fragilité des ossements des poissons et les conditions de réalisation de la plupart des fouilles archéologiques de sauvetage ne permettent que rarement de signaler leur présence directement. Les objets liés à cette activité sont également rarement retrouvés ou identifiés comme tels. A Lyon, la pêche est attestée dès le Néolithique et repose alors exclusivement sur l’exploitation des ressources locales. L'arrivée des Romains bouleverse totalement ces habitudes. Dès les années 20 avant notre ère, on voit ainsi apparaître des maquereaux (Scomber scombrus) et des thons (Thunnus sp.).

Vers 10 de notre ère, dans une fosse ayant contenu les reliefs d'un festin, on retrouve le maquereau, accompagné de plie commune (Pleuronectes platessa), d'un Mugilidé, mais aussi de saumon (Salmo salar) et de perche (Perca fluviatilis). Selon Gaël Piqués, qui a étudié ces lots, le maquereau provient certainement d'une saumure, dont le conditionnement en amphores est bien connu sur le littoral méditerranéen. En Corse du Sud, l'épave de Sud-Perduto II a livré une trentaine d'amphores de type Dressel contenant des maquereaux d'Espagne. On retrouve de ces amphores Dressel 7-11 dans les niveaux de 20 avant JC, sur le même site que les maquereaux à Lyon. Selon Jacques André, il est, avec le thon, salé, une des espèces les plus consommés et les plus appréciés par les Romains.

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Contes et légendes :


Dans Les Contes des marins (G. Charpentier Éditeur, 1882), Paul Sébillot rapporte les contes suivants :


La Houle du Vâlé


Il y avait une fois à Saint-Cast un vieux pêcheur qui était pauvre comme Job. Il ne prenait presque jamais de poisson, et pourtant il avait beaucoup d’enfants qu’il fallait nourrir.

Un jour qu’il passait au-dessus de la Houle du Vâlé, il entendit une voix qui disait :

— Pâte au four, couâmelle [petite fille], le four est chaud !

— Faites-moi, s’il vous plaît, une gâche [gallo : boule de pain], cria le vieux pêcheur.

Une heure après, une belle gâche bien dorée et de bonne odeur de pain frais se présenta devant lui, et une voix qui venait de sous terre lui dit :

— Voilà de quoi manger toute ta vie, si tu n’en donnes à âme qui vive autre qu’à ta femme et à tes enfants. Si tu as quelque autre chose à nous demander, reviens ici cette nuit, et nous te le donnerons.

Le vieux pêcheur porta chez lui la gâche des fées, et il dit à sa femme :

— Serre (1) bien ce pain, et n’en donne à personne qu’à nos enfants, nous en aurons pour toute notre vie. Le pêcheur alla la nuit à la houle, et il vit venir à lui deux fées qui lui dirent :

— Hé bien, pêcheur, as-tu réfléchi ? Que désires-tu ?

— Prendre du poisson autant que je voudrai quand je serai dans mon bateau.

— Hé bien, dit la fée, quand tu iras au maquereau, et que tu voudras faire bonne pêche, tu n’auras qu’à dire !


Maquereaux, sortez de l’eau,

Et sautez dans mon bateau.


« Quand tu en auras trop, tu diras :


Maquereaux, hors de mon bateau,

Disparaissez dans l’eau.


Le pêcheur remercia les fées, et s’en alla bien content. Le lendemain, il monta dans son canot, et quand il fut arrivé aux Bourdineaux, il s’écria :


Maquereaux, sortez de l’eau

Et sautez dans mon bateau.


Aussitôt la mer parut comme salée de poisson et les maquereaux sautaient dans le canot, en faisant : Klouk ! Klouk ! L’un n’attendait pas l’autre. En peu de temps, il eut autant de poisson qu’il pouvait en désirer, et tous les jours il s’en revenait avec une pleine batelée de poisson qu’il vendait très bien. Les autres pêcheurs, qui ne savaient comment il s’y prenait pour si bien réussir, le surnommèrent Preneur de maquereaux.

Il devint riche, et comme sa réputation de bon pêcheur de maquereaux s’était étendue au loin, le roi de France le fit appeler à Paris pour lui apprendre comment il faisait pour pêcher si bien. Le pêcheur lui répondit qu’il disait seulement :


Maquereaux, sortez de l’eau,

Et sautez dans mon bateau.


Le roi fit publier au son du tambour dans tous les havres de France les paroles que lui avait dites le vieux pêcheur ; mais les autres eurent beau s’enrouer à les répéter, ils ne purent jamais prendre autant de poisson que lui.

Bientôt il cessa de pêcher, et lui et sa famille vécurent heureux avec les présents des fées.


Conté en 1881, par François Marquer, de Saint-Cast, mousse, âgé de 14 ans.


Note : 1) Serrer est employé en gallo avec les sens de récolter et ranger.


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Le Roi des maquereaux et le Roi des brèmes


Un jour le roi des Maquereaux rencontra le roi des Brèmes qui lui dit :

— Roi des Maquereaux, comment te trouves-tu de tes sujets ?

— Ma foi, répondit-il, pas trop bien ; mes maquereaux sont des canailles, et il y en a un qui m’a crevé un œil. Et toi, roi des Brèmes, es-tu content des tiens ?

— Non, dit le roi, ce sont tous des coquins, et l’un d’eux m’a coupé deux de mes nageoires les plus utiles.

— Roi des Brèmes, tu n’es pas mieux escorté que moi ; si tu veux nous allons laisser nos sujets.

— Je le veux bien, répondit le roi des Brèmes.

Ils désertèrent tous les deux et l’on ne sait où ils sont allés ; quant aux maquereaux et aux brèmes, ils n’ont plus de roi et ils sont soumis au roi des Ripons.


Conté en 1881, par François Marquer, de Saint-Cast, mousse, âgé de 14 ans.


Note : Le ripon est le maquereau bâtard, Caranx trachurus.

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